





Nous n’avons jamais cessé de le dire et de le dénoncer. Les massacres de Beni voire ceux au Kasaï sont l’œuvre du régime en place. De plus en plus, les faucons du régime eux-mêmes commencent à le dénoncer. Pour preuve, lisez cet échange téléphonique qu’un militaire au front à Beni a eu avec un Membre du régime.
Lundi 09 octobre 2017. Il est 23h45. J’attends mon téléphone sonner. Je décroche. Une voix en lingala au bout du fil.
– C’est moi Pépé, me dit-il en lingala (pour des raisons de sécurité, je tais son vrai nom).
– Que se passe-t-il ? Tu vas bien ? Pourquoi m’appelles-tu à cette heure ?
– Je n’arrive pas à dormir, vieux ! J’ai une conscience très chargée. Je n’en peux plus.
– Qu’as-tu fait ?
– Non, vieux ! Jusqu’il y a une semaine, je ne croyais pas à ce que nos collègues nous disaient, avant de venir ici.
– Quoi ? Que se passe-t-il.
– Il n’y a plus de doute, vieux. C’est nous les Fardc qui sommes égorgeurs, comme on le dit ici, les auteurs des massacres en RD Congo et de Beni, en particulier.
– Attends, je me lève un peu car j’étais déjà au lit.
– Pardon, je ne peux pas beaucoup parler, au risque de me faire arrêter. Je vais t’envoyer un message par whatsapp.
Quinze minutes après, j’entends mon téléphone sonner de nouveau.
– Vieux c’est moi. Comme c’est par Whatsapp, nous pouvons parler.
– D’accord. Dis-moi, tu veux dire que les massacres qui viennent d’avoir lieu le samedi dernier ont été commis par nos forces ?
– Vieux, comment pouvez-vous expliquer que deux jours avant le massacre, c.à.d. le jeudi 05, nous étions déjà en alerte. Et avant cela, des tenues neuves et autres équipements militaires tout neufs ont été distribués à certains d’entre nous. Certains ont reçu une somme d’argent importante.
– Où cela s’est-il passé ? Chez un général au niveau de Ntoni.
– Mais comment le sais-tu ?
– Je le sais par un de ceux qui ont reçu l’argent. Un grand ami à moi, parmi les officiers. Certains disent qu’il est de l’autre coté… Mais je doute car il n’a pas l’air…
– L’autre coté c’est où?
– Vous avez compris… Après la réunion, il m’a appelé et m’a dit qu’ils allaient concrétiser l’alerte qui circulait. Et que je dois tout faire pour ne pas répondre à l’appel quand on va nous mobiliser pour aller attaquer. Car c’est un coup bien monté par nos supérieurs. Ils vont égorger et quand nous allons vouloir intervenir ; ils vont tirer sur nous et sur les blancs-bleus, sous-entendu, la Monusco. D’ailleurs, ces derniers le savent. Il a ajouté qu’il est fatigué d’avoir des mains pleines de sang des innocents. Les Adf c’est nous, a-t-il dit, tout le monde le sait, la majorité présidentielle, notamment. Et de conclure : j’espère que tu as capté le msg. Panza sango na ba camarades ! Nazoo kima na ngai…. Mundos wana azaa diable !
– Tu veux dire que Mundos….
– Mais Vieux, vous voulez la preuve ? Les rescapés viennent de témoigner que les soi-disant Adf portaient nos tenues toutes neuves. Laissez, Vieux. Votre majorité présidentielle le payera cher…
– Est-ce que moi….
Sur ces paroles, mon petit a coupé le téléphone et jusqu’à ce jour je n’arrive plus à le joindre. Depuis ce coup de fil, je ne dors plus.
Chers amis de Benilubero, j’ai beaucoup réfléchi avant de vous livrer ces informations. Je sais que je mets en danger votre vie ainsi que ce militaire qui m’a contacté. Nous ne devons plus nous taire, que nous soyons de la Majorité ou de l’opposition. Je confirme ce que ce militaire a dit. C’est ce qui s’est passé aussi au Kasaï. C’est ce qui est en train de se passer au Sud-Kivu et ailleurs. Tous dans notre camp le savent. Mais pour des raisons que vous pouvez imaginer, personne n’ose parler. L’heure est grave. Et c’est l’avenir même de ce pays qui en jeu.
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