




Les Nord-Kivutiens découvrent à leurs dépens que célébrer tambour battant la fin de la guerre ne signifie pas nécessairement que la guerre est finie ou que la paix soit revenue. Au contraire, depuis quelques jours, la population civile et les militaires congolais sont la cible des assaillants dont l’identité soulève des interrogations au Nord-Kivu.
Au cours du premier trimestre de cette année 2009, la fin de la guerre au Nord-Kivu a été célébrée officiellement au moins quatre fois :
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L’arrestation de Nkunda au Rwanda et l’intégration de ses miliciens dans les Fardc (22 Janvier 2009),
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Le départ en fanfare des troupes rwandaises du Nord-Kivu après la réussite des opérations Congolo-rwandaises contre les FDLR (3 mars 2009)
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L’accord de paix entre le gouvernement de Kinshasa et le CNDP de Nkunda devenu un parti politique à l’Hôtel IHUSI de Goma (23 mars 2009)
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La déclaration de fin de la lutte armée par tous les groupes armés et mouvements politico-militaires du Nord-Kivu et leur intégration au sein des Fardc (20 avril 2009)

FDLR et leurs familles en partance pour le Rwanda dans le camp Kasiki au Sud de Lubero, Decembre 2008
Toutes ces célébrations festives étaient accompagnées des accords écrits entre les différents partis ainsi que du plan-calendrier de leur mise en application. Malheureusement, on constate qu’avant les fêtes et les accords de fin de guerre égale après les fêtes et les accords. Avec Nkunda, le boucher de Kiwanja aux arrêts au Rwanda, les FDLR étant neutralisés et de retour au Rwanda, les Nord-Kivutiens ont besoin de savoir qui poursuit les tueries non seulement des civils mais aussi des militaires patriotes congolais (cas de Myanga, Walikale), les mises en feu des villages entiers, les pillages et incendies des véhicules de transport au Nord-Kivu. C’est le devoir du gouvernement de dire aux populations innocentes mais meurtries ce qui bloque toutes les déclarations de fin de guerre au Nord-Kivu et pourquoi la guerre continue de s’étendre du territoire jadis occupé par Nkunda vers les zones jadis relativement paisibles et contrôlées par les Fardc, notamment les territoires de Lubero, de Beni, et de Walikale ?

Camp Kasiki vidé des FDLR
Au courant de la semaine écoulée, des attaques d’une intensité pareille à celle du temps du CNDP de Nkunda ont eu lieu dans les villages suivants:
1. A Luofu et Kasiki au Sud du Territoire de Lubero : 17 personnes tuées, et plus de 300 maisons incendiées. D’après les habitants contactés sur place, c’est vers 21h, heure locale, que les assaillants ont attaqué les deux villages pendant 4 heures. 7 morts dont 4 enfants calcinés dans les 250 maisons incendiées à Luofu. Un véhicule a été aussi incendié dans la localité de Luofu. 10 personnes ont été calcinées dans les 50 maisons brulées à Kasiki. La société civile locale déplore la passivité des militaires FARDC déployés dans ce secteur. Ces derniers auraient pris la fuite devant les assaillants sans opposer une moindre résistance. D’après le député provincial Muhindo Nzangi, élu de Lubero, la fuite des Fardc frise la trahison dans la mesure où le village de Luofu abrite la base mobile des opérations militaires au Sud de Lubero. Pour l’instant, les habitants de Luofu et de Kasiki sont soit en brousse soit retranchés dans la cité voisine de Kaina.
2. Des assaillants non autrement identifiés avaient attaqué le village de Kikuvo, à 10 kilomètres de la cité de Kirumba. Dans ce village, les attaques ont fait 1 mort parmi les populations civiles. Plusieurs maisons ont été pillées de fond en comble et avant la mise en feu d’un véhicule de marque FUSO.
3. Pendant la semaine du 13 au 19 avril 2009, des assaillants ont paralysé la circulation sur le tronçon Kitsombiro-Kanyabayonga, en territoire de Lubero, un tronçon de route devenu une véritable «vallée de l’ombre de la mort» pour les usagers de la route et les habitants des villages environnants.
4. Dans la nuit du 17 au 18 avril 2009, deux véhicules ( un de marque FUSO appartenant à un certain MASTYLO et une voiture non autrement identifiée ) ont été brûlés à Kanyabayonga .
5. Dans la nuit du 18 au 19 avril, un camion de marque 19-24 d’un certain Mr ONI a été brûlé à Kanyabayonga.
6. A Myanga, Territoire de Walikale, les radios périphériques rapportent un bilan macabre d’une attaque des assaillants : 14 congolais tués dont 10 militaires Fardc.
Ces attaques meurtrières au lendemain de l’arrestation de Nkunda et du retour des FDLR au Rwanda soulèvent des questions sur l’identité des assaillants. Le gouvernement congolais ainsi que les puissances occidentales représentées en R.D. Congo par la Monuc qui s’étaient félicité de la fin de la guerre du Nord-Kivu doivent aujourd’hui éclairer la lanterne des congolais sur l’identité de ses nouveaux assaillants qui endeuillent le Nord-Kivu.
De l’avis de plusieurs observateurs du Nord-Kivu, comme l’entrée des troupes rwandaises au Nord-Kivu était tenue secrète, sans comité d’accueil pour en identifier le nombre à l’entrée et au départ, le gouvernement devrait créer une commission d’enquête élargie aux forces vives de la nation pour passer au peigne fin les casernes et les forêts du Nord-Kivu pour voir si certaines troupes rwandaises qui n’étaient pas rentrées au Rwanda ne s’y cachent pour poursuivre la guerre de Nkunda.
Ensuite, l’intégration précipitée des anciens miliciens de Nkunda au sein des Fardc et leur déploiement au Nord-Kivu, la province qu’ils avaient voulu dépeuplé par des massacres des populations (cas de Kiwanja et de Rubare en Territoire de Rutshuru) fait dire à certains que ceux qu’on appelle aujourd’hui éléments incontrôlés des Fardc peuvent être des récidivistes du CNDP qui profitent de leur intégration dans l’armée nationale pour poursuivre la guerre de Nkunda sans Nkunda et sans les FDLR.
En effet, l’autopsie des attaques qui ont eu lieu actuellement en Territoire de Lubero, démontre que les Fardc qui y sont déployés sont sous le commandement des anciens guérilleros de Nkunda dont on doute qu’ils se soient vraiment convertis en protecteurs du peuple congolais qui était jadis leur cible.
Certains voudraient mettre ces attaques sur le compte des éléments incontrôlés et impayés des Fardc. Même si les Fardc authentiquement congolais ne sont pas idoines, les genres d’exactions commises généralement par les militaires congolais ( extorsion d’argent, téléphones portables) ne ressemblent pas du tout à celles que les assaillants utilisent par exemple, au Sud du Territoire de Lubero, mais à celles du CNDP de Nkunda. En effet, si les tueries et incendies des villages au Nord-Kivu actuellement étaient l’œuvre des Fardc impayés, on assisterait aux mêmes exactions partout ailleurs en R.D. Congo car partout les militaires congolais sont impayés. Cet argument vaut aussi pour les mutilations des sexes féminins que certains activistes à la solde de l’ennemi du Congo tentent d’attribuer aux seuls Fardc. Pourquoi seulement les Fardc déployés au Kivu mutileraient les sexes des femmes pour les rendre à jamais improductives?
La coalition au pouvoir doit décliner l’identité de ces assaillants qui poursuivent la guerre après Nkunda et les FDLR. Cette coalition qui avait fêté le retour des FDLR au Rwanda ne peut dire aujourd’hui que les FDLR sont toujours au Congo et devenus plus forts qu’avant leur neutralisation et leur rapatriement au Rwanda. La poursuite des massacres et autres exactions contre les populations civiles interpelle le gouvernement congolais à ne pas se voiler la face devant des évidences. Les élus du Nord-Kivu au niveau national et provincial, ne doivent non plus restés passifs devant le calvaire de leurs élus. C’est maintenant le temps pour les élus de recourir aux questions orales, motions de défiance, interpellation des entités ou personnes qui poursuivent la guerre après la fête de la fin de la guerre. Les élus nationaux et provinciaux du Nord-Kivu, devraient se lever comme un seul homme pour exiger que le gouvernement et le parlement fassent au moins quelque chose pour sécuriser les populations du Nord-Kivu. Voici quelques exemples qui peuvent servir d’inspiration:
1. une évaluation concertée et sans complaisance de 4 déclarations de fin de guerre au Nord-Kivu.
2. L’identification des militaires déployés au Nord-Kivu par une commission tripartite Fardc-Parlement-Forces vives et le déploiement ailleurs qu’au Nord-Kivu des éléments Fardc issus de la milice de Nkunda.
3. Un calendrier et des mesures d’encadrement du retour des déplacés dans leurs villages,
4. la Création dans chaque village, cité, et ville d’un Conseil de securité ou une commission d’auto-défense composé des militaires, policiers, chefs locaux, membres de la société civile, membres d’ONG locales, etc. pour assurer la securité des personnes et de leurs biens. Ce conseil de securité aurait comme tâche d’organiser les patrouilles diurnes et nocturnes, informer les citoyens de la situation sécuritaire et des dispositions à prendre, etc.
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Kakule Mathe
Butembo
Beni-Lubero Online



