





Dans la première partie de notre réflexion publiée par www.benilubero.com il y a quelques jours, nous avions démontré que le dysfonctionnement de la démocratie ainsi que le non respect de la Constitution ne sont pas les seules causes du génocide et du dépeuplement de la R.D.Congo.
Les sociétés minières et pétrolières qui avaient financé l’agression de la R.D.Congo en 1996, sont à la base de l’économie du génocide qui a élu domicile dans la région des Grands Lacs Africains depuis le génocide rwandais de 1994. Selon Alain DENEAULT et cie, dans son livre « Noir Canada, Pillage, Corruption et Criminalité en Afrique », «Les investissements financiers de sociétés minières et pétrolières attisent les conflits quand ils ne sont pas directement à l’ origine d’affrontements sanglants» [1]
Pour le cas de la R.D.Congo, « les sociétés minières et pétrolières « ont tout mis en œuvre pour que le chaos règne »à l’Est de la R.D.Congo où elles ont imposé « leur tutelle politique sur tout groupe local qui prétend à l’action politique. »[2]
Parlant des sociétés minières et pétrolières canadiennes ou de celles cotées à la bourse de Toronto, Alain DENEAULT et cie les accusent de : « Ingérence politique et contrats léonins dans la fragile République Démocratique du Congo, partenariats avec les seigneurs de guerre, vendeurs d’armes et mercenaires de la région à feu et à sang des Grands Lacs, collusions maffieuses dans l’Ouganda voisin, accentuation des tensions armées autour du pétrole d’Ituri, mineurs enterrés vifs en Tanzanie, corruption au Lesotho, empoisonnement massif et génocide involontaire au Mali. »[3]
Sur le plan national et international, les différents groupes rebelles qui commettent au quotidien des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité à l’Est de la R.D.Congo doivent leur équipement en armes et munitions, leur financement et leur impunité aux sociétés minières et pétrolières qui dictent leur loi aux chefs d’Etats et des gouvernements, aux cours et tribunaux, aux institutions dites souveraines et démocratiques (Commissions Electorales Indépendantes, parlement, Sénat), etc.
Tant que le débat politique en R.D.Congo fera fi de l’action des sociétés minières et pétrolières qui sont les vrais faiseurs des rois en R.D.Congo, les hommes de paille de ces sociétés continueront à travailler plus es multinationales que pour le peuple congolais.
Comme hier en Amérique Latine et en Asie, les sociétés minières et pétrolières, sont les dieux du capitalisme prédateur (capitalisme sauvage ou du désastre) qui prospère dans les pays aux régimes dictatoriaux. Le prélude à toute implantation du capitalisme prédateur c’est la guerre qui détruit par tous les moyens possibles tout ce qui peut constituer un frein à son essor (les lois coutumières sur l’acquisition et la gestion de la terre, les us et coutumes traditionnels, tout conservatisme culturel, tout espèce de communisme ou communautarisme, etc.).
En 1996, des sociétés occidentales majoritairement canadiennes ont financé, armé et encadré Laurent Desiré Kabila de même que ses soutiens ougandais et rwandais pour lui permettre de renverser le maréchal Joseph Mobutu au pouvoir depuis des décennies. En échange de cette aide, et parfois avant même qu’il ne soit président de l’ex-Zaïre devenu la RDC, Kabila a consenti à ces sociétés des contrats léonins outrancièrement avantageux. La stratégie juridique des sociétés minières ayant consisté le plus souvent à taire dans ces contrats la valeur réelle des gisements qu’elles acquéraient à vil prix pour ensuite les évaluer à la hausse sur les places boursières afin d’en faire l’objet de spéculations lucrativissimes. Toutes ont ainsi induit le droit au pillage massif des ressources congolaises et la légalisation des extorsions réservées jadis au seul clan despotique au pouvoir.[4]
Depuis lors, la coalition Rwando-Burundo-Ougandaise à la solde de ces sociétés minières et pétrolières, est en guerre de destruction de tout ce qui peut être un frein à l’implantation du capitalisme prédateur à l’Est de la R.D.Congo.
La population occupant des espaces dont le sous-sol se trouve être un gisement minier ou pétrolier, est souvent la première grande victime de cette guerre car le dépeuplement est perçu par les capitalistes prédateurs comme un facteur favorisant l’exploitation industrielle à grande échelle.
C’est par exemple le cas du Au Nord-Kivu avec les Mai-Mai du Nduma Defense of the Congo (en sigle, NDC) du chef de guerre Ntabo Ntaberi alias Cheka. Cette milice à la solde du Rwanda et de la multinationale Alphamin Resources Corporation œuvrant à BISIE (Walikale), sème mort et désolation sur les populations civiles du Territoire de Walikale et d’une partie du territoire de Lubero. Alphamin Resources Corporation a acquis du gouvernement de Kinshasa 1 270 km² de surface à exploiter en territoires de Walikale et de Lubero. Cependant, sur cet immense terrain on trouve quelques villages, des vastes champs où les paysans pratiquent l’agriculture, des carrés miniers des exploitants artisanaux d’Or, de Coltan, et de Cassitérite, etc. Le travail confier aux Mai-Mai Cheka est d’insécuriser voire tuer les populations civiles vivant encore sur ce terrain déjà vendu jusqu’à libérer totalement les 1 270 km² d’Alphamin Resources Corporation, une multinationale enregistrée à la bourse de Toronto, au Canada.
La Mine de BISIE (Walikale-Sud de Lubero)
Plusieurs multinationales se sont déjà octroyé des marchés juteux de l’Est de la R.D.Congo. Ces multinationales ont comme gendarmes les armées de la région : Rwanda, Uganda, Burundi, R.D.Congo. La première Allegiance de chacune de ces armées c’est de servir les intérêts de la multinationale de tutelle qui s’approprie ainsi le service du gouvernement, de son armée, de ses cours et tribunaux, de la banque… Des dirigeants qui prêtent serment de servir la nation finissent par être des « serviteurs du capitalisme prédateur » en tournant le dos aux intérêts primordiaux de leurs peuples. C’est cela qui explique pourquoi les massacres des civils s’amplifient au vu et au su de l’armée ou de la Police.
A Beni, plus précisément à Eringeti, la Monusco a découvert que certains des tueurs des civils étaient infiltrés dans les forces de sécurité congolaise. C’est ce qui ressort des propos du général Jean Baillaud :
«Ils opèrent complètement en uniforme FARDC, ou complètement en civil. Ils se mêlent aussi à la population et peuvent même éventuellement s’imbriquer dans des opérations conduites par les forces congolaises »[5]
Comme dans toutes les guerres du capitalisme prédateur, les victimes ne sont pas les Présidents de la République, les ministres, les gouverneurs de province, etc. mais les populations civiles très souvent considérées comme blocage à l’essor du capitalisme. En effet, les populations civiles résistent souvent au changement brusque et sans mesure d’accompagnement que proposent les capitalistes du désastre.
Les massacres des populations en cours en territoires de Beni-Lubero ont visiblement comme objectif le dépeuplement de l’Est de la R.D.Congo pour donner place à une exploitation industrielle des minerais qui s’y trouvent. En effet, plusieurs explorations du terrain auraient déjà trouvé que certains villages et cités sont construits sur des gisements importants de Coltan, d’Or, et de pétrole. Dans la logique du capitalisme du désastre qui tire plus de profit de la souffrance que de la paix, la seule façon d’accéder à ces gisements c’est de tuer ou provoquer par une guerre un déguerpissement forcé des habitants de ces villages.
Selon les analystes de la situation actuelle de la R.D.Congo, si rien n’est fait par le peuple congolais lui-même pour faire partir du pouvoir tous les dirigeants qui tirent profit des massacres actuels des populations civiles, ce qui se passe actuellement en territoire de Beni peut dans un avenir proche sonner le glas de la R.D.Congo. Une des conséquences de cette guerre pourra être la balkanisation de la R.D.Congo en plusieurs petits pays correspondant chacun à une zone d’influence d’une multinationale, avec ce que cela comporte comme catastrophe humanitaire.
Voici les noms des multinationales exploitant les minerais de l’Est de la R.D.Congo :
– Alphamin Resources Corporation (registered on the Toronto Stock Exchange): Lubero/Walikale
– Mining and Processing Congo (MPC): Une filiale d’Alphamin Resources Corporation,
– Loncor Gold ( du Canada) (Lubero/Ituri)
– Banro Gold (Canada): in Twangiza au Sud-Kivu, etc,
– Anglo Gold Ashanti (South Africa): Ituri
– Kilo Gold (Joint-Venture DRC-Canada, Toronto Stock): Mines d’Or de Durba)
– Moku-Beverendi Gold ( Israel: Dan Gertler): Ituri
– Randgold (siège à Jersey, dans les îles Anglo-Normandes, ses actions sont à la Bourse de Londres et au NASDAQ) : Sud-Kivu/ Ituri
– Beverendi (Suisse): Mines d’Or de Watsa
– Wango (Suede) : Aru-Watsa
– Barrick Gold (Canada-Bourse de Toronto)
– Heritage Oil & Gas (Paradis Fiscal de Channel Island, St Hélier)
– Dan Gertler (Israel) : Pétrole Kyavinyonge-Vallée de la Semliki
– Bemo Mining (USA)
– Anvil Mining (Canada, Australie)
– Diamond Fields Resources
– Adastra ( American Mineral Fields International)
– First Quantum (USA, UK)
– Lundin Mining (Multinationale enregistrée à la bourse de Toronto, Canada)
– De Beers (South Africa),
– Tenke Fungurume Mining Corporation (USA, international)
– US-Canadian corporation American Mineral Fields (monopole de comptoirs d’achat du Diamant de Kisangani),
– Canadian Barrick Gold Corporation (whose board of directors includes George Bush Senior, former Prime Minister of Canada Brian Mulroney, and the former director of the German Central Bank Karl Otto Pohl): L’Or de Kilo Moto en Province de l’Ituri.
© Beni-Lubero Online
[1] Alain DENEAULT, Delphine ABADIE & William Sacher, Noir Canada, Pillage, Corruption et Criminalité en Afrique, Les éditions Eco société, Montréal, 2008, p.51.
[2] Alain DENEAULT, Delphine ABADIE & William Sacher, op.cit., p.11.
[3] Idem, p.7.
[4] Alain DENEAULT, Delphine ABADIE & William Sacher, Noir Canada, Pillage, Corruption et Criminalité en Afrique, Les éditions Eco société, Montréal, 2008, p.51
[5] Radio Okapi, 5 Décembre 2015





