





Les africanistes ou, à mieux dire, certains d’entre eux, ont toujours exprimé le souhait de voir surgir en terre africaine une démocratie à l’africaine. Cette démocratie à l’africaine qu’ils appellent de tous leurs voeux tarde cependant à voir le jour.
Tout en formulant des critiques acerbes à l’endroit de la démocratie occidentale, on constate curieusement que les démocraties périphériques ont du mal à résister à la tentation de s’en inspirer quand cela arrange leurs animateurs. En effet, quand ceux-ci s’en inspirent, c’est moins pour l’adapter à nos réalités que pour y puiser ce qui, en elle, est de nature à favoriser leurs intérêts ou leur maintien au pouvoir. Le peuple dans son ensemble est-il conscient de ces manoeuvres? Rien n’est moins sur. Seule une frange partie du peuple en est consciente notamment l’élite intellectuelle.
En Occident, quand les citoyens sont appelés aux urnes, ils savent pourquoi cet appel leur est lancé. Aussi réagissent-ils en conscience et connaissance de cause. Ils savent que les élections sont des moments forts et importants dans la mesure elles préparent le refaçonnement de leur histoire non pas dans le sens de la loi antique et cyclique de l’éternel retour du même au même mais plutôt dans celui du progrès ou, ce qui revient au même, de la croissance du bien-être général. Dans la mesure où les électeurs sont conscients de la portée de ce dont il est question, ils sont spontanément enclins à prendre très au sérieux ce qui leur est demandé: le choix libre et raisonné des artisans de leur bonheur.
Il n’est pas excessif de convenir avec les démographes que le taux d’analphabétisme est très criant en Afrique, c’est-à-dire, en ce y compris la R.D.C. De ce point de vue, on est en droit de se demander quelle est la validité juridique de la voix des personnes non informées, sous-informées ou ignorantes. En d’autres termes, la voix de ceux qui se rendent aux urnes à l’aveuglette c’est-à-dire sans trop savoir pourquoi ils y vont, a-t-elle une valeur dans la mesure où, inconsciemment, ils peuvent voter pour leur propre malheur en portant au pouvoir des gens qui vont les broyer, enliser le pays dans l’immobilisme ou, dans le pire des cas, engager celui-ci sur la voie de la régression?
Il y a eu dernièrement un referendum en R.D.C. où il était demandé aux citoyens de se prononcer sur la Constitution devant régir la 3ième République. Combien ont-lu ce texte? Combien en ont compris le contenu? Est-ce respecter le peuple que de soumettre à son appréciation un texte auquel il ne comprend rien ou presque rien pour ne lui avoir pas été préalablement expliqué?
Etant donné le taux effarant d’analphabétisme qui caractérise notre pays, ce qui me paraît adapté à cette réalité c’est la constitution d’un collège d’électeurs, constitution à laquelle serait associé, par voie électorale, le peuple dans son ensemble.
Mais la démocratie à l’africaine étant encore à concevoir, donc loin de devenir une réalité et compte tenu de l’imminence de la tenue des élections générales et des espoirs placés en elles, ceux qui, sur le terrain sont avertis, ont la lourde responsabilité d’éclairer les électeurs sur les enjeux du moment et de leur expliquer la nécessité de subordonner leur choix plus à la crédibilité des candidats qu’aux promesses faites par ces derniers lors de la campagne électorale ou aux cadeaux que certains ont déjà commencé à distribuer pour distraire l’électorat, cadeaux qui ne remplaceront jamais la justice sociale qui doit impérativement être instaurée dans le pays au lendemain de cette longue et éprouvante transition.
P. Léopold Kamundu, O.Praem.
New York, USA
Editorialiste de Beni-Lubero Online
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