





La refondation d’un Etat de droit, plus que jamais urgente pour la bonne gouvernance en RDC
« Les derniers affrontements entre les militaires commis à la garde de M. Jean Pierre Bemba et les forces de l’armée régulière dans la capitale Kinshasa montrent qu’il est temps d’enrailler l’indiscipline au sein de l’armée », a déclaré M. l’Abbé Apollinaire Malumalu Muholongu au cours d’une conférence de presse tenue le mardi 27 mars au siège de la Communauté Sant’Egidio à Rome. « La démocratie est une culture, a-t-il ajouté, et l’Etat de droit une tâche ».
Dans son analyse des défis et perspectives pour l’avenir de la RDC, le héraut de la jeune démocratie congolaise a tenu à rassurer l’opinion à propos des récents événements malheureux de Kinshasa qu’« il ne s’agit pas ici d’un problème politique, moins encore du musèlement d’un opposant politique, mais d’une indiscipline notoire au sein de l’armée républicaine. Personne n’a été séquestré parce qu’il a osé parler. Loin de là . Il s’agit d’une crise au sein de l’armée et non d’une crise entre le pouvoir démocratiquement élu et l’opposition politique. » Toutefois, déplore-t-il, « en cas de conflit, la réaction de l’armée s’est toujours révélée disproportionnée parce que faite dans la précipitation ». Cependant, si un tel règlement de conflit devient la norme, il y a de quoi s’inquiéter.
D’où, l’exigence de la refondation de l’armée républicaine et d’un Etat de droit pour lutter contre les violations massives de droits de l’homme, remettre la population au travail en lui assurant la sécurité et le salaire décent pour sa survie. En effet, au bout du processus électoral, la population a des attentes. Elle espère la fin de l’impunité et de l’arbitraire, la restauration de l’autorité de l’Etat et la prise en compte de son bien-être. Le document stratégique de croissance et de réduction de la pauvreté est déjà signé par le gouvernement. Ses objectifs sont clairs et bien définis, mais l’application s’ensuivra-t-elle aisément ? Là est le défi.
La population, quant à elle, par les élections, a donné une bonne leçon aux politiques qui étaient fatalistes, défaitistes. Ceux-ci, en effet, voyaient tout au pire. N’est-il pas temps qu’ils croient en cette force, l’optimisme du peuple qui a pris son destin en mains en se frottant aux élections d’où il sort avec une vision renouvelée de lui-même et un engagement on ne peut plus déterminé pour la reconstruction de la nation ?
Après 40 ans, la RDC a une constitution, un président démocratiquement élu, un parlement… D’aucuns s’en réjouissent, mais l’Abbé Président de la CEI, quoiqu’optimiste, rappelle que « la démocratie n’est pas un état, mais une culture. On n’y arrive que lorsque le mécanisme de concertation, le mécanisme de prise des décisions et celui de contrôle deviennent suffisamment transparents. ».
Finies les élections, vient le temps du rendement des comptes des dirigeants au peuple, souverain primaire. Les élus doivent désormais s’habituer à cet exercice démocratique. Pour ce, il faut « garantir les élections régulières pour qu’ils se rendent finalement compte de la souveraineté du peuple ». Il faut néanmoins une séparation des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire. Aussi faut-il que les règles de jeu entre le pouvoir et le contre pouvoir soient clairs. A ce propos, la société civile, loin de se satisfaire de la suppléance à l’absence de l’autorité de l’Etat, doit jouer son vrai rôle, à savoir la régulation.
Bien plus, les militaires doivent être casernés. Cependant le brassage de l’armée pose trois problèmes non moins importants que M. l’Abbé Malumalu, acteur de la société civile et politologue avéré a épinglé. Il s’agit, bien entendu, d’un brassage presque unilatéral. Selon lui, « le brassage de l’armée doit être intégral et non constituer un agrégat des milices ». Les conditions de casernement doivent être prévues et le traitement des militaires amélioré ». Le comble est qu’au cours des derniers événements de Kinshasa, les milices de M. Jean Pierre Bemba comme les militaires de l’armée régulière ont tous pillé à leur passage. Les conditions de vie des militaires doivent être prises en considération, cela éviterait beaucoup de dérapages.
Quoiqu’il en soit, au point de vue militaire, il reste encore des ingrédients très importants de la crise. La présence des groupes armés étrangers sur le territoire national et les groupes armés appartenant à certains leaders politiques congolais est un danger imminent pour la RDC comme pour ses pays limitrophes avec qui il a signé un pacte de stabilité et de non agression. En même temps le pays est encore enclin au pillage des ressources qu’on ne peut contré que s’il y a une reforme de l’armée.
En fait, « si le gouvernement ne lutte pas contre le pillage des ressources, il ne saura pas maximiser les recettes. Par conséquent il ne saura pas atteindre ses objectifs. D’où l’exigence d’une bonne gouvernance ». Ce défi est aussi épineux que la lutte contre la corruption. La reforme de l’armée et des services de sécurité est la base de la solution de la crise congolaise. Néanmoins, s’il n’y a pas une reforme de la justice- celle-ci a longtemps été inféodée à l’exécutif-, l’impunité et l’arbitraire continueront à sévir en RDC. Au menu, il sied d’ajouter la réforme de l’administration. Mais à part tout cela, le peuple attend voir s’améliorer les infrastructures de base. Le développement en dépend en grande partie.
Ainsi peut-on espérer rompre le cycle des transitions que les R.D. Congolais ont supporté depuis l’indépendance. Une fois réglé « le conflit des textes et celui d’intérêts, après une analyse sérieuse de la longue crise institutionnelle, économique…, la RDC peut repartir si et seulement si un Etat de droit s’y installe définitivement ».
Dans une analyse équilibrée de la situation politique de la RDC et des perspectives d’avenir pour un Etat de droit, M. l’Abbé Apollinaire Malumalu Muholongu, Président de la Commission Electorale Indépendante, a salué la collaboration de la Communauté Européenne et tous les pays amis pour leur soutien au processus électoral. Il a également félicité l’effort des confessions religieuses – l’Eglise catholique en tête -, et la société civile pour l’éducation civique et électorale qui a rendu possible la tenue des élections dans ce pays où les infrastructures sont quasi inexistantes, mais aussi et surtout leur réappropriation par les RD Congolais. Aussi invite-t-il tous ses compatriotes à l’école de la bonne gouvernance.
P. PALUKU MAYANI Adélard a.a.
Rome
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