





Aux débuts des années 1990, notre pays avait confié à un évêque catholique le soin de diriger la plus haute instance de re-fondation de notre destinée politique : la Conférence nationale souveraine (Cns). Aujourd’hui, à un autre tournant décisif de notre trajectoire comme nation appelée à se donner de nouvelles institutions politiques solides et crédibles, c’est à un autre ecclésiastique catholique qu’est confiée la charge de diriger la Commission Electorale Indépendante (Cei) dont la rigueur et le sérieux décideront de la transparence et de la légitimité de nos élections. Quelle signification cette présence de l’Eglise dans le jeu politique congolais a-t-elle ? S’agit-il d’une confiance dont les forces croyantes peuvent tirer profit pour orienter la politique du pays dans le sens des intérêts vitaux de nos populations ou plutôt d’un piège d’où l’Eglise ne pourra pas sortir sans y avoir laisser les ailes de sa crédibilité ?
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Du côté protestant, l’actuel président de l’Eglise du Christ au Congo a des entrées sûres au palais présidentiel. Il y bénéficie d’une oreille attentive et y assure une sorte de direction spirituelle sereine et attentionnée. Sa position éminente au Sénat fait de lui un haut personnage de l’Etat en même temps qu’il est un grand prince de l’Eglise. On peut imaginer que sa parole a un poids politique important et qu’elle est susceptible d’éclairer les autorités de notre pays sur ce qu’elles doivent faire pour sortir la nation de ses turbulences actuelles. De même, les autorités kimbanguistes sont dans les bonnes grâces du pouvoir et leur communauté est courtisée par les hauts responsables de l’Etat comme vivier électoral important. On imagine que le Chef suprême du kimbanguisme est traité à la hauteur de son rang par les seigneurs de la politique et les stratèges des élections.
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Comment pouvons-nous, nous communautés de foi, transformer cette situation en un atout dont notre société pourra nous être reconnaissante, une fois que la nation aura été sauvée de son désastre actuel ? Telles sont les questions que je me pose aujourd’hui.
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MONSENGWO, HOMME NEUTRE
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Au temps de la Conférence nationale, j’avais été très sensible à la manière dont Mgr Laurent Monsengwo Pasinya conduisait les travaux de cette haute instance politique. Plongé dans la mare aux caïmans où s’affrontaient les mobutistes à esprit tordu et une opposition politique hétéroclite qui voulait la peau de l’ours avant de l’avoir tué, le grand prélat congolais s’était d’abord comporté comme un homme neutre, conscient de ses responsabilités et déterminé à user de toutes les prérogatives qui étaient les siennes et de toutes les ressources de la diplomatie pour ouvrir au pays un nouveau destin. Il se savait devant l’Histoire et mesurait avec force le poids que le jugement de la mémoire du peuple porterait sur son action. Avec rigueur et autorité, il conduisait les débats, éclairait les situations et cherchait par tous les moyens à éviter des dérapages qui auraient conduit la Conférence nationale à son implosion. Ce fut-là la face lumineuse de son action : une diplomatie en plein jour, nourrie par la conviction qu’un compromis politique fécond était possible entre les acteurs politiques du pays et que les forces de la société civile et religieuse trouveraient leur place dans ce compromis pour le salut de la nation. A cette première phase de l’action du prélat, il avait à son crédit toute la confiance de notre peuple et beaucoup d’entre nous voyaient déjà en lui une alternative solide et crédible au règne décadent et chancelant de Mobutu Sese Seko.
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LA TENTATION DE LA COMPROMISSION
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Après cette période de la diplomatie en plein jour, on vit Mgr Monsengwo s’enfoncer peu à peu dans la diplomatie de l’ombre, rien qu’au nom de lui-même, avec des allées et venues en permanence entre Gbadolite, où Mobutu s’était retiré, et Kinshasa, où se déroulait, en un tintamarre psychodramatique réunissant toute l’élite de la nation, notre fameuse Conférence nationale. L’archevêque fut pris dans les enjeux ténébreux du pouvoir. Happé dans les tourbillons de la géopolitique régionaliste et tribaliste, envoûté par les sirènes de la visibilité vaniteuse que confère l’action publique, enchaîné aux tractations contradictoires où l’opportunisme des uns se module à l’aune de la mauvaise foi des autres, le prince de l’Eglise donna l’impression de danser « entre les eaux », comme dirait V.Y. Mudimbe, de tanguer entre les forces mobutistes sans lesquelles rien ne pouvait se faire et l’opposition, dont l’ambition était de s’emparer pour elle seule, les rênes du pays. Sa personnalité se brouilla alors aux yeux du grand public.
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La confiance que le peuple avait placée en l’homme de Dieu se fissura. Monsengwo devint lui-même un caïman ecclésiastique parmi les caïmans politiciens. Il apprit les dribbles politiciennes, le double discours, l’art de la dissimulation et la navigation à vue. Lui qui voulait un premier ministre « vertébré » devint un président « invertébré » d’une Conférence nationale « invertébrée ». Il perdit l’autorité morale et l’aura spirituelle qui constituaient sa seule et unique légitimité en politique. L’opposition l’accusa d’être de mèche avec Mobutu, d’avoir cédé aux menaces et aux chantages du pouvoir en place et de s’être finalement vendu aux vampires du Mpr. Du côté du pouvoir, après avoir critiqué Monsengwo pour sa connivence avec Tshisekedi et pour son manque manifeste d’impartialité dans le choix du premier ministre de la Cn, les maîtres du pouvoir prirent peur devant la possibilité, de plus en plus envisageable, de voir Monsengwo devenir Calife à la place du calife. Se déclencha alors une campagne de dénigrement savamment orchestrée par les cyclopes du pouvoir. Du Cygne tout blanc qu’il était au début de la Conférence Nationale, l’homme de Dieu devint pour le pouvoir un être de pourriture et de boue, constamment en proie aux dénigrements dont les mobutistes l’abreuvaient en le présentant sournoisement soit comme un traître à la cause nationale, soit comme un être corruptible qu’ils avaient effectivement corrompu, soit comme un homme infidèle à ses engagements ecclésiastiques.
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Après avoir démoli l’autorité morale et l’aura spirituelle de l’homme d’Eglise aux yeux du peuple, les politiciens se chargèrent de saborder tout le travail de la Cn et de faire échouer, par leurs combats de caïmans fous, la volonté d’engager le pays sur la voie de la renaissance politique et socio-économique. Pouvoir et opposition crucifièrent ainsi Monsengwo à cet échec historique de la Conférence nationale. De son passage en politique, l’évêque ne retira qu’amertume et désabusement, après avoir goûté avec ravissement aux plaisirs du pouvoir et aux symboles de l’ostentation glorieuse à la zaïroise. L’échec de la Cn fut ainsi son propre échec, et quelque part, l’échec de l’investissement de l’Eglise dans le champ politique qu’elle n’a pu ni moraliser, ni spiritualiser, ni évangéliser. Fort de cette expérience malheureuse, l’actuel président de la Conférence épiscopale a tiré une leçon qui semble éclairer aujourd’hui les prises de position des évêques du Congo : la nécessité de guider les politiciens sans se laisser envoûter par leurs jeux d’ombre, d’imposture, de mensonge et de dissimulation.
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MEDITER L’EXPERIENCE DE MONSENGWO
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Je ne sais pas si l’abbé Malu Malu a médité l’expérience de Monsengwo et s’il a pu tirer les conclusions qui s’imposent pour son propre engagement dans le champ politique comme président de la Commission Electorale Indépendante. A voir la manière dont il assume ses fonctions, j’en doute fortement.
Après avoir été un temps considéré comme un représentant honnête et crédible de la société civile dans le jeu politique congolais, Malu Malu est en train de perdre le rayonnement de cette image. Il est de plus en plus perçu comme un proche du président Joseph Kabila et des caciques du Pprd. Cela signifie qu’il est d’ores et déjà accusé d’avoir choisi son camp et de travailler pour la victoire électorale du candidat du parti au pouvoir. Propulsé dans l’arène politique où il jouit déjà de tous les avantages par lesquels le monde politicien séduit et détruit les hommes de Dieu, il est devenu aux yeux de beaucoup un simple fonctionnaire du régime, travaillant pour valider par des élections manipulées la victoire d’un président déjà nommé par la communauté internationale. La manière dont le président de la commission électorale a géré le dossier de l’Udps pour l’inscription des militants de ce parti sur les listes électorales ne laisse aucun doute dans les esprits : Malu Malu et son équipe n’ont pas voulu qu’un candidat du poids d’Etienne Tshisekedi entre en lice, au risque de battre loyalement l’actuel président de la République. Toutes les arguties que la commission a pu avancer pour justifier sa position n’ont trompé personne. Elles ont plutôt laissé un goût amer à tous ceux qui ont encore dans notre pays le sens de la justice et de l’honnêteté. Tshisekedi voulait manifestement être candidat. Malu Malu et le pouvoir actuel ne lui en ont pas laissé la latitude, de connivence avec certaines forces internationales qui ne veulent pas d’un homme aussi imprévisible et aussi obtus d’esprit que le président de l’Udps. Dans cette manœuvre, l’illustre abbé congolais a perdu sa substance et sa crédibilité. Sa vision du problème est trop proche de celle de Kamerhe et du Pprd pour qu’on puisse penser à une coïncidence fortuite. Désormais, le président de la Commission Electorale Indépendante n’est plus considéré comme un homme de Dieu au service de sa nation, au nom des valeurs de l’Evangile, mais comme un homme entre les mains du pouvoir en place.
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Une fois de plus, un homme d’église va tout droit vers l’échec, au vu et au su de toute la nation. Pour être devenu un homme du système, il est maintenant un caïman parmi les caïmans, à la recherche d’intérêts qui n’ont plus rien à voir avec le salut de la Rdc. Il recevra certes les 30 deniers pour son coup de main aux forces du pouvoir. Mais il aura perdu l’essentiel dans ce marché de dupes : son âme de prêtre et de serviteur de l’Evangile. Comme Monsengwo avec la Conférence nationale, il aura été happé par l’œil du cyclone des manœuvres politiciennes.
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LUTTER CONTRE LE SYNDROME D’ECHEC
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On dirait qu’un syndrome d’échec s’installe dans la manière dont les ecclésiastiques gèrent leur relation avec la politique aujourd’hui. Il faut lutter contre ce syndrome.
Cela est d’autant plus urgent que le président actuel de l’Eglise du Christ au Congo, Mgr Marini, est englué dans la même quadrature du cercle politicien. Devenu prince de l’Etat, il n’a plus les mains libres pour assumer les fonctions critiques et prophétiques inhérentes à son statut de serviteur de l’Evangile. Comme Mgr Bokeleale au temps de Mobutu, mais de manière moins vicieuse et moins nuisible, l’évêque protestant fait partie d’un sérail politique où il se sent manifestement à l ‘aise, confortablement assis dans l’éminent rôle de conseiller du jeune président qu’il couve de la protection protestante et dont il doit sans doute souhaiter un règne éternel, dans l’intérêt bien compris. Face à sa situation, posons vertement la question : comment peut-on être un guide spirituel de milliers et de milliers de protestants, et se mettre en même temps en situation d’un prophète de cour, nourri par les grâces d’un pouvoir au service duquel on se compromet, au risque d’en devenir un enfant de chœur ou un bonimenteur de foire ? Il y a quelque chose de manifestement curieux dans le choix politique du président de l’Ecc. Devenir pilier d’un système politique tout en étant à la tête d’une institution chargée de guider toutes les sensibilités politiques de la nation, c’est la meilleure voie pour perdre le poids moral et l’aura spirituelle d’homme d’église et de serviteur de Dieu ? Peut-on justifier une telle option par la volonté d’orienter la nation vers une destinée éclairée par l’Evangile ? Quand on voit les choix du Pprd en matière de stratégies électorales, avec élimination de candidats gênants et promotion des candidats alimentaires, on peut se demander si Mgr Marini ne s’illusionne pas sur son rôle véritable et s’il ne brasse pas du vent pour 30 deniers, comme l’abbé Malu Malu. Je crains que tout cela ne se termine comme s’est terminée l’aventure du soutien politique de Mgr Bokeleale à Mobutu : un vaste chaos au sein même des églises protestantes, une décomposition morale du protestantisme et un chronique déficit de crédibilité. A trop vouloir le pouvoir quand on est religieux, avec de bonnes intentions de changer la politique, on finit par être soi-même changé par la politique et se couvrir de ridicule jusqu’à sa propre mort. La mémoire de Bokeleale est là pour nous rappeler cette triste vérité.
Quant aux autorités kimbanguistes, les pierres lancées par une foule déchaînée sur le cercueil de leur précédent chef spirituel auraient dû les alerter sur la vanité du soutien à apporter au pouvoir politique. L’alliance que son éminence Diangenda Kuntima avait nouée avec le pouvoir de Maréchal Mobutu, voici que les autorités actuelles du kimbanguisme la réitèrent avec le pouvoir du général-major Kabila, dans un tintamarre de symboles publics qui risquent un jour de compromettre toute l’Eglise. Les agents du président sont en train d’instrumentaliser le kimbanguisme pour des raisons électorales. Et les autorités kimbanguistes ne voient pas le piège. Elles sont heureuses d’avoir un rôle reconnu par l’Etat et ses hauts dignitaires. Elles jubilent presque de l’état de grâce dont elles bénéficient. Mais voient-elles qu’il est indécent de se réclamer de la mémoire prophétique de Simon Kimbangu quand on met sa communauté spirituelle au service de César ? Elles ne voient peut-être pas cela maintenant. Elles le verront un jour, quand le soutien au prince se sera transformé en un ridicule jeu de marionnettes, dans un avenir proche ou lointain.
QUE SE PASSE-T-IL DONC ?
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Pourquoi, comme Monsengwo dans le temps, Malu Malu, Marini et le chef spirituel du kimbanguisme ne comprennent pas aujourd’hui en quoi consiste la mission des hommes de Dieu et des représentants de l’Eglise dans la mare aux caïmans de la politique ? Au moment où les communautés de croyants représentent les seules forces d’espérance pour notre pays, comment se fait-il que les princes de l’Eglise s’enlisent dans le syndrome de conformation au monde politique, là où il fallait impérativement être la conscience critique, spirituelle et morale de la nation ?
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La première raison qui explique cette situation paradoxales consiste en la tentation de ces princes de ne représenter qu’eux-mêmes dans la politique, au lieu de parler au nom de Dieu et de travailler en fonction de grandes valeurs de la foi de l’Eglise comme communauté d’espérance en action au sein de notre pays. Quand un homme de Dieu cesse un seul instant d’avoir Dieu comme référence ; quand il perd de vue, un seul instant, qu’il doit penser, vivre et agir dans la lumière de Dieu en politique, il ne peut que tomber dans la déchéance de son propre être. Il lui manquera le seul socle sur lequel il peut s’appuyer : la vie spirituelle et ses valeurs fondamentales. De même, dès qu’un homme d’église ne se sent plus le devoir de rendre en permanence compte au peuple de Dieu de ce qu’il fait et entreprend dans le commerce avec les gens du pouvoir, il est en pleine perte de substance. Il s’enfonce dans la solitude de ceux qui sont loin de Dieu et se trouve livré à une errance intérieure qui lui fera prêter le flanc à toutes les tentations du monde.
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C’est ce qui arriva à Monsengwo à la Conférence nationale. C’est ce qui arrive aujourd’hui à Malu Malu, au président de l’Ecc et au chef spirituel kimbanguiste. Ils sont entrés en politique sans l’Evangile, sans le souffle de Dieu, sans le limon de toute la foi et l’espérance de l’Eglise, pour l’amour de notre pays et l’attachement aux intérêts vitaux de notre peuple. Il n’est pas étonnant qu’ils soient devenus des proies faciles pour les fauves de la politique. Il n’est pas étonnant non plus que leur image donne aux stratèges du parti au pouvoir l’opportunité de vouloir faire des églises leur marchepied vers la victoire.
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La deuxième cause, c’est la méconnaissance, réelle ou feinte chez nos prélats, de l’incompatibilité entre Dieu et Mammon, entre Christ et César, entre une spiritualité de service du peuple et une politique de la puissance pour la puissance, au mépris des intérêts du peuple. Au lieu d’une telle conscience claire des réalités, qui les conduiraient à être la conscience critique du pouvoir politique, nos princes de l’Eglise ont fait l’option d’une recherche du compromis à tout prix, avec ce que cela entraîne comme compromissions visibles ou invisibles. Ils ont ainsi oublié que leur mission est de faire l’œuvre de Dieu en politique et de faire rayonner la face de Dieu dans les orientations politiques fondamentales de la nation. Une telle mission met en lumière toutes les manœuvres du mensonge et des calculs politiciens, afin de garantir le bien commun, de promouvoir la prospérité collective et le développement durable : d’enfanter, en fait, la vie en abondance, le bonheur pour tous, dont parle le Christ.
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La troisième cause de l’échec de nos princes de l’Eglise dans le champ politique, c’est le refus d’inscrire leur action dans une vision à long terme de la vie de la nation. J’ai le sentiment qu’à la tête de la Conférence nationale comme à la direction de la Commission Electorale Indépendante, à la direction du Sénat comme dans la gestion de l’aura kimbanguiste auprès du pouvoir actuel, nos leaders ecclésiastiques ne croient pas profondément que leur gestion des réalités les confronte à l’image d’eux-mêmes qu’ils imprimeront à notre histoire nationale, à notre mémoire vitale comme à l’inscription de notre destinée dans l’avenir de Dieu sur notre sol. Ils se sont conformés à la politique politicienne à courte vue, où les gains immédiats, symboliques ou matériels, valent plus que le salut de la nation et le poids de nos responsabilités face au futur. Si Jésus s’était comporté de cette manière, il se serait agenouillé devant le Tentateur au Désert et il aurait reçu en héritage le monde du mal tel que le diable en réclame l’empire éternel. Quand un homme de Dieu se compromet avec les mensonges et les calculs politiques et qu’il cède à l’esprit du monde, il ne fait que ruiner sa propre vie en trahissant la vie de la nation. La question du Christ a ici toute sa place : « Que sert-il à l’homme de gagner l’univers s’il ruine sa propre vie ? » Que lui sert-il d’être un grand prince de l’Eglise et un haut dignitaire de l’Etat s’il perd son âme et fait perdre au pays son souffle de bonheur ?
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L’ENGAGEMENT DE L’EGLISE DANS LES ELECTIONS
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Monsengwo au temps de la Conférence nationale, Malu Malu à la Commission électoral indépendante, Marini au Sénat ainsi que le Chef spirituel du kimbanguisme comme éminence grise adulée par le pouvoir actuel, ces personnalités symbolisent ce qu’il ne faut pas faire en politique quand on est homme d’église et responsable du peuple de Dieu. Il ne faut absolument pas se compromettre quand il s’agit du salut d’une nation et il ne faut pas conduire ce peuple à se compromettre quand son avenir même est en jeu.
C’est pourquoi, les paroles du cardinal Etsou lors de sa retentissante prédication à la nation reste la seule route possible en ces temps d’élections : « l’Eglise est appelée à dire clairement à la nation qu’il nous appartient, à nous tous et toutes, forces intellectuelles, éthiques, spirituelles et populaires de la Rdc, de saisir les élections comme l’occasion de confier le pouvoir qui nous appartient à des hommes et femmes soucieux des intérêts vitaux de notre pays, au-delà de la logique des vainqueurs et des vaincus que l’on veut nous imposer pour livrer encore notre pays à de nouvelles souffrances et à de nouveaux déchirements ».
C’est aussi cette route que trace la Conférence épiscopale nationale du Congo (Cenco) dans sa dernière déclaration qui trace la voie de la réussite pour notre pays : la voie du dialogue constructif et responsable, qui rassemble toutes nos forces vives dans leur volonté de faire du Congo un grand pays de prospérité et d’espérance, un pays de paix au cœur d’une Afrique que notre nation enrichira de tous nos trésors d’humanité. Il est significatif que ce message de la Conférence épiscopale du Congo ait comme porte-parole Laurent Monsengwo Pasinya, un homme dont l’expérience à la Conférence nationale sert désormais d’éclairage sur ce qu’il faut dire et faire en matière politique quand on est homme de Dieu et responsable de communautés de foi.
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Si tous nos évêques, prêtres, pasteurs et prédicateurs s’engagent à transmettre un tel message de responsabilité et d’espérance à toutes les forces religieuses de notre pays, les élections qui s’annoncent devront nous réserver de fécondes surprises. Elles ne seront manipulées par personne, parce que chaque croyante et croyant aura voté non pas selon des mots d’ordre de vendeurs d’illusions politiciennes, mais selon les intérêts vitaux de notre nation dont je pense que chaque congolaise ou congolais a tant soit peu conscience au plus profond de son être.
Il est temps de comprendre ceci : si l’Eglise avec toutes ses communautés croyantes ne décide pas de sauver notre pays de sa déroute et de sa ruine, nous plongerons pour toujours dans les ténèbres de la violence et du désespoir. Ce n’est pas là le projet de Dieu pour nous.
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KÄ MANA
Philosophe et Théologien congolais
Texte Distribué sur Congo@yahoogroupes.fr
Par TSHIBUYI Mujinga"
Beni-Lubero Online
Edition du 12 mai 2006





