La victoire des Fardc dans la traque des FDLR au Nord-Kivu annoncée par la Radio France Internationale (RFI) le 14 janvier 2016 (http://www.rfi.fr/afrique/20160114-rdc-traque-rebelles-fdlr-porte-fruits-selon-armee) a surpris les habitants du Nord-Kivu qui n’ont pas entendu parler d’une traque et encore moins d’une quelconque victoire des Fardc sur les FDLR. Pourquoi la radio onusienne OKAPI n’en a-t-elle pas parlé ?
Selon RFI, le nombre des FDLR serait passé de 1200 (selon l’inventaire des Fardc de 2015), à 150 dont les les généraux Sylvestre Mudacumura et Byiringiro et leurs escortes. Où sont donc passés les 1050 FDLR?
Tout habitant du Nord-Kivu voudrait que cette nouvelle fut vraie! Mais vu que personne au Nord-Kivu n’a entendu parler d’une quelconque traque récente des FDLR par les FARDC, ou d’un rapatriement des FDLR au Rwanda, d’aucuns se demandent s’il n’y a pas eu plutôt une intégration des FDLR au sein des FARDC.
Ce qui est à la une au Sud de Lubero c’est que les FDLR sont accusés du génocide de Miriki et des kidnappings des habitants de Kirumba au Sud du Territoire de Lubero.
Aussi, la Radio Okapi a diffusé le déploiement des Fardc à Ikobo et dans d’autres localités du Territoire de Walikale. Si l’on en croit la Radio Okapi, il n’y avait pas eu combat lors de ce déploiement. Comme toujours, les FDLR avaient quitté la localité avant l’arrivée des Fardc. Ce scenario est connu. En effet, on peut dire sans se tromper que, depuis la création du CNDP en 2007 ( ?), ’il n’y a jamais eu de combat rangé entre Fardc et FDLR au Nord-Kivu.
Chaque fois que les FDLR sont au centre du débat et que les populations locales exigent leur démantèlement, comme c’est le cas aujourd’hui après le génocide de Miriki du 7 janvier dernier, le gouvernement congolais fait tout pour les démanteler sans témoins (et sans la Monusco) afin de s’attribuer des victoires militaires écrasantes que des personnes indépendantes ne peuvent ni confirmer ni infirmer. Le cas que rapporte RFI en donne un exemple éloquent. Comme on peut s’y attendre, ces victoires militaires écrasantes ne portent pas long feu. Les FDLR écrasés renaissent aussitôt de leurs cendres pour continuer leur sale besogne, à savoir, les massacres des congolais, les pillages des ressources du sol et du sous-sol congolais.
Entre 2007 et 2009, chaque fois que la coalition FARDC/MONUC voulait exécuter un projet DDRRR relatif au rapatriement volontaire ou forcé des FDLR, la rébellion pro-rwandaise du CNDP ouvrait un front contre les FARDC pour que le projet DDRRR soit abandonné.
En 2012, Lambert Mende, Ministre de la Communication du gouvernement congolais, avait reconnu que le CNDP et les FDLR étaient des alliés et des amis :
« Nous détenons la preuve que Ntaganda et une poignée des mutins sont, au moment où nous parlons, confinés dans un réduit entre les collines de Runyonyi et de Mbuzi ensemble avec Makenga qui ne dirige donc pas une prétendue rébellion distincte de la mutinerie initiée par son chef de file Ntaganda. S’y trouvent aussi, les officiers Ndahuye, Zimulenda, Sadam, un chef coutumier prénommé Erasto et le colonel Mandevu, un des principaux chefs des FDLR dont Ntaganda et consorts ont toujours pris prétexte de la présence en terre congolaise pour justifier leurs exactions.»[1]
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Quand Kinshasa et la MONUSCO se mirent finalement d’accord pour le rapatriement des FDLR, ils inventèrent la formule des camps de transit où les FDLR candidats séjourneraient pendant six à 12 mois avant leur retour au Rwanda. Pour qu’un FDLR de Kalehe au Sud-Kivu retourne au Rwanda qui est juste en face de Kalehe, il fallait qu’il séjourne d’abord pendant un an dans un camp de transit de Kanyabayonga ou de Kisangani. Ce long détour pour retourner au Rwanda fut soupçonné avec raison comme une autre stratégie de déploiement des FDLR dans les zones préparées pour accueillir les occupants Hutu du Rwanda. Certaines localités (telle Mavivi) refusèrent catégoriquement l’installation des camps de transit des FDLR chez eux. Aujourd’hui on constate que, plus d’un an après, les FDLR candidats au retour sont toujours dans les camps de transit sont devenus des camps permanents. Certains de génocidaires FDLR qui ont endueillé Miriki seraient venus du camp de transit de Miriki au Sud de Lubero. Aujourd’hui, les rescapés du génocide de Miriki demandent que le camp de transit de Miriki soit déménagé ou que ses occupants retournent au Rwanda la durée du transit ayant expirée il y a longtemps !
Ce qui est surprenant c’est le fait que Kinshasa s’accommode de ces camps de transit. Les locataires de ces camps de transit ne s’en plaignent pas non plus. Ils ne donnent pas des signes d’être pressés de retourner enfin chez eux!
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Le 2 janvier 2015 expirait l’ultimatum conjoint entre la Monusco et les Fardc pour démanteler et rapatrier par force les FDLR du Nord-Kivu par la force comme ce fut le cas pour le M23 en novembre 2013. A une semaine de l’entrée en vigueur de cet ultimatum, Kinshasa avait dit ne plus avoir besoin de l’aide de la Monusco et de qui que ce soit car son armée en était capable toute seule. Le même communiqué de Kinshasa minimisait aussi le nombre des FDLR errant dans les forêts et savanes du Kivu en le ramenant à quelques centaines. Aujourd’hui, un an après, les mêmes FDLR continuent de tuer des centaines des paisibles citoyens au vu et au su de Kinshasa et d’une armée qui assiste sans agir au génocide des Nande par les FDLR.
Dans le contexte du génocide des Nande de Miriki dans la nuit du 6 au 7 janvier 2016, le message d’autosatisfaction de RFI dans la traque des FDLR au Nord-Kivu est à même de faire rire les vaches du Nord-Kivu. D’ailleurs un paysan interrogé par RFI à IKOBO a dit que les civils ne peuvent pas aller dans leurs champs car les FDLR ne sont pas du loin du village. S’il y avait une offensive secrète à IKOBO, pourquoi avait-elle été arrêtée en si bon chemin en laissant les FDLR non loin du village, dans les champs des paysans ?
Historiquement, on peut constater que les FDLR ont toujours reçu un traitement de prince par Kinshasa.
Les rebelles congolais ont toujours été traités beaucoup plus cruellement que les rwandais FDLR et les ougandais ADF/NALU. Rappelez-vous des combattants du Bundu dia Kongo, ENYELE, Morgan, des plusieurs factions Mai-Mai qui étaient écrasés militairement, sans aucune pitié, sans ultimatum, sans possibilité de signer un accord ou d’entrer en dialogue.
Pendant qu’au Nord-Kivu on s’attendait à une grande offensive militaire contre les FDLR après le génocide de Miriki, le satisfecit des Fardc dans la traque des FDLR semble être une fuite en avant du gouvernement congolais qui voudrait écarter toute idée de coalition FARDC/MONUSCO dans une nouvelle traque des FDLR.
Il en est de même sur le front ADF/NALU de BENI. On a l’impression que le gouvernement congolais voudrait obtenir le départ de la Monusco avant que les manifestants du Front Citoyen 2016 contre la prolongation du pouvoir de Joseph Kabila ne descendent dans la rue.
Au front contre l’ADF/NALU le général Jean Baillaud de la Monusco s’est déjà fait célèbre en Territoire de BENI pour avoir déclaré publiquement que les présumés ADF/NALU sont déjà infiltrés dans les rangs des Fardc. Le Général Jean Baillaud de la MONUSCO avait fait cette déclaration sur Radio Okapi au lendemain du jour où la localité d’Eringeti était attaquée et occupée momentanément par les présumés ADF/NALU : « L’ADF opère complètement en uniforme FARDC, ou complètement en civil. Il se mêle aussi à la population et peut même éventuellement s’imbriquer dans des opérations conduites par les forces congolaises.»[2]
A l’allure où se déroulent les événements au Kivu-Ituri avec des menaces des leaders d’opinion opposés au glissement du pouvoir de Kinshasa et des alertes sur un génocide imminent qui embraserait toute la région à partir de Goma, les populations civiles devraient demander, par la voie de leurs leaders et de leurs associations, la prorogation du mandat de la Monusco et la collaboration Monusco/Fardc dans la traque des FDLR/ADF/NALU et la sécurisation des personnes et de leurs biens tout au long de 2016, une année qui s’annonce houleuse en R.D.C. La population civile du Nord-Kivu ne devrait pas céder à la diabolisation de la Monusco qui se preparerait dans les officines des génocidaires. Quelle que soit ce que les congolais lui reproche, la Monusco reste le seul oeil international présent au Kivu-Ituri capable de nous aider à tirer la sonnette d'alarme si le plan du génocide annoncé se matérialisait. Qu'on se rappelle des révélations du Général Jean Baillaud de la Monusco sur les infiltrés ADF/NALU au sein des Fardc…
Lire aussi : https://benilubero.com/tutsi-et-hutu-saccordent-pour-occuper-le-kivu-ituri/
©Beni-Lubero Online
[1] Le Journal LE PHARE, Lundi 21 mai 2012.
[2] Site internet de la Radio Okapi, le 5 décembre 2015.