





Par ses derniers accords secrets avec le Rwanda et l’Ouganda, le gouvernement de Kinshasa est en passe de ramener le Congo dans sa situation de 1996 quand tous ses voisins de l’Est l’avaient agressé sous prétexte d’y poursuivre des rebelles dangereux pour leurs pays respectifs. Les faits ont par après démontré que l’intervention des armées rwandaises et ougandaises au Congo avait des mobiles plutôt économiques que sécuritaires. 13 ans après, Kinshasa n’a toujours pas assimilé la leçon, car si tel était le cas, il n’aurait pas prêté son flanc à ses agresseurs d’hier en leur permettant de revenir sur son sol. L’acte de Kinshasa est suicidaire, un véritable «Tiya motu bakata » comme diraient les kinois dans leur jargon !
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Les derniers accords conclus avec le Rwanda et l’Ouganda sont secrets comme ceux de LEMERA consacrant la création de l’AFDL en 1996 et ceux de GISENYI négociés par John Numbi en 2007 pour le mixage des miliciens de Nkunda avec les Fardc. La nature secrète de ces accords fait que le peuple congolais dans son ensemble ne sait pas apprécier leur opportunité. Tous ses accords secrets se ressemblent en ceci qu’ils n’ont jamais porté bonheur au Congo. C’est avec la même appréhension négative que les congolais jugent les accords militaires dernièrement signés par Kinshasa avec le Rwanda et l’Ouganda au moment où l’on s’y attendait le moins. N’y avait-il pas un autre choix !
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Notez que les derniers accords militaires ont été conclus par John Numbi, le même mousquetaire de Kinshasa qui avait négocié le fameux mixage, de triste mémoire. Ce mixage a permis l’infiltration des officiers rwandais dans l’armée congolaise. Ce qu’on appellera armée congolaise devant mener des opérations conjointes avec l’armée rwandaise ce ne sera jamais, l’armée de She Kasikila, Prosper Nabyola, de Mbudza Mabe, etc. mais celle commandée par les infiltrés rwandais du mixage.
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Treize ans d’occupation de l’Est du Congo démontrent que le Rwanda et l’Ouganda n’ont jamais quitté le Congo. Leur présence continue au Congo sous forme des milices, rebellions, cadres et haut fonctionnaires de l’Etat Congolais. La facture que le Congo a payé pour cette occupation rwando-ougandaise s’élève à 6 millions des morts congolais. Au moment où plus d’un pensait que le gouvernement de Kinshasa travaillait pour mettre fin à cet état de siège, on est surpris par la signature des accords qui permettent le retour au Congo des tueurs de six millions des congolais avec, par surcroit, une mission de pacification. Il n’y a pas meilleure façon de se moquer de congolais et de sa classe politique.
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Si Kinshasa était attentif au cri du peuple congolais, il aurait suivi les appels des Evêques catholiques, de la société civile ainsi que ceux des plusieurs ONG locales qui unanimement ont récemment fait appel aux troupes européennes pour la sécurisation de l’Est du Pays. Cet appel pathétique aux européens qui ne sont pas non plus idoines dans la crise congolaise voulait au moins dire que les congolais n’avaient pas confiance aux anglo-saxons et à leurs alliés rwandais et ougandais pour pacifier l’Est du Congo. Et si Kinshasa avait pris soin de demander l’avis du peuple, sa réponse aurait été un non catégorique.
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Sur la scène internationale, Kinshasa venait d’écrire à l’ONU demandant qu’il n’y ait pas des casques bleus indiens et pakistanais (deux anciennes colonies anglaises) parmi les 3000 casques bleus supplémentaires attendus au Congo. La raison de ce refus était que les casques bleus et pakistanais s’étaient montrés complices des rwandais, des ougandais et des chefs rebelles dans tous les maux qu’ils infligent aux congolais. On ne peut comprendre pourquoi quelques jours après, Kinshasa a fait un virage de 180 degrés pour signer des accords militaires avec deux pays qui n’ont jamais tenu aucune de leurs promesses de paix à l’Est du Congo. Quelle amnésie politique ?
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Sur le plan interne, la milice de Nkunda vient d’endeuiller le Territoire de Rutshuru par des massacres des populations que les évêques catholiques congolais n’ont pas manqué de qualifier de « génocide silencieux ». En plus, Nkunda vient d’afficher ses ambitions politiques réelles qui consistent à renverser l’ordre constitutionnel du Congo, mettant ainsi fin, une fois de plus, à son sempiternel alibi de FDLR. Des journalistes internationaux venaient de confirmer avec preuves à l’appui, la présence des troupes rwandaises et des nouveaux recrus rwandais aux côtés de Nkunda[1]. Bien avant ces journalistes étrangers, les Fardc loyalistes au front au Nord-Kivu avaient déjà montré à la presse nationale et internationale les preuves matérielles de la présence de l’armée rwandaise aux côtés de Nkunda, non pour anéantir les FDLR mais pour tuer les Fardc et les populations civiles congolaises.
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Après tous les faits ci-haut cités, on ne peut pas comprendre que Kinshasa ait signé des accords militaires autour du même vieil alibi des FDLR. Nkunda qui vient de démontrer une fois de plus qu’il ne se battait pas pour déloger les FDLR mais pour prendre le pouvoir à Kinshasa n’est même pas l’objet de ces accords. Après tous ces massacres qu’il vient de commettre, les accords militaires signés n’envisagent même pas l’arrestation de Nkunda mais toujours des attaques à la même nébuleuse des FDLR. Il est difficile de s’imaginer ce qui va se passer sur terrain où l’on aura plusieurs armées supposées ennemies: Les Fardc, l’armée rwandaise, le CNDP aile Nkunda, le CNDP aile Ntaganda, le FDLR, le Pareco, les Mai-Mai, le TPD de Serufuli, RUD, etc. Notez que les territoires qu’occupent les miliciens de Nkunda sont ceux souvent cités par le Rwanda comme lieu d’où opéreraient les fameux FDLR. Mais depuis l’occupation effective de ces territoires par Nkunda on n’a jamais entendu parler d’une seule escarmouche entre le CNDP et les FDLR. Au contraire on continue d’assister aux massacres des populations congolaises, aux viols des femmes, aux enlèvements des mineurs, etc. D’où la question de savoir comment la coalition rwando-congolaise entend opérer dans un territoire où il y a plus de quatre groupes armés, que Nkunda contrôle sachant que ce dernier est toujours en guerre contre les Fardc ? Sur qui les Fardc vont-il pointer leur fusil ? L’improbabilité d’une action militaire rwando-congolaise en territoire contrôlé par Nkunda pousse certains analystes à dire la cible de cette coalition est plutôt le Sud-Kivu qui est en sursis jusqu’à nos jours.
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La même incompréhension concerne aussi l’accord militaire de Kinshasa avec l’armée ougandaise. La société civile de Mahagi a déjà sonné l’alarme de la présence des militaires ougandais à Kasenyi, Province Orientale, non pour y pourchasser des quelconques rebelles de la LRA de Joseph KONY mais pour protéger les ouvriers des compagnies pétrolières faisant des prospections du Pétrole dans le Lac Mobutu[2].
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Plusieurs rapports attestent donc les militaires rwandais et ougandais sont déjà au Congo pour y saboter l’autorité de l’Etat Congolais. Sur ce, on peut dire qu’en signant des accords militaires qui permettent au Rwanda et à l’Ouganda d’entrer dans un pays où ils mènent déjà des actions terroristes, Kinshasa a légitimé aux yeux du monde l’agression du Congo par le Rwanda et l’Ouganda, crachant ainsi sur six millions des morts congolais. En même temps, Kinshasa accepte son incapacité de sauvegarder l’intégrité territoriale du Congo en se rendant les pieds liés à ses agresseurs. C’est un véritablement retour à la case du départ, entendez par là, la situation du pays en 1996. Comme l’ont chanté les musiciens congolais : Le Jeu est fini ! Match esili! Au moins dans l’entendement de Kinshasa !
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Les congolais qui n’ont jamais été consulté ni informé de ces accords contre-nature sont tout simplement pris en otage par le gouvernement de Kinshasa. Ces accords expliquent ainsi pourquoi Kinshasa s’est toujours montré mou, timide, pendant que son pays est en feu, cassant chaque fois la morale des vaillants militaires congolais toujours prêts à se battre pour l’honneur de leur pays. Le matériel militaire et la solde des Fardc ont toujours été transférés aux miliciens de Nkunda : cas de Mushaki en 2007 et de Rumangabo en 2008. Ceci explique aussi la violence contre tous ceux qui osent pointer du doigt cette complicité de Kinshasa avec l’ennemi. D’après Jean-François Bayart et Cie[3], l’usage de la violence contre les civils est propre aux « états criminels »où les dirigeants conscients de la mise des ressources de leurs pays au seul profit des institutions financières internationales, cherchent à se maintenir au pouvoir par la terreur.
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La signature des accords avec Kigali et Kampala contre la volonté du peuple congolais est un exemple que Kinshasa a choisi le cas de la mafia internationale au lieu de privilégier l’intérêt du peuple congolais. Le premier signe de ce choix périlleux est l’offensive militaire des Fardc contre les Mai-Mai dans les territoires de Beni-Lubero. Très tôt matin de ce Lundi 12 janvier 2009, l’alliance entre les Fardc et les résistants Mai-Mai a volé en éclats. Rappelez-vous que quand les Fardc avaient ouvert le front à Rutshuru contre le CNDP de Nkunda, les Mai-Mai étaient leurs alliés infatigables qui se battaient pour leur pays bien qu’ils n’étaient pas sur les listes de paie. Plusieurs localités du Nord-Kivu sont sous le contrôle des Mai-Mai jusqu’aujourd’hui qui avaient pris la relève des Fardc envoyés au front de Rutshuru. Pendant que les Mai-Mai s’attendaient à leur intégration dans l’armée nationale comme récompense à leur bravoure, voilà que depuis ce matin, ils sont devenus les ennemis des Fardc. Le Commandant Jérémie des Mai-Mai de la ville de Beni a été abattu en pleine ville par des Fardc. Cette rupture d’alliance Fardc-Mai-Mai est signe que les Rwandais et les Ougandais sont de retour et exigent aux Fardc de tuer leurs alliés Mai-Mai qui ont toujours fait peur aux occupants. En effet, tant qu’il y aura une résistance locale, le projet d’occupation ne sera jamais facile même s’il a le soutien de Londres et de Washington. Les massacres de Kiwanja et de Kirwa (Rubare) où des jeunes garçons sont continuellement égorgés visent à réduire toute possibilité de résistance locale dans la région contrôlée par Nkunda. Il en est de même des massacres des congolais à Dungu et à Faradje dans la Province Orientale qu’on a attribué aux rebelles ougandais de LRA. Comme au Nord-Kivu, toutes les victimes sont des civils congolais. Aucun rebelle de LRA comme aucun soldat ougandais, soudanais et congolais n’a été victime pour dire que la seule cible est le peuple congolais. Des sources proches de l’Opposition ougandaise affirment que depuis plusieurs années, Museveni utilise Joseph Kony pour expliquer son budget militaire extravagant, et que les deux hommes sont devenus des amis politiques. Ainsi Joseph KONY serait pour Yoweri Museveni ce que Laurent Nkunda est pour Paul Kagame. Les massacres des congolais en province orientale seraient ainsi selon toute probabilité commandités et exécutés pour les mêmes mobiles que les populations du Nord-Kivu, à savoir le dépeuplement de la région en vue de son occupation éventuelle et de l’exploitation de ses ressources minières.
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L’entrée officielle des troupes rwandaises et ougandaises sur le sol congolais est ainsi porteuse d’une mauvaise nouvelle, notamment la poursuite du génocide des congolais déjà en cours au Nord-Kivu. Les civils congolais seront comme c’est le cas au Nord-Kivu la cible privilégiée des troupes que l’on présentera à l’opinion internationale comme des FDLR, LRA, Mai-Mai, etc. Les Fardc que l’on alignera aux côtés des troupes rwandaises et ougandaises seront, non des loyalistes congolais dont la plupart on péri au front du Nord-Kivu, mais ceux issus de la rébellion pro-rwandaise RCD-Goma et du fameux Mixage. Le Rwanda et l’Ouganda n’ont jamais été aussi prêts de l’accomplissement de leur rêve de coloniser l’Est du Congo grâce à la complicité de Kinshasa. Au cas où les accords de Nairobi ou autres obstruaient cette phase finale de l’occupation légitimée par Kinshasa, des affrontements entre l’aile Nkunda et l’aile Ntaganda du CNDP, accompliraient la mission. Tout donner à penser que tous les dispositifs ont été pris pour assener un coup fatal au Congo.
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Cette attitude du gouvernement congolais s’appelle « Haute trahison ». Et la Constitution congolaise est claire là-dessus. Tout celui qui se rend coupable de trahison se démet ipso facto de ses fonctions. Aux justiciers congolais, s’ils existent encore, de s’occuper de ce dossier qui couvre de honte non seulement la classe politique congolaise mais aussi le peuple congolais. Un adage ne dit-il pas que le peuple n’a que les dirigeants qu’il mérite.
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Aux chercheurs et analystes d’approfondir le dossier pour en comprendre la quintessence. Pourquoi tout un gouvernement se refuse-t-il toujours de profiter des éléments à son avantage pour avancer la cause du Congo ? Où est l’opposition politique ? Le Parlement ? Le Sénat! La Justice congolaise que l’on dit indépendante? Comme aucun membre du gouvernement n’a démissionné de son poste en signe d’indignation ou de protestation, pouvons-nous conclure que tous les membres du gouvernement Gizenga I, Gizenga II, et Muzito I, sont complices ? A l’allure où les événements se précipitent à l’Est du Congo, le Congo semble petit à petit s’engouffrer dans une zone de turbulence beaucoup politique beaucoup plus dangereuse que la celle de la crise économique. En effet, tout indique que le Congo est menacé de partout comme Etat à la suite du clientélisme véreux de ses dirigeants actuels. La balle est donc dans le camp des candidats politiques de demain dont l’heure a sonné pour sauver le Congo du naufrage!
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Beni-Lubero Online
[1] Cfr. New York Times du 13 Décembre 2008, Article de Lydia Polgreen : Militias in Congo tied to Gouvernement and Rwanda.
[2] https://benilubero.com/index.php?option=com_content&task=view&id=1076&Itemid=2
[3] Jean-Francois Bayart, Stephen Ellis et Beatrice Hibou, La criminalisation de l’Etat en Afrique, Oxford, James Currey, 1999.





