




Le Chef de Collectivité des Bashu, Mwami Sulemani Patanguli, et le chef de groupement Isale-Bulambo, Mwami ABASI, tentent de protéger le marché des Haricots dans la contrée qui est sous leur responsabilité. Ils ont ainsi interdit sans succès l’exportation des haricots en dehors de la Collectivité et demandent aux producteurs de doubler le prix d’un Kilo des haricots de 180 à 360 Francs Congolais, et le gobelet (appelé localement ‘akasahani’) de 45 à 90 FC pour les consommateurs de la chefferie des Bashu. Notez que les haricots au centre de la controverse sont de la variété nouvellement arrivée dans la région et qu’on appelle en jargon beniluberois « Kablangiti » ou « Kalangiti » (c’est-à-dire Couverture).
La variété des Haricots appelée " Kalangiti"
Cette mesure des chefs coutumiers est la première dans l’histoire de la chefferie. Pourquoi les chefs coutumiers qui n’avaient plus pignon sur rue depuis leurs illustres prédécesseurs Machozi, Kalemire, et Abdelatif d’heureuse mémoire, sont-ils tout a coup sortis de leur mutisme habituel ?
En effet, il s’observe dans la Collectivité des Bashu, en Territoire de Beni, un phénomène inhabituel à savoir le boum du marché des haricots au point que les observateurs craignent une famine dans la chefferie dans un avenir proche.
Sachant que la production des haricots de cette année n’était pas suffisante à cause de l’insécurité dans les champs, et notamment la suppression des champs des haricots du Graben, endroit fertile appele communément « Domaine ».
Faisant le tour de certains villages tels Makungwe, Katanda, Vusereghenye, Mwighalika, nous avons constaté que certaines familles se privent du peu des haricots qu’elles ont produit pour les vendre aux acheteurs devenus nombreux dans la région et qui font une véritable chasse aux haricots Kalangiti. Les chefs coutumiers ont raison de dire que la quantité produite cette année est de loin inferieure à la demande locale.
Comme on pouvait s’y attendre, l’appel des chefs coutumiers est tombé dans des oreilles des sourds. Les producteurs des haricots kalangiti veulent profiter de l’occasion pour se faire un peu d’argent pour divers autres besoins de leurs familles.
Pourquoi les acheteurs se bousculent-ils seulement aux portillons des Bashu ? Pour certains analystes, c’est parce que pendant l’année écoulée, la chefferie des Bashu a bénéficié d’une securité relative contrairement aux chefferies productrice des haricots telles que Mbingi, Luofu Bunyatenge, Kasugho, Miriki, Rutshuru, etc. Ceci expliquerait pourquoi des gros acheteurs venant de partout, de Butembo, de Beni, et surtout de Goma et de l’Ouganda, viennent se ravitailler en haricots, pour la première fois en si grand nombre, dans ce coin du Territoire de Beni. Les observateurs soupçonnaient Nkunda d’être à la base de cette rafle des haricots sur le marché d’Isale-Bulambo afin de faire une provision pour ses milices en ce temps de guerre.
Une vue du Marché de Bulambo ( Isale) -Territoire de Beni
La chefferie des Bashu, est connu normalement pour son café-arabica. Aujourd’hui, elle se découvre première productrice des haricots Kalangiti dans la région de Beni-Lubero.
Le devoir de solidarité régionale demande que ceux qui ont eu une bonne récolte partagent avec ceux qui n’en ont pas eu. Mais le partage doit être réglementé. La mesure des chefs coutumiers des Bashu a ainsi sa raison d’être même si elle est restée impopulaire.
D’après les observateurs présents dans la chefferie des Bashu, quelqu’un se doit d’expliquer aux producteurs des haricots kalangiti que la récolte ayant été maigre dans toute la région, il n’est pas bon de vendre jusqu’à la semence ( embuto). Ce genre de comportement éradiquerait petit à petit la culture des haricots. Devant l’euphorie des producteurs pour les billets de banque, une sensibilisation à la valeur de l’argent et de la semence s’impose. La mesure des chefs coutumiers doit être approfondie par tous et ses mesures d’application doivent renforcées.
Une légende d’Asie raconte comment dans l’histoire de l’occupation du Vietnam par la Chine. Les Chinois plus nantis que les Vietnamiens et jaloux des arbres fruitiers qui faisaient la gloire du Vietnam, avaient inventé une stratégie consistant à acheter et les fruits et les racines des arbres fruitiers, obligeant ainsi les Vietnamiens à vendre et les fruits et les racines des arbres. Pour avoir les racines, les Vietnamiens était obligés de déraciner les arbres fruitiers. Quelques années après, le Vietnam perdait complètement la culture des plusieurs espèces d’arbres fruitiers et commençait à importer des fruits de la Chine.
Espérons que les producteurs des haricots de la chefferie des Bashu prendront conscience qu’il ne faut jamais vendre la semence des haricots. Cet appel vaut aussi pour tous les agriculteurs de Beni-Lubero, notamment ceux de Manguredjipa ou le riz, l’huile de palme et les arachides qui faisaient la fierté du coin y sont devenus très rares et chers. Il y a en effet un an qu’un bidon de 20 litres d’huile de palme coutait 6 US$. Aujourd’hui le même bidon coute entre 12 et 13 US$. Il en est de même de la farine de Manioc qui coutait il y a un an 0,2 US$ le Kg, aujourd’hui 1 Kg de farine de Manioc coute entre 160 et 180 FC, soit 0,32 – 0,38 US$.
Il y a ainsi un risque d’une insécurité alimentaire à Beni-Lubero par le fait de l’insécurité devenue monnaie courante dans les zones agricoles. Pour endiguer ce fléau alimentaire, tous les beniluberois doivent emboiter le pas aux chefs coutumiers pour protéger le marché des haricots ainsi que tous les autres intérêts des beniluberois en ce temps de guerre dans la région.
Juvenal Paluku
Isale- Bulambo
Beni-Lubero Online
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