La population de Butembo considère l’impôt foncier voté dernièrement sous forme de loi par les députés provinciaux du Nord-Kivu comme une véritable corvée. Elle attend toujours le jour que les mêmes députés voteront des lois sur la securité des personnes et de leurs biens, le droit à la vie, le droit à l’éducation, le droit à la santé, le droit à un salaire juste, etc.
En se référant au siège légal selon lequel le sol et le sous-sol appartiennent à l’Etat, soutenu d’ailleurs par l’art. 53 de la loi foncière, cela suffit de ce fait, que l’Etat ait un mot à dire pour ce qui est de la gestion de la terre. L’impôt, alors entendu comme une somme d’argent que l’administré paie à l’Etat sans contrepartie, est étroitement lié à la civilisation instruite dès l’évolution politique et économique des sociétés.
C’est dans cette lancée qu’il a été institué en RDC une sorte de redevance qu’on appelle « impôt foncier » qui doit en principe être payé par chaque citoyen ayant une portion de terre ou en tout cas ayant construit sur le sol congolais étant donné qu’il est considéré comme un droit exclusif de l’Administration publique.
Alors que la plupart des parcelles congolaises n’étaient plus imposables depuis un bon moment suite au dysfonctionnement de l’Etat et des explosions de guerre à répétition en RD Congo en général et à l’Est du pays en particulier, voici encore une fois aujourd’hui les tenants du pouvoir renaître de leur cendre à travers l’édit N° 005/2009 du 25 mai 2009 portant nomenclature des impôts, taxes, redevances et autres droits de la province voté par l’Assemblée provinciale du Nord-Kivu signifié à la population de Butembo dans la quinzaine du mois de mai 2010 où l’on recommande à chaque administré de cette Juridiction qui occupe une portion du sol Bubolais à payer l’impôt foncier pour les exercices fiscaux 2009 et 2010. Les administrés de la ville de Butembo stupéfaits de cette manière de faire, ne cessent de remettre la crédibilité des élus de peuple en cause, du faite que ces élus au lieu de plaider pour que les droits des administrés soient respectés tels que : la sécurité, le salaire équitable au travail rendu, etc, ceux-ci ne se mettent qu’à légiférer seulement pour ce qui est des devoirs de la population. Vrais ou faux représentants du peuple ?
Certes, il est impérieux de retenir que les droits vont de paire avec les obligations ou en tout cas là où il y a droits il doit y avoir forcement des obligations. Cette affirmation est suffisante pour confirmer que les administrés (citoyens) comme l’Etat en tant qu’institution, sont d’une manière réciproque sujets des droits et obligations. Cependant, en RDC et plus particulièrement en ville de Butembo, le constat est amère du fait que l’Etat tout en défaillant à sa mission veut tout de même en ce que les administrés s’acquittent de leurs devoirs en payant les impôts et taxes. Quel turpitude ?
Alors que l’Etat semble décliner à sa mission de sécuriser la population et leurs biens, de lutter contre les arrestations arbitraires, de lutter contre l’insalubrité, d’entretenir les routes, d’assurer les soins médicaux, d’instaurer une bonne politique carcérale à Butembo, etc, pour ne citer que celles-là, la population de la ville de Butembo se trouve jusqu’à l’heure contrainte de payer l’impôt foncier.
Certains agents de l’Etat se sont mis à circuler partout en ville de Butembo depuis la quinzaine de moi dernier en procédant à la distribution des fiches obligeant les propriétaires des parcelles vides, des maisons en matériaux durables, même en pisée, de payer chacun à ce qui lui concerne, l’impôt foncier conformément au tarif y figurant. Ici, ils n’ont même pas eu un laps de temps de dire aux administrés qu’il y en a des catégories qui sont exemptées de cet impôt en soutenant que tout le monde sans exception doit s’acquitter de cette imposition et que c’est d’ailleurs une mesure impérative et non supplétive.
Chose pourtant contraire à l’art 2 de l’ordonnance-loi N° 69-006 du 10 février 1969 portant code des impôts libellé à ces termes : « sont exemptées de l’impôt foncier, pour l’immeuble ou l’un des immeubles affectés à l’habitation principal, les personnes qui sont âgées de plus de 55 ans et les veuves à condition :
a) Qu’elles occupent leurs habitations principales soit seules, soit avec des personnes considérées comme à leur charge ;
b) Que leurs revenus imposables à l’impôt cédulaire sur les revenus soient égaux ou inférieurs à la huitième tranche du barème visé à l’art 84 de cette ordonnance-loi c’est-à-dire 1200 001 FC à 1686 000 FC ».
Pour dire tout simplement que les personnes âgées de plus de 55 ans ainsi que les veuves ne sont pas concernées par l’impôt foncier même si les personnes ayant distribué ces fiches d’impôt en ville de Butembo ne l’ont pas dévoilé.
D’aucuns se posent la question de savoir pour quoi l’Etat tourne toujours les yeux vers ses droits et non pas vers ses devoirs alors que ça doit aller en compactage ou de paire ? N’est-ce pas là une irresponsabilité de l’Etat ?
Alors que la population ou en tout cas les administrés sont en train de s’occuper de ce que devrait faire l’Etat tels le paie des enseignants, l’entretien des routes, s’assurer les soins médicaux malgré la médiocrité de leur salaire, l’Etat au lieu de les épauler, veut à tout prix les étouffer dans tout sens en multipliant des taxes et des impôts minute après une autre. Où allons nous donc ? N’est ce pas là une tracasserie ?
Certains administrés inquiétés de ces différentes impositions de l’Etat, réitèrent que si l’Etat congolais n’est pas à mesure de payer même 25 $ à un fonctionnaire et de respecter le SMIG, pourquoi alors continue-t-il à exiger aux administrés de payer l’impôt foncier supérieur ou légèrement inférieur à ce qu’il donne comme salaire.
L’Etat doit de ce fait comprendre et respecter le principe juridique « NON ADIPLINTI CONTRACTUS » soutenu par le Code Civil Congolais Livre III c’est-à-dire que si l’une des parties au contrat n’accomplit pas ses obligations, l’autre partie n’est pas aussi tenue d’exécuter les siennes ; l’Etat étant entendu comme un contrat social selon John Locke.
Maître MBUSA NZANZU Yotama MBENZE,
Chercheur au Groupe de Chercheurs Libres du Graben
Butembo
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