





Il y a cinquante ans, nos grands-parents et parents croyaient désormais être traités sur le même pied d’égalité avec les anciennes puissances coloniales. Ils croyaient qu’avec les indépendances, quand bien même morcelés par les colonialistes, nous, leurs enfants, se prendraient en charge et cesseraient de blâmer les “autres” pour nos imbécilités surtout politiques et économiques. Cinquante ans après, nous, leurs enfants, sont encore confortables dans les mêmes imbécilités. Alors qu’ils appelaient les Colons “Papa”, leurs enfants adoptaient le même slogan pour Mobutu, pour Kabila père et maintenant pour Joseph Kabila, ils disent: “Merci Papa”.
Si nous nous rappelons bien, c’est en réaction aux événements malheureux qui avaient endeuillés le pays pendant 7 mois que de centaines de milliers de congolais et Congolaises avaient perdu leur vie en ne voulant pas que leurs petits fils et petites filles vivent dans les mêmes conditions. Pendant les 7 premiers mois de l’indépendance, Le Katanga proclamait l’Independence en Juillet 1960; en Août le Sud – Kasaï emboitait le Katanga; le mois suivant le président Kasa-Vubu révoquait Patrice Lumumba, son premier ministre, qui sera, quatre mois plus tard, assassiné en Janvier 1961. Ces événements ni ses conséquences ne devraient pas apparaître dans le projet démocratiques du 21ème siècle. Malheureusement les séquelles politiques des années 60 n’ont jamais cessaient de faire de Congolais et du Congo des gibiers de l’abattoir dictatorial. Lorsque Jean-Pierre Seke, l’envoyé spécial du quotidien L’Observateur R.D.C. à la Conférence des Gouverneurs de Provinces, tenue à Kisangani, dans la province Orientale (25-26 Juin dernier) indique que Joseph Kabila est “visionnaire, homme de terrain et animé surtout du souci de voir les provinces jouer leur rôle de moteur de développement et de progrès social de la nation”, nous ne savons sur quel aspect de la vie public il tire ses conclusions.
C’est sur base de cette naïve appréciation que nous situons nos inquiétudes. Jamais une dictature n’a créé une démocratie. Joseph Kabila est un dictateur en gestation. Gestation qui se développe dans le Cœur de la Constitution de la République Démocratique du Congo (RDC). Cette constitution du 18 Février 2006, approuvée par le peuple Congolais par referendum est en train de créer un dictateur qu’il sera difficile de maîtriser dans le futur. J’espère que l’exemple de la Conférence des Gouverneurs de province est un cas palpable.
S’agissant de la Conférence des Gouverneurs, l’article 200 de la dite constitution stipule ce qui suit: “Il est institué une Conférence des Gouverneurs de Provinces. Elle a pour mission d’émettre des avis et de formuler des suggestions sur la politique à mener et sur la législation à édicter par la République”. La même mission est reprise dans la Loi Organique No. 08/015 du 07 Octobre 2006 portant Organisation et Fonctionnement de la dite Conférence. Ce qui frappe c’est la violation de cet article au grand jour et au vu et au su de mêmes gouverneurs. Ils se sentent confortables qu’ils sont Gouverneurs mais sans pouvoir de décision dans leurs affaires internes. La Conférence des Gouverneurs est une affaire des Gouverneurs comme le titre l’indique.
La première violation que les Gouverneurs endossent se trouve dans le premier paragraphe de la Loi Organique. Le paragraphe lit: “La Constitution du 18 Février 2006 consacre les principes de la libre administration des provinces et d’autonomie de gestion de leurs ressources économiques, humaines et techniques ainsi qu’une large décentralisation des entités territoriales à l’intérieur de la province”. Comme il n’a jamais existé une libre administration des provinces ni une gestion autonome de celles-ci, peut-être les Gouverneurs et d’autres “politiciens” s’attendaient au miracle de la part d’un président transplanté au palais présidentiel en Janvier 2001. Ce paragraphe prévoit la composition de membres de la Conférence comme étant le Président de la République, le Premier Ministre, le Ministre de l’Intérieur et bien entendu les Gouverneurs de Provinces.
Les articles 7 et 8, portant respectivement sur la composition du Bureau et de sa mission, expliquent à fond le Cœur d’une dictature. Le bureau de la Conférence est composé, selon l’article 7, des personnes suivantes: le Président de la République et son premier ministre. Les Gouverneurs, au lieu d’être les premiers dirigeants de “leur conférence”, sont de simples rapporteurs. Ils ne préparent pas les travaux de la conference, ne veuillent pas à son fonctionnement ni n’élaborent pas son budget. Qui jouent ces trois rôles: Monsieur le Président de la République et son Premier Ministre.
Il ressort de cette analyse que la continuation de la politique paternaliste des gouvernements Congo-Zaïro-Congolais où le peuple est toujours gardé prisonnier d’une petite élite des assoiffés du pouvoir est loin de trouver de révolutionnaires. Si Kabila était vraiment soucié de voir les provinces jouer leur rôle de moteur de développement, il devrait les laisser participer à ce développement en leur accordant une autonomie de décision concernant les matières qui sont de leur ressort. Comme l’indique l’article 204 sur les matières qui sont de la compétence exclusive des Provinces, “une conférence des Gouverneurs” ne peut être que ce qu’elle dit qui elle est: la conférence qui rassemble les Gouverneurs de Provinces. Comment un parent peut-il dire qu’il entraine ses enfants à marcher alors qu’ils les portent toujours au dos lorsqu’ils expriment le besoin de marcher? Ces enfants ne marcheront jamais. Comment les Gouverneurs peuvent-ils élaborer des programmes miniers par exemple lorsqu’ils ne peuvent même pas savoir le budget à allouer à ces programmes?
Le 21ème siècle devrait être un siècle éducatif. Une ère où les masses rurales sont délavées du culte de personnalité. Il est temps que les Gouverneurs et nos responsables locaux (Députés et Sénateurs) apprennent l’histoire du monde. Les pratiques médiévales de faire la politique doivent laisser la place à l’information. Il est temps que le peuple commence à se battre pour ce qui est pour eux. Je doute fort qu’il n’y a pas de Gouverneurs capables de comprendre les lignes de la constitution mieux que le Président lui-même. Pourquoi doivent-ils se soumettre à de principes dictatoriaux contraires à ceux établis par la constitution qu’ils comprennent? Étant publiée dans les quatre langues nationales, quel est le problème des Gouverneurs et de leur populations?
Les Gouverneurs doivent rejeter les paternaliste national au modèle colonialiste et promouvoir le partenariat entre pouvoir central et pouvoir provincial. Ce partenariat doit être fondé sur le respect de collaboration et d’égalité politique, de respect de lois mais aussi de respect de droits de peuples promis par la constitution. Par exemple, les Gouverneurs ne devraient plus tolérer que l’économie soit en arrêt même d’une heure chaque fois que le président est dans la ville. Si nous voulons joindre le monde international dans la course économique, nous devons nous discipliner et abandonner les idées de l’antiquité. “Les journées chômées” n’ont plus de place dans notre société du 21ème siècle. Réveillons nous, Messieurs et Mesdames les Gouverneurs. Il est temps de contester l’ingérence de Kinshasa dans les matières réservées aux Gouverneurs comme vous le faites déjà avec la répartition des revenues des impôts. L’idée générale devrait rester celle d’éprouver, pour les Gouverneurs, le besoin de communiquer entre eux, de se consulter, d’harmoniser leur politiques et programmes communes et d’élaborer conjointement des politiques comme le prévoit la Mission de la Conférence: “émettre les avis et de formuler les suggestions concrètes sur la politique à mener et la législation à élaborer”. Mais comment suggérerons-nous une idée? Les gouverneurs ne peuvent pas émettre rien ni suggérer quoi que ce soit sous la surveillance de la police gouvernementale, sous la pression d’un Monsieur le Président, ni surtout sous la présidence du Président de la République. Le rôle du Président de la République devrait se limiter à l’ouverture et au lancement des Conférences; ou d’observateur s’il n’a pas autre chose à faire. Ou s’il veut rencontrer les gouverneurs et les dicter, alors la réunion devrait avoir une autre appellation plutôt que le concept de “Conférence des Gouverneurs de Provinces”.
En conclusion, les Gouverneurs doivent demander que l’article 200 soit amendé. La Constitution prévoit les mécanismes de le faire comme l’indique l’article 218 sur la révision constitutionnelle. Le temps c’est maintenant. Un adage dit qu’on “bas le fer pendant qu’il est chaud”.
John Kapapi
Amis du Sud-Kivu/USA





