





« …Punir sans complaisance, l’atteinte à la vie et à la dignité humaine, le viol, le tribalisme,… », ces termes ont constitué la substance du discours de « Kabila » Joseph, le 30 juin à Kinshasa, boulevard de la » liberté ». Alors que les congolais continuent à pleurer Floribert Chebeya, le très regretté président de la Voix des Sans Voix, assassiné le 1er juin et inhumé ce 28 juin 2010. Bien que tous les soupçons pèsent sur ses protégés et responsables de la police, le président Kabila et ses acolytes ont continué à sabler le champagne hier à Kinshasa. A l’occasion des 50ans de l’indépendance de la RDCongo. Pour l’histoire. Mais pour certains congolais, c’est 50 ans de recolonisation. Pour preuve, le Congo utile, le Nord, le Sud-Kivu et la province orientale sont occupées par les forces armées étrangères: rwandaises et ougandaises. Sans oublier que, même la sécurité de la capitale Kinshasa est entre les mains d’un certain « Bisengimana », encore un. Celui qui a remplacé John Numbi, l’ancien inspecteur général de la police nationale, suspendu de ses fonctions pour enquête dans l’affaire Chebeya. Enlèvements et assassinats des défenseurs des droits de l’homme et des journalistes, massacres, viols, incendies des villages, déplacement forcé des populations ou leur concentration dans certains camps, comme des réfugiés, dans leur propre pays. Au profit des « mystérieux réfugiés congolais » en retour au Kivu, en provenance de l’Ouganda et du Rwanda. Telle est une partie du bilan des 50 ans de l’indépendance de la RDCongo.
Un discours mensonger
Alors que l’insécurité est le lot quotidien des populations de l’Est du pays, qui ont l’impression que leurs provinces sont occupées par les armées rwandaises et ougandaises, et que même les camps militaires sont attaqués (à Nyaleke par exemple non loin de Beni), Kabila Joseph a osé parler de « l’unité du pays comme l’une des victoires remarquables de ces dernières cinquante années ». Et il a ajouté, » le rétablissement de la paix, de la réconciliation nationale, de l’instauration de la démocratie comme des acquis de ce dernier siècle ». Pas un seul congolais et surtout un Kivutien sérieux ne peut croire en ces belles paroles contraires à la réalité. Pire, on pouvait lire sur une énorme banderole » le réveil du géant, la RDCongo, paradis terrestre ». Sans gêne. Plutôt à la limite de l’enfer où il n’y a pas de courant et d’eau courante pour tous. La capitale Kinshasa, vivant au rythme des délestages quartier par quartier, ou des groupes électrogènes, se plaignent les kinois. L’arrière pays, n’en parle plus pour s’être accommodée de cette situation d’obscurité. Alors que le pays abrite l’un des plus grands barrages hydroélectriques au monde, le fameux barrage d’Inga dans la province du Bas-Congo. La route, l’autre obstacle au développement de la RDCongo. Avec moins de 5000km de routes asphaltées dans un pays de 2 345 000 km carrés, c’est d’ailleurs sur un bout de route de moins d’un kilomètre, asphaltée à l’avant-vite pour cacher la misère, que s’est déroulé le défilé du cinquantenaire de l’indépendance. On peut toujours parler des chinois qui sont en train de construire certains axes routiers. Mais reste à savoir s’ils résisteront pour combien de temps. Certains observateurs relèvent que la qualité de leur travail serait sujette à caution. Car il se pourrait qu’à la moindre tombée des pluies, dans un pays au climat tropical et pluvieux, certains tronçons ne résistent pas. On signale par ci par là, la corruption de certains contremaîtres chinois, qui n’hésitent pas à vendre du ciment et autres matériaux à des civils pour gagner un peu d’argent. On déplore également le fait que ces chinois ne laissent pas beaucoup de place aux milliers des chômeurs congolais tant ils sont venus même avec les petits maçons et d’autres manœuvres. Ceci pour dire que ce gros contrat de construction des routes ne serait pas doublé d’un volet formation des nationaux. Bien au contraire, on signale même des cas de maltraitance de la part de ces nouveaux « colons » à l’égard des ouvriers congolais. Après cinquante ans d’indépendance.
Pour revenir au discours, lorsque Kabila pointe du doigt le tribalisme, le régionalisme, s’est-il rendu compte que le reste de ses doigts de la main droite le lui reprochaient.Car il accumule toutes ces antivaleurs. Si la police est entièrement dirigée par les Katangais, oublie-t-il que le présumé complice des assassins de Chebeya, John Numbi et la plupart de ses adjoints sont des Katangais? A la cour suprême de la justice, le procureur général s’appelle Kabange comme Kabila Joseph sans oublier les autres Katumba Mwange, surnommé « premier premier ministre », l’homme fort de la présidence. Son discours, bon pour la consommation extérieure, ne peut que révolter les congolais. Quant au viol, se rappelle-t-il que, depuis qu’il est au pouvoir à Kinshasa, la RDCongo est passée pour « la capitale mondiale du viol », comme l’a souligné Margot Wallström, l’envoyée spéciale de l’ONU, chargée de la lutte contre les violences faites aux femmes et aux enfants dans les conflits!
Où est la paix retrouvée?
Et quand il a parlé de rétablissement de la paix sur tout le territoire, Kagame et Museveni, présents à cette manifestation, ont du se moquer de lui. Tant ils continuent à maintenir leurs troupes sur le sol Congolais. Non pas pour la paix et la sécurité des congolais, mais plutôt pour la sécurité de leurs pouvoirs personnels et de leurs pays respectifs. Sous prétexte que la RDCongo abriterait des milices armées contre leurs pays alors que c’est plutôt pour l’exploitation des richesses de la RDCongo. Certains observateurs n’hésitent plus à parler d’accords secrets passés entre Kagame et une partie des militaires hutu modérés(FDLR) réfugiés au Congo, de s’y installer pour longtemps contre ravitaillement. D’où les incendies des villages, les destructions des récoltes et le déplacement forcés et violents des pauvres populations congolaises abandonnées à leur triste sort. Il en serait de même pour les LRA de Joseph Kony qui continuent à commettre des exactions dans la province orientale et que l’armée de Museveni, dite disciplinée et fortement équipée n’a jamais réussi à déloger. On est tenté de croire à des connivences au détriment des congolais.
Même la fameuse MONUC, devenue MONUSCO (Mission des Nations Unies pour la Stabilisation du Congo), suite à la résolution 1925,inaugurée ce 30 juin 2010 à Kinshasa par Ban-Ki-Moon, n’a pas véritablement contribué à ramener la paix. Cette mission débaptisée, sera-t-elle plus efficace après les échecs répétés et les accusations dans divers trafics qui ont pesé sur les responsables militaires et civils de la MONUC? Rien n’est moins sûr. Les congolais ne sont plus confiants. Car la paix qui leur a été tant promise, tarde à venir. Ils ont toujours du mal à comprendre à quoi servent toutes ces organisations parfois dédoublées à l’instar de « AMANI LEO »( la paix aujourd’hui) qui prétend avoir démobilisé plus de 5000 FDLR(hutu armés), alors que la violence leur attribuée continue à s’intensifier. A en croire certains médias et ONG localement représentés.
Quelle solution?
La solution est en grande partie entre les mains des congolais eux-mêmes. Ils doivent tout d’abord être capables d’établir leur responsabilité dans tout ce qui leur arrive. Car ils ont tendance à croire que c’est la faute des autres. Si la majorité silencieuse est résignée, l’élite congolaise endosse la plus grande part de responsabilité. Car elle n’a pas su sensibiliser le congolais moyen au sens du pouvoir, qui se traduit par la défense de l’intérêt général. Et surtout sur la question de savoir que c’est la population qui détient tout le pouvoir et non les militaires qui ont toujours fait régner la terreur en RDCongo. Le citoyen congolais devra être un jour capable d’interpeller le militaire en lui faisant savoir que la tenue et l’arme qu’il porte, ont été payées par le contribuable. Et que par conséquent, il est au service du citoyen et de l’intérêt général et qu’il n’a pas le droit de vie et de mort sur lui. Malheureusement, à voir comment cette élite se déculotte devant « Kabila » Joseph, le citoyen congolais se demande finalement qui le délivrera. La menace de fusillade par Kabila, à l’endroit de ses ministres de l’environnement, de l’aménagement du territoire et du plan, reste encore fraîche dans les mémoires. Leur piteuse rentrée dans les rangs de l’AMP comme des gamins immatures, après leur tentative de dissidence, ne rassure personne. Un signal fort contre toute velléité d’opposition. Même une certaine presse de Kinshasa, à la main tendue, n’est pas épargnée. Car à voir comment l’assassinat de Chebeya Floribert a été rapporté par le Soft, un des journaux prétendu » sérieux » de la capitale, dirigé par un professeur de journalisme, on s’interroge. Ceci pour dire que l’élite congolaise a encore du mal à s’affranchir. Et personne n’ignore que la plupart des dirigeants congolais en commençant par le président lui-même sont passés soit par Kampala, soit par Kigali avant d’obtenir la légitimité dans leur propre pays. A dire vrai, le RCD/Goma(Rwanda) est toujours au pouvoir à Kinshasa, à l’instar de Mende Omalanga, un de ses anciens militants. A Kinshasa, dans les milieux du pouvoir, chacun a son rwandais, son ougandais ou son libanais protecteur de qui il reçoit les ordres. Pour tout dire, le congolais devra d’abord s’approprier son histoire, son territoire et ses richesses naturelles et retrouver la fierté d’appartenir à un grand pays. Il devra chasser la peur de mourir et se préparer au sacrifice. Car la guerre, bien que exception de la paix comme règle et dernier recours, fera certainement partie des solutions pour la libération totale de la RDCongo. Aussi faudra-t-il mettre sur pied, au plus vite, un vivier des leaders motivés, prêts à prêter serment, pour remplacer, les « Kabila » et continuer le combat de Chebeya Floribert. On peut tout de même croire que plusieurs Chebeya Floribert sont nés de l’indignation qu’ a suscité son assassinat et que ceux qui l’ont tué n’ont qu’à bien se tenir. Car si « Kabila » se moque de tous les congolais, c’est aussi parce qu’il n’a pas en face de lui un adversaire digne de ce nom et continue à croire que tout le monde l’appelle « raisi » ou » vieux » comme on aime le dire à Kinshasa. Il y a urgence et il ne faudra plus que cela dure. Il y aura certes un prix à payer, mais il sera nécessaire pour que le congolais célèbre une véritable indépendance.
Mbusa Faustin
France
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