





Dans deux mois environs, le peuple congolais sera invité à élire les personnes, hommes et femmes, qui vont assumer la lourde responsabilité de sortir le pays du bourbier dans lequel il patauge depuis des décénies. Une chance que lui offre, une fois de plus, l’histoire récente de ce pays aux potentialités énormes. Il serait fort regrettable de gaspiller une telle opportunité lorsqu’on sait que depuis l’indépendance du pays jamais le peuple n’a eu à se choisir des dirigeants. Chaque congolais, chaque congolaise, tous ceux qui disent aimer bien ce pays, aimer sa population et désirer son bonheur devraient s’investir pleinement afin que ces élections soient transparentes et démocratiques.
Les leaders de la Société civile, ceux qui ont combattu avec acharnement la dictature mobutienne avec son cortège des antivaleurs (la gabegie ou le gaspillage, la corruption, l’incurie, le détournement des biens de l’Etat, la démagogie, le tribalisme, …) ont un rôle particulier à jouer : aider le peuple à y voir un peu plus clair. Ils devront se ranger, sans condition préalable, du côté du peuple meurtri afin de l’aider à choisir des hommes et des femmes capables de lui redonner l’espoir.
Les élections démocratiques, lorsqu’elles sont transparentes, comportent, pour un peuple, deux enjeux majeurs. Elles offrent au peuple l’occasion de sanctionner (au sens de punir) les mauvais gestionnaires des biens de l’Etat. Concrètement, c’est chaque électeur et chaque électrice lorsqu’il/elle se trouve seul dans l’isoloir, qui punit dans la discrétion de sa conscience, le mauvais dirigeant. Mais les élections offrent aussi au peuple, c’est-à-dire à chacun de nous personnellement l’occasion de récompenser les bons dirigeants. C’est à travers les élections que le peuple dote les institutions du pays des gestionnaires responsables et sérieux. Il importe donc à tout congolais, à toute congolaise de choisir, cette fois-ci, des dirigeants dignes et soucieux de l’avenir du pays et de sa population.
Dans les circonstances actuelles, faire un bon choix n’est nullement évident. De nombreux facteurs doivent être pris en compte. Certains parmi ces facteurs sont de nature à compliquer la tâche de l’ électeur et de l’ électrice. Cependant certains autres facteurs peuvent lui faciliter la tâche. Parmi les facteurs facilitateurs, il y a le fait que les noms des candidats sont connus longtemps à l’avance. Les candidats ne peuvent pas se cacher s’ils veulent être élus. Ils devront faire campagne. Or, si on jette un coup d’oeil rapide sur la liste que vient de publier la CIE, on ne peut s’empêcher de constater que toutes les personnes qui veulent gouverner le pays ont déjà exercé le pouvoir. Je ne peux donc pas leur donner ma voix sans m’interroger sur leur précedente gestion. Certains parmi eux sont des véritables criminels, des assassins impénitents. D’autres sont des voleurs et des escrots. Pendant la campagne, ils vont tous tenter de nous bercer par des discours mielleux, ils vont tous chercher à nous endormir par des promesses fallabuleuses. Certains vont distribuer des cadeaux et de l’argent (je me demanderai d’où vient l’argent qu’ils distribuent ainsi au moment où le peuple croupit dans la misère ?)
Voici, de toutes les façons, le candidat que je ne voterai pas.
1° Je ne donnerai pas ma voix au candidat qui a constitué une milice et qui a pris des armes, tuant et pillant les richesses du pays avec la complicité des armées étrangères, pour accéder au pouvoir. Ils sont nombreux parmi les candidats. Voter pour un tel candidat, c’est donner le pouvoir à un assassin et un criminel. Demain, si cet homme est élu président, je parie qu’il ne quittera pas le pouvoir, il fera changer les lois, il reprendra les armes pour conserver le pouvoir. N’ayons pas une mémoire courte, le pays vient à peine de vivre une telle expérience.
2° Je ne donnerai pas ma voix au candidat qui s’est scandaleusement enrichi lorsqu’il était gestionnaire des biens de l’Etat ou lorsqu’il gérait les finances de la collectivité (la banque, la douane, le service de recouvrement, la Snel, la regis des eaux, et autres services de l’Etats générateurs des recettes). Voter pour un tel candidat, c’est donner le pouvoir à un voleur et un criminel. S’il revient au pouvoir, cet homme continuera à piller les caisses de l’Etat. Il n’y aura plus à s’étonner lorsque les caisses de l’Etat resteront désépéremment vides, lorsque les salaires des fonctionnaires ne seront payés et que les subsides et autres frais de fonctionnement ne sont pas versés, que les routes continuent à se dégrader…
3° Je ne donnerai pas ma voix au candidat démagogue et menteur qui raconte des longues histoires mais ne réalise pas ce qu’il a promis de faire. Je ne voterai pas pour le candidat qui me bouche les oreilles avec ce qu’il va faire et qui ne dit rien sur ce qu’il a fait. Voter pour un tel candidat, c’est donner le pouvoir à un politicien véreux et menteur sans scrupule.
4° Personnellement, je ne donnerai pas non plus ma voix au candidat qui propose de l’argent aux gens pour qu’ils le votent. Certains pensent qu’il faut prendre l’argent et ne pas le voter. Pour moi non, je l’envoierai au diable avec son argent. C’est un corrupteur qui n’hésitera pas à puiser dans la caisse de l’Etat pour récupérer son argent une fois au pouvoir. Et par conséquent, je ne le voterai pas.
5° Je réfléchirai deux fois avant de donner ma voix au candidat qui aiment trop les plaisirs faciles : l’alcool, les femmes, les amuses-gueules et …. les fêtes. Je me demande si un tel candidat, une fois au pouvoir, sera à même d’amener le peuple au travail indispensable pour sortir le pays du sous-développement. Mais si parmi mes élus potentiels, il se trouve un qui n’affiche pas ses faiblesses à l’alcool et au sexe, je voterai pour celui-ci plutôt que pour celui-là.
Ce sont là quelques indicateurs qui peuvent nous inspirer lorsque nous nous trouverons seuls dans l’isoloir, seul devant notre conscience et devant …Dieu qui nous observe. Il va de soi que tout n’est pas dit. On peut certes trouver d’autres indicateurs. L’essentiel c’est d’analyser le comportement de ces hommes et femmes qui ont précipité le pays dans le gouffre où il se trouve aujourd’hui. Et se décider d’agir avec courage afin que tous ces criminels ne reviennent plus jamais au pouvoir.
Et là, la balle est, cette fois-ci, dans le camp de chacun et de chacune.
Avril 2006
Professeur Wasso Mbilizi (Ottignies/Belgique)
Ancien président de la Société civile (Sud-Kivu)





