





La cacophonie au sommet de l’Etat congolais à propos de l’arrestation-surprise de Nkunda démontre à suffisance combien le pouvoir en R.D. Congo n’est pas entre les mains de ceux qui prétendent le détenir. La majorité de ceux qu’on appelle « leaders politiques congolais», comme l’homme de la rue, avouent avoir appris la nouvelle par les radios périphériques internationales. Au lieu de se taire, ils ont par imprudence étalé sur la place publique leur sous-information de la vie politique du pays qu’ils prétendent diriger ainsi que le dysfonctionnement de l’appareil étatique congolais. Le peuple congolais a pris bonne note de cette méprise qui a renforcé l’idée de l’urgence de la refondation de l’Etat congolais en redonnant le pouvoir au peuple et à ses représentants. Les élus de 2006 ont échoué lamentablement. Pour s’en convaincre, il suffit d’observer la gestion du conflit congolais.
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La mise hors d’état de nuire de Nkunda démontre si bien qui sont les tireurs des ficelles dans le conflit congolais. Paul Kagame et Joseph Kabila viennent de démontrer de la manière la plus spectaculaire qu’ils détiennent la clef de la paix au Congo. Paul Kagame et Joseph Kabila ont démontré qu’un accord hors micro, en l’absence des « perdiemistes » du programme Amani, des émissaires spéciaux de X et Y et des facilitateurs internationaux, peut changer le cours d’une crise qui vient de durer une décennie avec son lot de six millions des morts congolais. Là où l’ONU traîne les pieds depuis dix ans avec 17 000 casques bleus et un budget annuel de 1, 3 milliards de dollars américains, l’armée du petit Rwanda vient de rétablir l’ordre en un jour sans faire appel à une aide extérieure.
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Si les déplacés de guerre du Nord-Kivu peuvent pousser un ouf de soulagement à la suite de cette surprise plutôt agréable, il ne faudrait pas pour autant que les congolais pensent que leur calvaire est fini. Le fait que la lettre de l’accord soit tenue secrète et qu’il n’y ait jusqu’à présent aucune mesure d’encadrement des populations congolaises, des déplacés, et des retournés pendant les opérations en cours, appelle les congolais à plus de travail et de vigilance.
Les contradictions de cet accord secret se manifestent déjà comme une alerte qu’il peut y avoir anguille sous roche. Au début, le gouvernement congolais parlait de l’entrée au Congo des officiers de renseignement militaire rwandais pour superviser les opérations militaires contre les FDLR. Mais la réalité est autre. Aujourd’hui, les congolais assistent à l’arrivée d’une marée humaine des militaires avec femmes et bétail au point que l’on se demande de quelle sorte d’opération militaire il s’agit. Aussi les raisons pour garder secret l’accord de Goma du 16 janvier 2009 ne sont pas convaincants à moins que le gouvernement congolais ne soit fait que des traîtres avec deux seuls hommes justes et intègres, à savoir, Joseph Kabila et John Numbi.
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C’est ainsi qu’au lieu de se battre pour trouver sa place au soleil de l’après Nkunda, les citoyens congolais et leurs leaders politiques, devraient dans tous leurs états majors politiques, économiques, religieux, socioculturels, etc. chercher comment tirer un profit durable de l’aveu du Rwanda dans son soutien à Nkunda. Il serait en effet triste de voir les congolais baisser la garde et danser le «o dari dari» à Paul Kagame, le libérateur, etc. Tout donne à penser que l’arrestation de Nkunda n’est qu’une opération de charme signée Paul Kagame pour plaire à certains pays occidentaux qui, depuis les massacres perpétrés par son poulain Nkunda à Kiwanja et ailleurs au Nord-Kivu, commencent de lui retirer leur confiance. D’où la question de savoir si l’arrestation de Nkunda peut suffire pour sauver Paul Kagame. Notre réponse est que tout dépendra de l’attitude du gouvernement congolais et du peuple congolais qui devront choisir entre la paix des esclaves ou la paix conquise et méritée.
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Nous proposons ci-dessous une série d’articles en anglais où les auteurs estiment que Nkunda a été arrêté pour limiter les dégâts et le sabotage de l’image de bonne gouvernance attribuée à Paul Kagame dans les milieux économiques actifs dans la guerre à l’Est du Congo. Nkunda servirait ainsi comme mouton sacrificiel sur l’autel du capitalisme néolibéral et son sang laverait Paul Kagame de ses crimes commis au Congo depuis 1996. Paul Kagame avait besoin d’un animal expiatoire pour ses fautes pour qu’il soit présentable à Obama par ses anciens amis de l’administration Clinton qui, malheureusement pour les congolais, occupent des postes influents dans l’administration Obama. L’effet Obama dont l’avènement à la maison blanche fait peur aux lobbyistes et groupes maffieux internationaux sans foi ni loi peut être bénéfique au Congo si et seulement si le gouvernement congolais sortait de sa léthargie pour appliquer une diplomatie active. Le fait que le gouvernement congolais laisse le Rwanda prendre toutes les initiatives de la pacification du Kivu n’augure pas des lendemains meilleurs pour le Congo dont l’avenir risque d’être suspendu pour longtemps au bon vouloir du Rwanda. Ainsi l’arrestation de Nkunda, bien qu’elle détende pour l’instant le climat au front du Nord-Kivu, peut ne pas faire long feu si les congolais et leurs gouvernants se complaisent à dormir sur leurs lauriers.
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L’histoire récente de la région des Grands Lacs démontre que ce n’est pas la première fois que le Rwanda agit seul dans le dossier des réfugiés HUTU au Congo en lieu et place d’une force multilatérale pour intervenir dans le conflit congolais. La première intervention unilatérale du Rwanda au Congo avait eu lieu en novembre 1996 quand l’ONU voulait mettre sur pied une force internationale pour démanteler les camps des refugiés Hutu au Kivu afin de les rapatrier Rwanda. Le Rwanda avait refusé la formation de cette force internationale avec l’appui des USA, sous prétexte que certains pays de cette force (la France en particulier) favoriseraient le retour des Hutu au pouvoir à Kigali. L’armée du Rwanda entra au Congo avec un mandat de l’ONU, déclara deux jours après sa mission bien accomplie mais n’a jamais plus quitté l’Est du Congo. Profitant de l’amnésie ou du clientélisme des gouvernants congolais, le même Rwanda a réussit par après à convaincre le monde, y compris l’ONU, que sa mission de novembre 1996 qu’il avait déclaré « mission accomplie » n’avait pas été accomplie. L’ONU pour sa part qui connait mieux que quiconque la fausseté de l’alibi du Rwanda entretient depuis dix ans ce mensonge à coups des milliards des dollars américains. La même chose peut se répéter aujourd’hui concernant les FDLR. On peut dire sans peur de se tromper que les Hutu constituent l’alibi majeur de l’occupation du Kivu. Les congolais savent que depuis 1996, le Kivu est sous occupation rwandaise. Pendant ce temps, l’armée rwandaise et ses rebellions créées au Congo n’ont jamais combattu les prétendus FDLR mais plutôt les Fardc loyalistes. L’arrestation de Nkunda et l’intégration sans préparation des miliciens de Nkunda dans l’armée congolaise permet ainsi de lancer une offensive militaire dans une région déjà conquise depuis longtemps par le Rwanda. Les congolais sont curieux de voir quelles seront les vrais cibles de cette offensive militaire. Selon toute probabilité, le Rwanda profitera des opérations en cours pour orchestrer des colonies de peuplement rwandais au Kivu avant de déclarer que la mission contre les FDLR est accomplie. Le fait que seuls les leaders Hutu du Nord-Kivu avaient été conviés au sommet secret de Goma poussent les observateurs à dire qu’un deal avait été conclu entre les Tutsi et certains politiciens Hutu du Nord-Kivu pour camoufler les colonies de peuplement. Le rapprochement Hutu-Tutsi à Kigali au mois de septembre dernier vise à perpétuer l’influence rwandaise dans cette partie du Congo où dans les prochains mois un referendum sur l’autodétermination des rwandais-congolais peut êre organisé. Notez que ce projet de referendum circule depuis quelques années dans les couloirs de l’ONU. Ce qu’on appelle aujourd’hui "Plan Sarkozy" ne dit pas autre chose que ce projet de statut special des Tutsi au Congo.
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Sur la place publique, le HCR pourra venir au secours du Rwanda pour parler de la réinstallation des refugiés congolais qui étaient au Rwanda, au Burundi, en Ouganda et en Tanzanie. C’est ainsi que l’arrestation de Nkunda sert à dissimuler aux yeux des congolais et aux yeux du monde la réalisation du plan Tutsi au Kivu voire en Province Orientale avec l’aide du président Hima de l’Ouganda. C’est ainsi que les congolais ont toutes les raisons du monde de ne pas céder au triomphalisme de Kinshasa qui voudrait détourner l’attention des congolais en demandant le procès de Nkunda à Kinshasa. Les congolais ont besoin d’une paix durable et pour tous sur toute l’étendue du territoire national. Le reste est secondaire pour l’instant.
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Tous les groupes ethniques ou armés qui s’opposent à l’hégémonie du Rwanda et de l’Ouganda dans cette partie orientale du Congo doivent être vigilants car ils pourraient être les cibles des opérations en cours qui ont plusieurs objectifs : sauver la face de Kagame dans le monde des affaires, éliminer les opposants à l’occupation rwandaise du Kivu, permettre des colonies de peuplement rwandais dans les zones abandonnées par les déplacés congolais, laisser mourir les opposants congolais dans les camps pour déplacés ou des refugiés, etc.
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A la lumière de la réflexion précédente, le peuple congolais ainsi que ses dirigeants politiques devraient profiter de l’effet Obama pour plaider la cause du Congo, un pays occupé par la maffia internationale du capitalisme néolibéral. Il serait dommage de voir le gouvernement s’approprier l’éphémère cessation d’hostilités sur le front de l’Est pour sa propre survie politique. Demander l’extradition de Nkunda que le Rwanda a fait tomber sans le vouloir comme une patate chaude, n’est pas suffisant. L’important pour le Congo c’est de recouvrer l’intégrité territoriale du pays et obtenir de la communauté des nations l’application de la loi internationale au Congo.
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Une telle plaidoirie en faveur du Congo doit être l’affaire de tous. Les évêques catholiques qui ont fait récemment le tour du monde pour plaider la cause du Congo devraient profiter de cet effet-surprise d’Obama pour refaire un deuxième tour. Pas un sans deux. Les ONG des droits humains qui ont toujours demandé à cor et à cri l’arrestation de Nkunda et de Bosco Ntaganda, devraient redoubler d’effort en cette période charnière favorable. La société civile congolaise devrait diffuser largement tous ses carnets de recensement des morts victimes de l’occupation rwandaise et de l’impunité au Congo. C’est maintenant l’heure des marches de protestation et de pétitions pour demander que la loi internationale soit aussi appliquée dans toute sa force au Congo et pour que ceux qui ont commis des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité répondent de leurs actes devant la justice. C’est maintenant le temps favorable pour tous les congolais de s’unir pour défendre les intérêts du peuple congolais. Laisser passer cette occasion favorable serait accepter la poursuite de la domination rwandaise et des capitalistes néolibéraux qui font un «war-business » juteux au Congo.
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Lectures recommandées sur les non-dits de la guerre du Kivu:
Vincent Machozi, a.a.
Boston, MA (USA)
Beni-Lubero Online





