





Point n’est besoin d’introduire cette lettre ! Aucune introduction ne saurait mieux la présenter. Mais permettez-nous d’attirer votre attention sur les points suivants qui constituent la nouveauté et la spécificité de cette lettre par rapport aux précédentes
1. Pour la première fois, tous les groupes de la Société de Beni et de Lubero se sont assises autour d’une table. Et ensemble elles en arrivent à parler d’une seule voix et à arrêter des décisions qui seront exécutées au même moment et le même jour partout dans le Grand-Nord. C’est le cas de la décision de trois jours de grève sur toute l’étendue des territoires de Beni et de Lubero.
2. Pour la première fois, toutes forces vives sociales se rencontrent et regardent vers la même direction. Catholiques et protestants, fidèles et leurs pasteurs, paysans et intellectuels, tous ont apposé leurs signatures sur la lettre.
3. Pour la première fois, la base rappelle à ses élus qu’ils siègent dans les différentes institutions en son nom. Et pour cela, elle leur demande d’interrompre toute affaire cessante leur participation au parlement et si nécessaire au sénat si leur cri n’est pas attendu.
4. Pour la première fois, la base dit haut ce qu’elle a toujours dit à voix basse. Elle désigne sans peur tous ceux qui sont impliqués dans ces massacres ; refuse toute aide aussi bien nationale qu’internationale qui en réalité contribue à son malheur ; s’insurge contre tout mensonge et exige une enquête internationale, neutre et indépendante pour établir la vérité ; rien que la vérité.
Découvrez-en vous-mêmes le contenu et laissez-vous transformer par cette lettre !
SOCIETE CIVILE FORCES VIVES DE LA REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO
SOCIETE CIVILE DU NORD-KIVU.
COORDINATIONS TERRITORIALES DE BENI ET DE LUBERO ET URBAINES DE BUTEMBO ET DE BENI.
Beni, le 14 mai 2016
LETTRE OUVERTE
Adressée à Son Excellence Monsieur le Président de la République Démocratique du Congo, (Avec nos hommages les plus déférents)
Concerne : Situation sécuritaire préoccupante dans la région
Excellence,
Nous, membres des Forces vives des Territoires de Beni et de Lubero et des Villes de Beni et de Butembo, réunis à BENI en Assemblée Générale Extraordinaire ce Samedi 14 mai 2016, avons l’honneur de vous faire part des conclusions de notre rencontre.
En effet, nous avons passé en revue la situation socio-sécuritaire de notre région et avons constaté ce qui suit :
– Plus de 1116 personnes tuées sauvagement entre Octobre 2014 et Mai 2016, soit une moyenne de 60 personnes tuées par mois, ou encore une moyenne de 2 personnes tuées par jour ;
– Plus de 1470 personnes enlevées et portées disparues ;
– Plus de 1750 maisons incendiées avec, parfois, des personnes et biens calcinés ;
– Au moins 13 Centres de Santé incendiés parfois avec des malades et du personnel soignant à l’intérieur ;
– Plus de 27 Ecoles détruites, d’autres abandonnées, d’autres encore occupées soit par des déplacés, soit par des dépendants des militaires, soit par des groupes armés ;
– Plusieurs villages entièrement occupés par les groupes armés : c’est le cas des villages de Kyuto, Katundula, Ivimbo, Mwekwe, Mukeberwa, Fungulamacho, etc en Territoire de LUBERO. Plus grave encore, à Kyuto, les FDLR ont procédé à l’installation de leur chef coutumier et se sont même arrogé le pouvoir de créer et de percevoir des taxes et redevances coutumières. En Territoire de BENI, les villages de Kamungu, Maisafi, Pkwele, Kakuka, Eringeti, Tigwe, Kokola, Linzosisene, Opira, Totolito, Mamundioma, Kinziki, Vemba, Tipiomba, Masulukwede, Kadou, Kididiwe et Munzambayi sont sous menace permanente d’occupation.
– Plusieurs femmes et enfants violés ;
– Plus de 34.297 ménages en déplacement forcé et dispersés ;
– Plusieurs cas d’enfants en état d’abandon scolaire ;
– De nouvelles incursions des forces et groupes armés venant de l’étranger sur le sol congolais entrant par la Chefferie des Bashu et les Secteurs de Rwenzori, de Beni-Mbau en Territoire de BENI ainsi que par la Chefferie des Batangi en Territoire de LUBERO ;
– Des pillages systématiques des ressources naturelles et destructions méchantes des biens de la population ;
– Des déplacements collectifs et suspects des populations mono-ethniques et monolingues d’origine indéterminée avec une intension à peine voilée d’occupation des terres et de balkanisation;
– La connivence de certains Commandants et Eléments d’Unités FARDC avec les forces négatives et avec certains déserteurs qu’ils sont censés combattre ;
Excellence,
Face à ces multiples faits et violations des droits humains de nombreuses questions nous hantent :
– Pourquoi le Gouvernement congolais et la Communauté internationale hésitent-ils de qualifier les massacres ciblés de Beni et de Lubero de crime de Génocide ?
– Pourquoi le Gouvernement central ne fait-il pas de la restauration de la sécurité en Territoires de BENI et de LUBERO et en Villes de BENI et de BUTEMBO une priorité comme ce fut le cas des BUNDU DIA KONGO, des ENYELES et du M23 ?
– Le Gouvernement congolais constate-t-il, comme la population, l’inefficacité de la MONUSCO avec sa Brigade d’intervention sur terrain ?
Avec cette fréquence accrue des tueries, nous craignons que la population de BENI et de LUBERO ne soit vouée à la disparition et que cette partie ne soit occupée par cette population aux origines inconnues, ouvrant ainsi la porte à la balkanisation effective.
Excellence,
Pour éviter de se trouver devant un fait accomplit et d’être assimilé aux autres complices de cette situation, les forces vives des Territoires de BENI et de LUBERO et des Villes de BUTEMBO et de BENI recommandent vivement ce qui suit :
Au Président de la République
1. En tant que garant de l’intégrité territoriale, de l’indépendance nationale, de la sécurité des personnes et des biens, du fonctionnement régulier des Institutions et en tant que Commandant Suprême des Forces Armées de la République Démocratique du Congo, de déplacer l’Etat Major Général de Kinshasa au Nord-Kivu, en vue de suivre de près la situation ci-haut décrite ;
2. D’interdire aux militaires le commerce et l’exploitation des ressources naturelles au détriment de leur mission première ;
3. D’instruire toute la chaine administrative de cesser de culpabiliser les populations locales – cela nous tue doublement – et d’assumer leur responsabilité en identifiant et en poursuivant les coupables ;
Au Gouvernement Central
1. De relever tous les militaires des Unités issues du brassage et du mixage notamment les ex-CNDP, les ex-M23, et les autres mouvements politico-militaires qui ont œuvré au Nord-Kivu depuis 1998 à nos jours, présentement en action dans les opérations SOKOLA 1 ou USALAMA ;
2. D’accorder aux morts des Territoires de BENI et de LUBERO, des Villes de BENI et de BUTEMBO la même attention que celle accordée aux autres ;
3. D’accélérer le processus de rapatriement des rebelles Rwandais FDLR et leurs dépendants où qu’ils soient dans leur pays d’origine ;
4. De faire le suivi, à travers l’organe approprié, des éléments ex-M23 se trouvant dans les pays voisins notamment en Ouganda et au Rwanda ;
5. D’abandonner le langage de présomption qui évoque régulièrement les « présumés ADF/NALU » et de dire clairement l’identité des tueurs. Les capturés peuvent être mis en contribution pour cela.
Aux Parlementaires nationaux
1. Aux Députés de maintenir la décision de se retirer de leur hémicycle, et aux Sénateurs de leur emboiter les pas, aussi longtemps que les solutions pour la paix et la sécurité ne sont pas trouvées.
2. Spécifiquement aux Elus des entités affectées par les massacres, de regagner leurs fiefs électoraux pour concertation avec les forces vives ;
Au Gouverneur et au Gouvernement provincial du Nord-Kivu
1. De venir justifier et expliquer aux Forces vives l’origine et le mobile du déplacement collectif des populations Rwandophones d’autant plus que les massacres que nous déplorons correspondent au moment de leur arrivée dans les entités en proie aux tueries
Aux Députés provinciaux élus des Territoires de BENI et de LUBERO, des Villes de BENI et de BUTEMBO
1. De regagner leurs fiefs électoraux pour concertation avec les Forces Vives ;
Aux Autorités locales
1. De cesser de duper la population par des propos qui viennent de leur hiérarchie car « mieux vaut obéir à sa conscience qu’aux lois injustes ».
2. De laisser aux medias ainsi qu’aux acteurs de la Société civile le droit à la liberté d’expression garanti par la constitution.
A la Communauté Internationale
1. De déclarer comme crime de génocide les massacres ciblés des Territoires de BENI et de LUBERO et des Villes de BENI et de BUTEMBO et de diligenter une enquête internationale indépendante en vue d’identifier les auteurs et de les juger ;
2. D’évaluer les actions de la MONUSCO avec sa Brigade d’Intervention et de rendre public le rapport d’évaluation. Nous réclamons une opération du genre ARTEMIS pour mettre fin à ces massacres odieux ;
3. D’exiger du Rwanda et de l’Ouganda de cesser tout soutien aux Génocidaires opérant en Territoires de BENI et de LUBERO et en villes de BENI et de BUTEMBO.
Excellence,
En plus de ces recommandations, l’urgence de la situation dicte aux Forces vives des Territoires de BENI et de LUBERO et des Villes de BENI et de BUTEMBO les actions suivantes :
1. L’observation par toute la population des Territoires de BENI et de LUBERO et des Villes de BENI et de BUTEMBO de trois journées villes mortes à partir du Mercredi 18 mai au Vendredi 20 mai 2016 en mémoire de 1116 personnes tuées sauvagement dans la région ;
2. La suspension par la population de tout payement des taxes et impôts jusqu’au rétablissement de la paix et la sécurité (cessation des massacres) ;
3. Le déboisement par la population du Parc National des Virunga, des réserves et des forêts environnantes qui servent de cachette aux tueurs – malgré les recommandations pertinentes de la COP 21 – si le Gouvernement Congolais et la Communauté Internationale ne s’empressent pas à anéantir les génocidaires ;
4. Le refus de l’aide humanitaire car nous ne voulons que la paix ;
5. La mobilisation de la population pour une assistance en vivres et non vivres au bénéfice des rescapés conformément aux programmes indiqués par les Coordinations de la Société civile respectives ;
6. L’appel à la solidarité d’autres Provinces, de la diaspora congolaise et d’autres personnes de bonne volonté en faveur des rescapés des massacres et d’autres populations vulnérables ;
7. L’interdiction de toute circulation de véhicules et aéronefs de la MONUSCO et des ONG Internationales jusqu’à la restauration effective de la paix.
Dans l’espoir que le contenu de cette lettre retiendra votre meilleure attention, nous vous prions d’agréer, Excellence, l’expression de nos sentiments patriotiques.
Voir les signatures sur ce lien:
LETTRE-OUVERTE-FORCES-VIVES Signataires
« On comprend ainsi le grave danger de toute rallonge au pouvoir de Joseph Kabila. Les congolais de ce nom doivent refuser toute forme de transition. En effet, au vu de ce qui se passe au Kivu-Ituri, toute transition au-delà de décembre 2016, donnerait du temps et des moyens au gouvernement congolais qui est, de toute évidence, complice de l’occupation rwandaise du Kivu-Ituri en cours » (Père Vincent MACHOZI, le 19 mars 2016).
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