





Comme la fin du Jour-2 de la Conférence de Goma le laissait présager, il n’y a pas eu de plénière à la Conférence de Goma, ce mardi 8 Janvier 2008, Jour-3. Le bureau technique de la Conférence était toujours confronté à la querelle des listes des participants que politiciens et différents notables du Kivu voudraient faire accréditer coûte que coûte au nom de l’inclusion, mot d’ordre de la Conférence.
.
Pour ne donner qu’un exemple, des sources proches des organisateurs de la Conférence indiquent que la province du Sud-Kivu aurait déjà à elle seule présenté plus de délégués que le quota initialement imparti aux deux Provinces du Kivu réunies. Pour ne laisser personne dehors, le bureau technique de la Conférence serait occupé à élargir le quota initialement prévu pour satisfaire toutes les autres listes en souffrance ou en attente.
.
Ce qui est curieux, c’est le fait que, pendant que d’un côté on parle de la prolifération des candidatures à la participation, les associations et communautés ethniques, telles l’ACN des Nande, qui avaient décliné l’offre de la Conférence parce qu’elles n’en connaissaient ni les tenants ni les aboutissants, n’ont pas encore changé d’avis. Ce qui veut dire que les candidatures actuelles se recruteraient en dehors des destinateurs premiers de la Conférence, c’est-à-dire, les communautés ethniques, la société civile, les mouvements associatifs, les chefs coutumiers, et les élus de la province. Car si tel n’était pas le cas, à la place et lieu de la querelle actuelle des listes, on parlerait de l’absence de certains délégués de certains groupes susmentionnés. A moins que les organisateurs qui comptent des prêtres parmi eux, n’aient decidé d’utiliser la méthode d’un certain Jésus envoyé initialement aux Juifs. Comme ces derniers n’avaient pas voulu le recevoir, il se tourna vers les païens, les exclus qui n’étaient pas du tout membres de l’Alliance. Ce Jésus ouvrit les portes de l’Alliance à tous, rendant possible la participation de tous jusqu’aux femmes et aux enfants ! Quelque chose de ce genre se passerait à Goma. La participation à la Conférence de Goma serait devenue individuelle. En d’autres termes, certains participants ne représenteraient que leur personne ou tout au moins leur famille biologique. C’est le cas de certains délégués de Beni-Lubero qui ne sont ni membres de la société civile ni mandatés par la Communauté Nande. Avec cette ouverture tous azimuts des portes de la Conférence de Goma, la constitution de la liste des participants peut-être sans fin car pour clore la liste, il faut bien trouver et s’en tenir à des critères objectifs précis. Sans cela, toute personne voire tout groupe des personnes peut profiter de la situation "Portes Ouvertes" de Goma pour menacer de faire échouer la conférence si son nom n’est pas repris sur la liste de participants. Un proverbe congolais ne dit-il pas que « qui ouvre grand sa porte, laisse entrer un éléphant »…
.
Le même problème de représentation ou de délégation s’était posé lors de la sélection des délégués au dialogue intercongolais de Sun City. Le bureau du facilitateur Ketumile Masire s’était buté au même problème de constitution des listes des délégués qui présentaient tous des raisons pour aller à Sun City. Des étrangers qui ne parlaient aucune langue congolaise avaient eu le privilège de discerner les délégués au dialogue parmi les milliers des candidats congolais qui présentaient leurs lettres de noblesse par l’intermédiaire d’un interprète. Le fruit de cet exercice onéreux était, par exemple, le fait que certains congolais étaient partis en Afrique du comme délégués Mai-Mai sans avoir jamais combattu sur un front ou dans un maquis. Certains politiciens étaient allés jusqu’à dire que tout congolais était par définition un Mai-Mai car tout congolais résistait aux agresseurs. Autrement dit que tout congolais qui se trouvait à Kinshasa pouvait aller à Sun City sur le quota des Mai-Mai de Shabunda, de Vurondo, etc. On a vu aussi des mobutistes patentés participer au dialogue comme kabilistes ou membres de n’importe quel parti politique qui avait eu la chance d’être retenu par le bureau de Ketumile Masire, etc. Le seul objectif étant devenu pour certains, être participant peu importe le label. A travers tous ces jeux politiques, le peuple ainsi que les problèmes auxquels il était confronté, étaient le cadet des soucis des uns et des autres.
.
La bataille des listes à laquelle on assiste à Goma est semblable à ce jeu malsain de Sun City et repose le problème de représentation. Qui représente qui à Goma? La réponse à cette question suffit pour mettre fin à la querelle des listes des participants. Il est en effet embarrassant de devoir se poser cette question en R. D. Congo où des élections législatives et présidentielles viennent juste d’avoir lieu dans la transparence selon la Communauté internationale. Il n’y a pas longtemps que le peuple du Kivu avait résolu le problème de ses représentants pour un mandat de cinq ans. Pourquoi passer outre cette volonté du peuple et dire en même temps que la Conférence ne touchera pas aux institutions issues des élections de 2006 ? Les Assemblées provinciales ainsi que les gouvernements provinciaux ne pouvaient-ils pas régler la question de la crise du Kivu ? Il en est de même de mouvements associatifs du Kivu tels la Société Civile, les ONG de développement et des droits humains, qui ont dans un passé récent rédigé des memos sur la crise du Kivu en quantité industrielle. Qu’est-ce que le gouvernement ainsi que les institutions internationales auxquelles ces memo étaient adressés ont fait de tout ce travail fait sans per diem par les hommes connaisseurs du terrain? Si on avait besoin d’une actualisation de ces memos, ne pouvait-on pas demander à chaque communauté et mouvement associatif de transmettre son actualisation à qui de droit comme contribution à la résolution de la crise du Kivu ? En procédant ainsi on aurait évité la querelle des représentants à la Conférence de Goma. Le gouvernement n’aurait pas non plus des soucis à se faire concernant le financement de la Conférence car les communautés ethniques ainsi que les mouvements associatifs ne demandent pas d’argent quand ils font des memos aux décideurs.
.
C’est ainsi que, après les discours d’ouverture de la Conférence de Goma, il est difficile de voir exactement quelle nouvelle perspective la rencontre de Goma va offrir à la problématique de la crise du Kivu. S’il n’y aura ni négociation avec qui que ce soit, ni partage ou élargissement du pouvoir à l’égard de ceux qui se disent exclus, ni entorse aux institutions issues des élections de 2006, à quoi sert la Conférence de Goma? Les élus d’hier étaient-ils incapables d’établir un simple agenda de paix et de développement à présenter aux législateurs et exécutifs congolais? Toute l’énigme de la Conférence de Goma est là.
.
A la fin du Jour-3, des sources proches des organisateurs ont rapporté sous le sceau de l’anonymat que le budget de 2 000 000 US $ alloués à la Conférence par le Président de la République serait déjà épuisé. Il faut de l’argent liquide pour conduire la conférence à son terme. L’opération « Paix en RDC » du Premier Ministre Antoine Gizenga demandant aux membres du gouvernement ainsi qu’aux congolais de cotiser de l’argent pour financer les travaux de la Conférence de Goma peut ainsi corroborer ces propos du budget déjà déficitaire de la Conférence de Goma.
.
Allons-nous mettre tous ces écueils sur le compte de la précipitation de la Conférence et de la prévision déficiente de la part des décideurs congolais ? Certes que non!
.
Le manque d’argent pour les réunions importantes des congolais comme pour le développement du pays en général est l’ironie de la richesse du Congo qui achète des armes sophistiquées pour les uns et qui ne peut même pas financer une rencontre d’une semaine pour la paix. Les débateurs du dialogue intercongolais se rappelleront de triste mémoire que le premier lieu de rencontre pour le dialogue intercongolais était Addis-Abeba. Trois jours après le début des travaux, pendant que certains congolais débarqués de l’avion agitaient encore ciel et terre pour rejoindre la capitale éthiopienne, les organisateurs étaient obligés de suspendre les travaux faute d’argent. Les grandes puissances qui avaient promis de soutenir financièrement la réunion d’Addis-Abeba, s’étaient rétractés à la dernière minute car le lieu choisit par les congolais eux-mêmes ne les intéressait pas. Les délégués étaient obligés de revenir au Congo et le dialogue intercongolais reporté sine die. Comme pour le cas de Goma, le premier million qui avait servi pour financer les trois premiers jours, était la contribution de la Composante Gouvernement de Joseph Kabila. Pour débloquer la situation, il avait fallu que l’Afrique du Sud offre en crédit son Resort Beach de Sun City pour que les travaux redémarrent dans ce milieu que les congolais n’aimaient pas au départ. Comment ils ne pouvaient pas financer les assises de leur paix eux-mêmes, ils finirent pas aimer Sun City. La suite est connue! Chaque fois que l’on parle de manque d’argent au Congo, il faut entendre par là un mécontentement des donateurs escomptés qui ne seraient plus d’accord avec ce qui se passe. En effet, ces derniers ne déboursent leurs millions que pour des opérations où ils espèrent tirer profit comme dans tout business Gagnant-Gagnant.
.
Ainsi, s’il y a vraiment manque d’argent pour la conférence de Goma, cela peut-être un signe de mécontentement des donateurs escomptés. Les jours qui viennent seront donc pleins de révélations sur les deux problèmes soulevés dans cette dépêché, à savoir, les vrais enjeux et les financements de la Conférence de Goma. A part les agendas des délégués, il y a l’agenda des financiers des assises de Goma. Dans ces circonstances, la collecte d’argent de Gizenga doit réussir pour sauver les assises de Goma!
.
Paul Maene
Goma
Beni-Lubero Online





