





Relecture du Mémorandum du caucus des députés de la Province du Sud-Kivu
à la délégation du Conseil de sécurité de l’ONU
Une délégation du Conseil de sécurité de l’ONU arrivée au Congo par Goma le lundi 18 mai a rejoint Kinshasa le mardi 19 mai 2009. Le caucus des députés du Sud-Kivu lui a remis un Mémorandum que nous nous proposons de relire dans les lignes qui suivent. Notre relecture s’inspirera du livre de Charles Onana intitulé « Ces tueurs tutsi. Au cœur de la tragédie congolaise ».
Le Mémo du caucus des députés du Sud-Kivu retrace l’histoire de la guerre d’agression imposée à notre pays dans ses grandes lignes. « En effet, écrit-il, c’est depuis 1994 que des Hutu, superbement armés, fuyant l’avancée de l’Armée Patriotique Rwandaise traversent les frontières congolaises à la faveur de l’opération française dénommée « turquoise » et s’installent dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, et, ce en violation flagrante de toutes les normes internationales régissant le droit d’asile ou de refuge. » Cette fuite des Hutu vers le Congo ne peut pas être comprise en dehors de l’histoire même du Rwanda. Comment se déroule-t-elle ? Nos députés notent « que l’histoire du Rwanda est émaillée par des guerres cycliques et fratricides édictées par l’esprit de non tolérance et de vengeance entre les Hutu et les Tutsi. Ainsi donc lorsque ce sont les rwandais de l’ethnie Tutsi qui sont au pouvoir, leurs congénères de la composante majoritaire, les Hutu, vont en exil et vice-versa. »
Nos députés s’arrêtent à mi-parcours. Ils passent à côté du plan des extrémistes Tutsi de la colonisation des pays des Grands Lacs et plus particulièrement du Rwanda et du Congo. Dans ce plan, ces extrémistes s’en prennent à tous les Bantous, Hutu et Congolais y compris. Le fait qu’ils placent leurs pions à des endroits stratégiques dans cette région participe de ce plan. Ces extrémistes, conscients du fait qu’ils sont une minorité, relisent leur histoire et envisage l’avenir de manière planifiée. Ils se disent : « Nous sommes une minorité dans la région du Kivu mais nous avons pu conserver le pouvoir aux élections de 1960 en profitant de la naïveté des Bantous. Cependant, notre habileté ayant été découverte par la suite par les Congolais, tous les Tutsi de quelque région qu’ils soient doivent mettre en œuvre le plan suivant et contribuer à sa diffusion auprès de tous les autres Tutsi, particulièrement ceux de la région des Volcans ». (Lire Charles Onana aux pages 92,93, 94 et 95) Et, dans ce plan détaillé en 18 points, ces extrémistes Tutsi notent : « Tous les Tutsi doivent savoir que les Hutu sont apparentés aux Congolais et que notre plan de colonisation doit s’appliquer aux deux groupes. » Ce plan ne peut réussir, à leurs yeux, que s’il est appliqué méthodiquement.
Donc, « tous les Tutsi doivent connaître parfaitement les méthodes utilisées avec succès pour conquérir le Rwanda et les appliquer aux Congolais et aux autres groupes ethniques qui les entourent. Il faut procéder progressivement, avec méthode, et ne pas verser dans la précipitation (…) ». Dans ce plan, les intellectuels Tutsi sont mis à profit. Qu’est-ce qui leur est recommandé ? Ceci : « Tous les intellectuels Tutsi doivent avoir pour objectif premier le contrôle de davantage de districts car tout le monde est en effet conscient de l’importance qu’il y a à contrôler les centres locaux de l’autorité politique afin de répandre des idées politiques auprès de populaces ignares. » Les moyens utilisés pour réaliser ce plan sont l’amitié, les cadeaux (dont les alcools), le mariage interethnique et l’argent qui permettent d’arracher les secrets. Ces moyens sont supposés entretenir la crédulité et la naïveté chez les Bantous tout en offrant aux Tutsi le contrôle des postes importants. Dès que cela est fait, « nous devons éliminer tous nos ennemis bantous, notamment les Bahutu », estiment les extrémistes Tutsi. Comment ? En recourant à la violence et à la terreur.
Quand nos députés du Sud-Kivu traitent du soutien du Rwanda aux côtés des pseudo-mouvements insurrectionnels, ils pointent du doigt les moyens utilisés par ce pays et ses supports internationaux pour mener à bien son plan de colonisation. Le déversement des éléments de l’armée rwandaise dans l’armée congolaise, dans les services de sécurités et dans toutes les institutions de la troisième République par le biais du CNDP et du RCD participe du contrôle du Congo, méthodiquement et sans précipitation. Ces éléments armés (et non-armés) facilitent la signature de certains accords qui détourent l’attention des Bantous et des Congolais de l’enjeu réel : la colonisation de la région des Grands Lacs par les extrémistes Tutsi avec l’appui des « acteurs pléniers ».
Dans leurs propositions « pour une paix durable sécurisant chacune des parties en présence dans la sous-région », nos députés semblent oublier que la guerre d’agression imposée au Congo est aussi « une guerre secrète de la politique et de la justice internationale ». Parmi les pays membres du Conseil de sécurité auxquels ils s’adressent, plusieurs ont torpillé la justice internationale au nom de « leur amitié » avec les extrémistes Tutsi. Le cas de la défenestration de Carla Del Ponte du Tribunal Pénal International pour le Rwanda en dit long.
Quand nos députés demandent « une implication accrue de la Monuc (…) dans le triage des éléments rwandais intégrés au sein du CNDP pour qu’ils rentrent dans leur pays », ils font comme s’ils ne savaient pas que cette intégration officielle des éléments rwandais dans l’armée congolaise par le biais du CNDP faisait partie d’une énième vague d’infiltration des institutions congolaises par le Rwanda.
De l’AFDL en passant par le RCD et le PPRD, la lente colonisation de notre pays s’est faite avec la complicité de plusieurs députés et d’autres gouvernants congolais achetés à coup de dollars. Donc, ce plan d’occupation du Congo est si avancée que retirer les seuls éléments du CNDP « visibles » serait une goûte d’eau dans la mer du plan des extrémistes Tutsi.
Le comble est que, quand nos députés parlent du déversement des éléments rwandais dans le CNDP (et puis dans l’armée congolaise), les membres du Conseil de sécurité auxquels ils s’adressent estiment, eux, qu’il y a normalisation des relations diplomatiques entre le Congo et le Rwanda. Il y a là un dialogue des sourds dont les desseins sont connus par les Congolais avertis. Donc, au lieu d’en appeler prioritairement à la communauté internationale, nos députés doivent peaufiner un plan de décolonisation du Congo avec les forces de la résistance congolaise. Ces dernières pourront, petit à petit, à partir d’une action de lobbying soutenue, permanente, désamorcer la bombe de la désinformation de l’opinion publique au sein des pays-supports du Rwanda, membres de ladite communauté internationale. Il y a encore beaucoup de travail à abattre à ce niveau-là.
Si nos députés aiment encore notre pays, ils doivent soutenir les forces de la résistance intérieure au plan de l’occupation rwandaise en jouant carte sur table au Parlement. C’est-à-dire en posant des questions essentielles : « Qui a facilité le mixage et le brassage de tous ces éléments venus du Rwanda ? Est-il seul ou sont-ils à plusieurs ? Comment procéder pour le et/ou les neutraliser afin de déjouer le plan auquel ils participent ? Pourquoi la motion sur la double nationalité a-t-elle été oubliée au Parlement ? Qui, au sein des institutions actuelles, coalise, avec les forces d’occupation ? Comment faire (nous-mêmes) pour le mettre hors d’état d’agir ? » S’ils ne se posent pas toutes ces questions, s’ils se contentent d’un Parlement-caisse de résonnance des forces de l’occupation, la communauté dite internationale n’entreprendra rien de consistant à leur place. Elle se limitera aux déclarations de bonnes intentions.
Il y a dans la relecture de notre histoire avec le Rwanda des éléments positifs à retenir. Quelque temps après les élections de 1960 et la conservation de leur pouvoir dans le Kivu, les minorités Tutsi ont pris compris que les Congolais avaient découvert leur habileté. Quelque part, elles savent que nous ne sommes pas tous aussi naïfs et crédules qu’elles le pensent. Mais savoir que chez elles, quand un plan A échoue, elles essaient un plan B, nous aiderait à demeurer sur nos gardes. Cela d’autant plus qu’ils procèdent méthodiquement, sans verser dans la précipitation.
Découvrir qu’elles travaillent à base des plans devrait nous interroger, nous Congolais, dans notre diversité, sur nos capacités d’avoir des plans auxquels nous tenons, sur le temps en évitant les feux de paille.
Ces minorités Tutsi comptent sur leurs filles et fils, sur le travail de la du savoir et de la connaissance, sur la force des idées (et de leur transmission) accompagnant les actions concrètes et sur l’argent. Elles mettent l’argent au service du triomphe de leurs idées. Elles doivent avoir intégré dans leur mode de fonctionnement l’importance des think tanks. Les critiquer, même acerbement, ne nous soustrait pas de nos obligations à accorder une place de choix au travail de la pensée. Combien des think tanks congolais comptons-nous à ce jour.
Disons que relire notre histoire avec le Rwanda et les extrémistes Tutsi peut avoir l’avantage de nous indiquer à la fois nos points forts et nos points faibles ; et nous inciter à aller de l’avant en comptant d’abord sur nous-mêmes.
J.-P. Mbelu
Bruxelles-Belgique
Beni-Lubero Online





