





Un article publié par le journal Le Potentiel le 23 décembre 2010 et intitulé ‘Droits de l’homme : tirs croisés sur le RDC’ a retenu sérieusement notre attention. Il pose des questions d’un grand intérêt exigeant une analyse approfondie, dont celle-ci : « Que s’est-il passé pour que la communauté internationale se réveille d’un coup pour exiger de la République démocratique du Congo plus d’actions en matière des droits de l’Homme ? » Voulant expliciter son idée, l’auteur écrit : « Après la France qui, par son ambassadeur aux droits de l’Homme, a qualifié de « naufrage » la situation en RDC, les Etats-Unis sont revenus à la charge, en début de semaine, en présentant comme mobile à l’exclusion de la RDC des avantages de l’Agoa le désastre dans le domaine des droits de l’Homme. Des tirs croisés qui cachent quelque chose d’insolite. » Dans cet article, la communauté internationale est synonyme de la France et des USA. C’est quand même drôle ! Au nom de quoi la France et les USA peuvent, à eux seuls, représenter toute la communauté internationale ? Et puis, ces deux pays ont-ils des leçons à donner à aux pays africains en général et au Congo (RD) en particulier dans le domaine du respect des droits de l’homme ? Ne sont-ils pas les partisans ultralibéraux de la destruction créatrice ?
En lisant l’article susmentionné, nous avons cherché en vain un petit renvoi au rôle joué par les USA et les multinationales occidentales dans la guerre d’agression que notre pays connaît depuis les années 90. Comment un pays qui a armé « ces tueurs Tutsis » contre la RD Congo peut-il, tout à coup, s’insurger contre le non-respect des droits de l’homme entretenu par ceux-là mêmes qui ont bénéficié et bénéficient encore de son appui logistique, de ses services secrets et de la formation dispensée par ses officiers militaires ?
Pour rappel, un journaliste américain « qui est un ancien membre de la National Security Agency (NSA) soutient (…) que les services secrets américains, notamment la CIA, ont utilisé le Rwanda comme base lors des deux invasions du Congo-Zaïre par l’armée rwandaise. L’aide des Etats-Unis, de la Grande-Bretagne et d’Israël au Rwanda est cruciale et répond à des objectifs géopolitiques et économiques précis. » (C. Onana, Menaces sur le Soudan et révélation sur le procureur Ocampo. Al-Bachir et Darfour. La contre-enquête, Paris, Duboiris, 2010, p. 264) Dans sa contre-enquête sur le Soudan, étudiant le rôle des Etats-satellites dans l’expansion l’impérialisme américain et du mondialisme économique en Afrique, Charles Onana arrive entre autres à ce constat-ci : « Dans sa nouvelle mission de sous-traitant du mondialisme économique en Afrique noire, le régime actuel du Rwanda est autorisé à commettre les excès et tous les crimes (…) ». (p. 263)
Est-il possible de soutenir à la fois les criminels de guerre et leurs alliés (qui se retrouvent aujourd’hui au Congo RD) et la lutte pour le respect des droits de l’homme ? Nous ne pensons pas. Et puis, pour certains spécialistes des USA, le respect des droits de l’homme ne font pas partie de leurs priorités. Ils classifient ce pays parmi les « Etats-manqués » ; c’est-à-dire, des Etats qui « ne peuvent ou ne veulent pas protéger leurs citoyens de la violence, voire de la mort. Ils sont tendance à se croire au-dessus des lois, nationales ou internationales, donc libre de se livrer à des agressions et à des méfaits. Et, quand ils ont les dehors d’une démocratie, ils souffrent d’un grave « déficit démocratique » qui prive leurs institutions formelles de contenu réel. » (N. CHOMSKY, Les Etats manqués. Abus de puissance et déficit démocratique, Paris, Fayard, 2006, p.8)
Questionné sur l’évolution de la politique occidentale vis-à-vis de l’Iran, Jean-Michel Vernochet (journaliste français indépendant et spécialiste des questions géopolitiques) donne une réponse permettant de comprendre certains fondements de la politique américains. « Là où la force n’est pas à l’ordre du jour, dit-il, la ruse prévaut… les É-U ne lâchent pas leur proie sauf contraints et forcés, et l’arrivée d’une nouvelle Administration à Washington ne change en rien les données fondamentales qui dirigent et orientent la politique américaine depuis 1991 et l’effondrement de l’empire soviétique… Les É-U n’ont pas encore renoncé à exercer une hégémonie mondiale (sous couvert de ce que l’on nomme pudiquement « l’unilatéralisme »). Leur maîtrise des mers, de l’air et de l’espace est intacte et à ce titre leur pouvoir d’intervention tous azimuts. À l’exception notable de l’aire eurasiatique couverte par l’Organisation de coopération de Shanghaï, laquelle prend de plus en plus figure d’Otan russo-chinoise. Au final, leurs capacités de nuisance universelle restent entières… » (Lire l’interview (donnée à Paris le 16 mars 2009) intitulée Rencontre avec Jean-Michel Vernochet) Le respect des droits de l’homme rentrent pas dans leurs priorités.
Poser la question du respect des droits de l’homme pourrait participer de leur ruse ; ou ils seraient en train d’appliquer deux des dix stratégies de manipulation des masses étudiées par Noam Chomsky ; la deuxième. : créer des problèmes, puis offrir des solutions. (Cette méthode est aussi appelée « problème-réaction-solution ».) Ils créent des guerres chez nous et accusent leurs marionnettes présentes dans les institutions du pays de ne pas respecter les droits de l’homme afin que le public congolais s’en prenne à ces dernières tout en laissant tranquilles les acteurs pléniers qu’ils sont. Il pourrait, au moment opportun, solliciter que ces acteurs pléniers travaillent, dans l’ombre, à l’issue des élections bidon, à leur remplacement par d’autres « bonnes » marionnettes. Créer des problèmes et offrir des solutions permet aux « maîtres du jeu » de le demeurer (tout en apparaissant pas au grand jour.)
Et la troisième : la stratégie de la dégradation. (Pour faire accepter une mesure inacceptable, il suffit de l’appliquer progressivement, en « dégradé », sur une durée de 10 ans par exemple.) Un Congo trop grand où les responsables des institutions ne réussissent pas à protéger les citoyens pourrait être balkanisé afin que ceux-ci étant plus proches de ceux-là, ils puissent jouir du respect de leurs droits. L’affaiblissement permanent des institutions depuis bientôt plus de trente ans pourrait conduire à la balkanisation du pays chère au mondialisme économique. Il pourrait s’offrir le marché de l’Afrique de l’Est avec un Grand Kivu coupé du reste de la RD Congo.
Que les USA aient émis leurs critiques sur la dégradation des droits de l’homme au Congo après la France, cela est compréhensible. Les deux travaillent ensemble. La France de Sarkozy est devenue le supplétif de Washington. Les visites de Bernard Kouchner et de Nicolas Sarkozy au Rwanda pour s’attirer les grâces de Paul Kagame en sont un témoignage patent. « En Afrique comme ailleurs, écrit Pierre Péan, la France s’est abaissée au rang de supplétif de Washington, elle se contente de gérer tant bien que mal ce qui reste des anciens acquis (AREVA, Bolloré, Bouygues et Total)… » (p. P. PEAN, Carnages. Les guerres secrètes des grandes puissances, Paris, Fayard, 2010, 537)
Que les USA aillent jusqu’à imposer des sanctions excluant la RDC de l’AGOA du moment qu’ils poursuivent leur commerce extérieur avec le Rwanda, cela est aussi compréhensible. Cette exclusion est un trompe-l’œil ; le Rwanda fait l’affaire. Les USA auront ce qu’ils veulent avoir du Congo à partir du Rwanda. Dans cette stratégie, exclure la RDC de l’AGOA pourrait revenir à faire pression sur « les gouverneurs de Kinshasa » pour qu’ils adoptent davantage la ligne de conduite de leur mentor du Rwanda.
N’oublions surtout pas que la décision politique prise par les institutions financières occidentales (internationales ?) pour annuler la dette odieuse de la RDC visait un objectif majeur : l’amélioration du climat des affaires. C’est-à-dire la privatisation de tous les secteurs stratégiques de notre pays (mines, industries, transport) et le refus de la revisitation des contrats miniers léonins, à l’exception de ceux signés avec la Chine.
Pour tout prendre, disons que ceux qui violent les droits de l’homme au Congo sont, pour la plupart, les acteurs apparents d’une guerre menée contre notre pays par les puissances occidentales (les USA, la Grande-Bretagne, Israël et leurs alliés) et les lobbys financiers (qui en sont les acteurs pléniers). Quand les USA et le France traitent de la question des droits de l’homme, il serait toujours bien indiqué de poser cette question : « Que cache cette rhétorique des partisans de la destruction créatrice et du mondialisme économique ? » Souvent, elle est annonciatrice des catastrophes politiques, économiques, sociales et culturelles préjudiciables à nos populations traînées dans la boue par les marionnettes des puissances occidentales et des lobbys financiers opérant au sein des institutions officielles doublées d’autres parallèles.
Dans le traitement de l’information donnée par les médias dominants sur les prises de position des puissances occidentales sur notre pays, il est toujours important de nous référer à notre histoire. Elle permet une appréciation avertie de ladite information. Il est aussi important de connaître les rapports que ces puissances occidentales entretiennent avec certains Etats-satellites africains, certaines élites compradores et certaines multinationales à l’affût des ressources naturelles et des matières premières stratégiques. D’où la nécessité d’être constamment branché sur des sources formation et d’informations éprouvées.
J.-P. Mbelu
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