





Dans son éditorial de Pâques 2006, BLO avait salué le courage des congolais qui refusaient de mourir sur l’autel des prédateurs congolais et étrangers. Ils avaient en effet démontré qu’ils voulaient le changement de la R.D. Congo par leur participation massive au processus de démocratisation du pays. Leur espoir était qu’une fois la transition terminée, le pays se remettrait progressivement de son marasme socio-économique actuel. Le seul problème est que le peuple congolais n’avait pas demandé à qui de droit comment ce changement tant attendu se concrétiserait dans le quotidien de leur vie.
En effet, la majorité du peuple congolais y compris ses dirigeants avait mis sa confiance dans les pays de la communauté internationale qui parrainaient le processus de démocratisation de la R.D. Congo. La où les dirigeants congolais n’arrivaient pas à convaincre certaines forces vives de la nation, on a vu les émissaires de cette communauté internationale offrir leurs bons offices pour convaincre du caractère de non- retour du processus.
Mais que constate-t-on quatre mois après la fin du processus ? Le retour à la case du départ, c’est-à-dire la belligérance entre les élus, la gloutonnerie des parrains du processus qui exigent leur meilleur part avant que le peuple longtemps meurtri ne soit servi, le gangstérisme de la contrebande dans le secteur minier et douanier, la difficulté pour les élus d’adopter un mode de vie proche de la réalité du pays, le très peu d’impact du gouvernement sur le quotidien des populations, le déficit notoire dans l’administration du territoire national, l’incapacité du gouvernement à faire régner un état de droit sur toute l’étendue du territoire national, etc.
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En ce jour de Pâques 2007, les congolais sont comparables aux disciples d’Emmaüs qui après l’apparent échec de la révolution de Jésus, le messie qui s’est laissé tuer par les occupants romains en complicité avec le pouvoir religieux juif, avaient décidé de rentrer dans leur village pour se remettre de leur désespoir. D’autres disciples de Jésus avaient choisi la fuite et la cachette par peur de subir le même sort que leur maître. Bien avant cette mort du messie, certains membres du mouvement révolutionnaire armé des « zélotes » l’avaient suivi en espérant trouver en lui un leader charismatique qu’ils appuieraient avec leurs armes au moment venu pour chasser l’occupant romain. Mais plusieurs de ceux-ci abandonnèrent Jésus quand il commença à prêcher l’amour de l’ennemi, la non-violence contre un occupant aussi discipliné et bien armé qu’était l’empire romain.
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Pour ne donner qu’un exemple, le jour de son procès ultime, Jésus excella de zèle et d’amour en guérissant l’oreille du soldat romain coupée par l’épée de Pierre. Judas, le plus brave de douze qui croyait mieux que quiconque en la puissance divine de son maître, se résolut de gagner quelques sous en vendant Jésus aux autorités romaines étant sûr que Jésus se tirerait d’affaire par sa force divine. En apprenant sa mort, Judas contrarié d’avoir livré son maître, décida de mettre fin à sa vie par pendaison. L’équipe de douze proches de Jésus fut ainsi démantelée par la peur et le désespoir au moment où une victoire sur l’humanité pécheresse était entrain de s’accomplir par la mise à mort de Jésus, l’innocent, l’agneau sans tache, résuscité par Dieu au matin de Pâques. La foi en la résurrection de Jésus est ainsi une grande césure dans l’histoire de l’humanité en ceci qu’elle nous apprend que le juste même s’il meurt vivra pour l’éternité.
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Le peuple Congolais impatient du changement tant attendu, peut sans le savoir être tout près de sa victoire. Comme dit un proverbe africain, « la nuit est plus sombre à l’approche de l’aurore ». Ainsi, les nouvelles des massacres qui lui arrivent de Masisi, de Mbanza-Ngungu, de Luozi, d’Inkisi, de Katuguru, de Kitchanga, de Jomba, de Kwandroma, Aliwara, de Kahemba, d’Aru, de Gombe, de la Miba, etc., peuvent être les derniers soubresauts d’un mal qui était tellement profond et qui ne peut être guéri que par une thérapeutique de choc. En effet, après dix ans de guerre, il est possible que plusieurs congolais soient plus habiles à faire la guerre qu’à bâtir la paix. Un adage ne dit-il pas qu’il est plus facile de démolir que de construire!
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Mais la question qu’il convient de se poser est celle de savoir si tous les congolais sont prêts à reconstruire ensemble ce que la guerre a détruit pendant dix ans de guerre. Le problème actuel en R.D. Congo semble être l’indolence de plusieurs face à une tache immense de reconstruction du pays. Devant un pays aussi délabré comme la R.D. Congo, plusieurs ne savent pas par où commencer. Le danger est d’abandonner cette responsabilité à d’autres, aux élus, et à la communauté internationale. Certains élus comme certains administrés rêveraient encore de la solution qui viendrait de l’étranger, de l’Occident, du Président de la République, du Premier Ministre, etc.
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En démocratie, la participation de tous à la gestion de la res publica est permanente. Ainsi les élus doivent être constamment sous contrôle du souverain primaire. A ce stade du processus de démocratisation de la R.D. Congo, tous les congolais doivent chercher ensemble les voies et moyens pour transformer les acquis des élections en paix durable et en prospérité socio-économique. En ce sens, il est très dommage que le processus se soit arrêté avant les élections locales pour doter la base de son instrument d’organisation et de mobilisation politique. En attendant ces élections locales renvoyées à l’an 2008, le peuple ne peut attendre de jouer son rôle de régulateur de l’action du gouvernement par les structures existantes, notamment les ONG de développement, la société civile, les mutualités villageoises, les chefs coutumiers, etc. La façon de faire entendre sa voix, c’est de responsabiliser et de contrôler l’action de l’autorité immédiate sur qui on a une emprise réelle. C’est en effet le responsable local qui doit se référer à sa hiérarchie immédiate au-dessus de lui pour trouver satisfaction aux problèmes de sa base.
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La pratique actuelle qui réduit la gestion du pays au Président est de nature à occulter les responsabilités intermédiaires. En effet, si la base commence par expliquer sa souffrance par l’incapacité notoire de Joseph Kabila ou d’Antoine Gizenga, il est normal que le responsable local entonne le même chant pour couvrir sa propre incapacité. Ainsi, pour éviter ces genres d’échappatoire, les habitants du village devraient demandé de compte à leur Kapita du village, les Kapita au chef du groupement, les chefs du groupement au chef de collectivité, les chefs de collectivité à l’administrateur du territoire, et ainsi de suite jusqu’au Président de la République. Chaque fois qu’il y a incapacité notoire ou mégestion, le souverain primaire devrait utiliser la loi du pays en la matière pour procéder à un remplacement. C’est de la même façon qu’il faudrait sanctionner les élus qui se taisent devant les abus des droits humains dans leurs circonscriptions électorales. Le souverain primaire à chaque niveau de l’administration doit prendre acte de tout mutisme du responsable immédiat. A titre d’exemple, le silence des élus du Nord-Kivu sur la réalité de ce qu’on appelle mixage des troupes de Nkunda avec les Fardc est impardonnable car il en va de la sécurité de la Province mais aussi de tout le pays. Il en est de même du silence des responsables locaux et régionaux de Kahemba sur l’occupation angolaise. Le rôle des responsables immédiats est d’aider la communauté locale et nationale à savoir à quel niveau de la chaîne des responsabilités se trouve le maillon faible.
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La renaissance de la R.D. Congo dépend ainsi de la réappropriation par le peuple congolais de son avenir. Cette réappropriation est bien attendue une lutte contre plus malin que soi. La liberté ne se donne pas, elle se gagne ! Parmi les causes lointaines de deux guerres mondiales, certains analystes trouvent en bonne place le contrôle sans partage des richesses immenses du Congo par certaines puissances européennes. Bien avant ces deux guerres mondiales, en 1884, une conférence des nations réunies à Bruxelles avait déclaré l’espace congolais une zone ouverte au libre échange et au commerce. C’est avec ces puissances internationales intéressées par les ressources naturelles du Congo que les congolais doivent négocier leur avenir. Oublier cette vérité serait de la pure naïveté. Le messie tant attendu au Congo est celui qui remettra des pans entiers du Congo entre les mains des congolais pour qu’enfin ces derniers décident de leur avenir dans le concert des nations.
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Le processus de démocratisation qui vient de s‘achever au Congo à démontrer combien les puissances de ce monde n’ont pas encore changé de méthode d’exploitation du Congo et combien les dirigeants congolais ainsi que leurs administrés n’ont pas encore pris conscience de la lourde responsabilité qui les attend. Le messie congolais ne viendra plus de Galilée, il doit venir d’un coin du Congo, il sera congolais. Les chrétiens savent bien que le messie est celui qui accepte de tout subir pour le salut de tous, celui qui se prive jusqu’au don total de sa vie pour que la multitude ait la vie, et la vie en abondance. Ainsi ne peut être messie au Congo que celui qui sait se sacrifier pour ses frères et sœurs, celui qui travaille activement à l’amélioration des conditions de vie de ses concitoyens, celui qui se sent redevable au souverain primaire, etc.
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Tant que deux congolais en conflit n’arriveront pas à régler leur différend à l’amiable sans le concours des puissants, toute victoire politique congolaise sera soumise au contrôle des médiateurs de nos crises.
Aussi, il est bon de rappeler qu’à tous les niveaux de l’administration du pays, les congolais doivent parler le même langage de la paix et du développement pour barrer la route aux pêcheurs en eau trouble. L’histoire récente du Congo nous l’a prouvé à suffisance. Quand le Président est seul patriote, l’ennemi du pays, l’affaiblit en passant par ses collaborateurs. Quand le peuple seul est nationaliste, l’ennemi du pays l’écrase par ses dirigeants corrompus. Ceci dit, l’espoir des congolais renaitra de la synergie entre tous les congolais et congolaises pour la défense et la sauvegarde de leur idéal commun de paix et de prospérité. C’est cette conscience commune qui manque le plus aux congolais plus que l’argent et la force militaire. C’est aussi contre cette conscience commune que travaillent jour et nuit ceux qui se nourrissent comme des sangsues sur le cadavre de la R.D. Congo. L’union des congolais pour la défense des intérêts congolais est la bombe qu’il nous faut pour bouter l’ennemi dehors. Un peuple bien organisé par ses leaders autour de la sauvegarde de leur intérêt commun sortira vainqueur de toute attaque de l’ennemi aussi puissant soit-il.
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Chers congolais, chers frères et sœurs chrétiens, ne perdons plus notre temps à jouer le jeu de l’ennemi de notre peuple. Nous n’allons pas nous réapproprier notre avenir par le sabotage des outils d’intérêt commun, les attentats contre les autorités actuelles, les embuscades sur les routes, le musèlement de la presse, la chasse aux opposants, le clientélisme politique, etc. Rappelons-nous la fin des régimes communistes avec leur KGB… Notre lutte doit se construire plutôt autour des valeurs africaines et universelles de respect de l’autre, de la valeur de la vie humaine, de la solidarité, du travail en équipe, de la mise en commun des biens, de l’union des forces pour l’acquisition d’un plus grand bien, etc. C’est une honte pour nous congolais de demander l’eau potable à la Monuc, à l’ONU, etc. Prenons notre destin en mains en construisant la nation congolaise avec tous ses fils et filles dans la concorde et la paix.
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Ne perdons espoir comme les disciples de Jésus qui s’étaient dispersés par peur. Jésus marche avec nous sur la route de notre désespoir pour raviver notre espérance. Comme Jésus avait dit aux Femmes de Jérusalem qui pleuraient pour son sort, Jésus demande aux congolais qui se lamentent de la déconfiture du pays, de pleurer plutôt pour leurs enfants congolais et pour eux-mêmes, car c’est eux la solution. Il est donc ainsi inutile de pointer du doigt des dirigeants éloignés sur qui on a aucune emprise et aucun contrôle immédiat. Inutile d’accuser la communauté internationale à longueur des journées si on n’a pas rempli proprement sa part du contrat à la base en payant ses taxes de la voirie, du péage route, de l’hygiène, en participant au Salongo du village ou du quartier, ou si on est le premier à bafouer l’autorité du chef local, etc.
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Maintenant que nous avons parcouru avec succès le premier pas vers la démocratisation en franchissant le cap des élections, le moment est arrive de nous organiser de telle manière que nous puissions avoir de l’emprise sur ce qui se passe sur notre terrain, dans notre maison, dans notre quartier, notre groupement, notre territoire. N’attendons pas que les blancs nous apportent de l’eau à boire, de la nourriture, des vêtements, etc.… Apprenons plutôt à subvenir à nos besoins vitaux nous-mêmes. La mort et la résurrection de Jésus nous rappelle que rien n’est impossible si nous croyons en Dieu à la manière de Jésus.
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Vincent K. Machozi, a.a.
Boston University, (USA)
Beni-Lubero Online
Chers frères et soeurs en Christ, chers compatriotes congolais,
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Malgré la souffrance et la passion congolaises qui durent depuis des décennies et dont on ne voit pas encore des signes d’une aurore prochaine de résurrection et de glorification socio-politiques,
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Beni-Lubero Online souhaite à tous ses lecteurs et lectrices, un joyeux et fructueux temps pascal qui durera 50 jours à partir de ce dimanche des dimanches 4 Avril 2010 !
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Célébrer le sacrifice de Jésus qui a été fidèle jusqu’au don total de sa vie pour la libération des humains de la servitude du pouvoir religieux et politique de son temps, c’est rappeler aux chrétiens congolais qui constituent 98% de la population congolaise, qu’il n’y a pas de libération sans fidélité à l’idéal de la libération de la R.D. Congo, sans sacrifice de soi, sans vie donnée, et sans messie à l’instar de Jésus de Nazareth.
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Si la R.D. Congo ploie toujours sous le poids du fardeau, c’est parce qu’aucun de ses fils et filles ne veut porter l’étendard de la libération du pays à la manière de Jésus qui, rejeté par le pouvoir religieux et politique, se tourna vers les pauvres pour les enroler dans son mouvement de la non-violence, de l’amour des ennemis, du pardon sans conditions, etc. Pour avoir opérer cette révolution sociale, religieuse, et politique, le Christ fut tué par le complot de deux pouvoirs, religieux et politique. Son mouvement de la non-violence se nourrira du sacrifice de son fondateur pour continuer l’œuvre en dépit des persécutions et emprisonnement des adeptes et des leaders. Cette libération initiée par Jésus attendra le IVème Siècle pour porter ses fruits quand finalement le pouvoir politique d’occupation se rendra à l’évidence de l’efficacité du mouvement des paysans nazoréens et signera la paix avec lui. Cette attente entre le pouvoir politique et les disciples de Jésus durera plus de 11 siècles.
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En dépit du fait que cette attente acquise se perdra progressivement depuis les guerres de religion, en passant par les révolutions intellectuelles et politiques, jusqu’à la mondialisation actuelle du capitalisme néo-libéral qui finance la souffrance congolaise, l’exemple de Jésus et du mouvement issue de lui nous rappelle que l’œuvre de libération n’est pas instantanée, digitale, comme certains politiciens le prétendent. Elle n’est pas non plus magique comme certains prédicateurs voudraient le faire croire. L’œuvre de libération est souvent un travail de longue haleine. Comme la souffrance congolaise est une oeuvre humaine et non une malédiction de Dieu, ce sont les congolais eux-mêmes qui devront devenir un jour les acteurs de leur propre libération.
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La R.D. Congo a besoin de ces libérateurs congolais travailleurs, visionnaires et désintéressés. Mzee LDK n’avait-il pas prédit que les congolais se sauveraient eux-mêmes? Plusieurs personnes ne voulaient pas le croire. Au contraire la foule sans âme comme celle qui a fait livrer Jésus et fait libérer le bandit Barabas, avait poussé Mzee LDK à aller signer la mort du Congo à Lusaka ! Mzee ne voulait pas non plus de la MONUC et de Ketumile Masire, l’anglophone facilitateur du dialogue entre francophones ! La foule avait encore forcé Mzee LDK d’accepter la Monuc et la médiation anglophone. Aujourd’hui la prophétie de Mzee LDK se réalise sous nos yeux. 20 000 Casques Bleues, une centaine des sommets de paix et de dialogue, n’ont fait qu’empirer la situation des congolais. A la mort de Mzee, le chiffre des victimes congolais était de 300 000 morts. Ce chiffre est aujourd’hui passé à 7 millions des morts congolais en dépit de la forte présence de la communauté internationale qui avait fait de sa présence au Congo la condition sine qua none de sortie de crise. Mais hélas, chaque jour qui passe, ajoute quelques cadavres au chiffre déjà alarmant des victimes congolaises! La situation humanitaire est toujours jugée catastrophique par la société civile congolaise ainsi que certaines ONG internationales! La même communauté internationale qui a tourné casaque tente de ramener le Congo à la case du départ, c’est-à-dire à l’occupation rwando-ougandaise du pays et une nouvelle dictature à Kinshasa. Adieu donc la démocratie qu’attendent toujours les congolais de tous leurs voeux! Qui a dit que Mzee LDK avait tort?
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La célébration du sacrifice de Jésus qui a libéré l’humanité de la servitude religieuse et politique offre pourtant une voie d’issue aux congolais. Tant que les congolais s’attendront à une libération et une paix facilitées par les étrangers, les capitaux d’autrui, et offertes comme un cadeau sur un plateau en or, leur carême et leur passion n’auront ni Pâques, ni résurrection, ni glorification socio-politique. Les chrétiens qui constituent 98 % de la population congolaise sont donc interpellés par la célébration de Pâques qui s’ouvre ce dimanche 4 avril 2010 et qu’il ne faut pas réduire à son aspect festif. Le temps de Pâques est un temps fort de libération de tous les pouvoirs qui nous retiennent captifs. Si tous les chrétiens congolais imitaient la vie donnée du Christ pour la libération de la R.D. Congo, demain les congolais pourront eux aussi ressusciter et entamer leur vie de gloire socio-politique. Le Christ ressuscité des morts nous dit que le prix à payer est la totale fidélité au Père et le don de soi. C’est donc cela la Pâques qu’il nous faut célébrer aujourd’hui en R.D. Congo !
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