Quelque chose de louche couve en Territoire de Lubero, en Province du Nord-Kivu. Selon un déplacé de Kasugho qui vient de s’installer à Butembo, un feu couve sous la cendre de Kasugho. Après les pillages systématiques et répétitifs de la localité de Kasugho et de ses environs par les hommes en armes, on assiste aujourd’hui aux tueries et suicides au sein des Fardc intégrés. Ces derniers s’entretuent ou se suicident au lieu de remplir leur mission d’Amani Leo et de traquer les FDLR qui sont toujours visibles aux environs de Kasugho, dans les localités de KITSHANGA, MITEMBE, KAMINA, MAKUTANO, OUITRES, etc. D’où la peur des civils qui se demandent d’où viendra la paix si les forces armées chargées d’Amani Leo se comportent comme des lions blessés qui s’entre-déchirent, donnant l’impression d’avoir une autre mission que celle de traquer les FDLR ! Ces militaires d’Amani Leo peuvent-ils donner ce qu’ils n’ont pas en eux, c’est-à-dire, la paix ?
Le mercredi 3 mars 2010, le Colonel Innocent HABARIGIRA, ancien du CNDP et commandant du village de KATOYO aurait dépêché un groupe des militaires sur la colline de KAMINA où des rapports indiquaient la présence des FDLR. Notez que la Colline de Kamina est située à 25 km au Sud du village de Kasugho et Ouest du village de Katoyo.
Arrivés sur le lieu, les soi-disant FDLR ayant déjà pris la fuite, les militaires y trouvèrent des filles qui étaient tenues en otage par ces soi-disant FDLR. Sans rien dire, le commandant de cette opération aurait prit une arme abandonnée sur le lieu par les FDLR en fuite. Prenant cette arme abandonnée, ce dernier ne trouva pas d’autre cible que la tête d’un militaire Congolais Lingalaphone surnommé « COMMANDO »qui était dans son groupe. Avec un crâne fracassé par balles, COMMANDO tomba sur le champ ! Dans cette même folie meurtrière, une autre balle atteignit le pied d’un autre militaire d’expression Kinyarwanda, nommé HAKIZIMANA. Ce dernier qui saigna abondamment mourut aussi quelques heures après au Centre de Santé Universitaire de Kasugho.
Ces deux assassinats, œuvre d’un Fardc Intégré, indique combien l’opération Amani est entreprise par des soldats qui n’avaient appris qu’à tuer, voler, et violer les femmes. On ne peut pas s’étonner de voir qu’Amani Leo piétine et fait plus des morts qu’au plus fort de la guerre. La nouvelle de ces tueries au sein des Fardc continue d’alimenter les conversations dans les villages de Kasugho. L’unité militaire dite intégrée se révèle ainsi profondément divisée. D’après les militaires congolais de Kasugho, l’intégration, le brassage et le mixage, étaient des opérations tellement accélérées qu’elles ont toujours accouchées d’une souris. Et pourtant toutes ces opérations avaient l’appui de la Monuc avec tous ses spécialistes militaires !
Après les tueries des Fardc de Kamina, les Fardc Lingalaphones s’occupèrent du corps de leur camarade. Les Rwandophones s’occupèrent de leur séparément. Mais l’enterrement avait eu lieu le même jour, et au même endroit.
Lors de l’enterrement de ces Fardc, le colonel Innocent HABARIGIRA, commandant de Katoyo, sans condamner ces tueries insensées et son auteur qui était présent, félicita les curieux de Kasugho qui étaient venus participer à cet enterrement en ces termes : « nous sommes contents que vous soyez venus participer à l’enterrement de nos amis. Votre présence nous donne satisfaction. Les étudiants de l’UCNDK montrent aussi leur citoyenneté à notre égard. Restez calmes, tout passe. »
D’après un militaire Lingalaphone, c’est la mort de ce militaire d’expression Kinyarwanda qui épargna Kasugho et Katoyo d’un affrontement rangé entre Fardc Intégrés Rwandophones et Lingalaphones. Notez que les Fardc de Kasugho sont toujours sous commandement rwandophone : Le Lieutenant Colonel MURENZI à Kasugho et Le Colonel Innocent HABARIGIRA à Katoyo.
Quelques jours plus tard, toujours à Kasugho, un militaire rwandophone non autrement identifié, s’est tiré lui-même une balle dans la tête après avoir fait une confession publique de sa grande déception. Selon ce suicidaire, sa déception était grande et il n’avait plus besoin de vivre. La promesse qui leur était faite par le CNDP lors de leur recrutement au Rwanda pour venir combattre au Congo était qu’après la chute de la ville de Butembo, chacun d’eux s’offrirait en guise de récompense, une villa et une Jeep 4×4. Ce suicidaire ne comprenait plus pourquoi au lieu et place de la ville de Butembo, ils étaient restés cantonnés à Kasugho depuis novembre 2009 sans villa et sans Jeep 4×4. Pour en finir avec cette déception, il s’ôta lui-même la vie. D’après d’autres nouvelles non-vérifiées mais qui se racontent dans la région, les cas de mécontentement sont monnaie courante dans les rangs des ex-rebelles du CNDP venus du Rwanda et qui s’attendaient à une victoire rapide en terre congolaise. Ces aigris ex-CNDP constituent ainsi une autre bombe de retardement dans les villages qu’ils occupent, notamment Kasugho, Kagheri, Kyamakala, Katoyo, Vusigha, etc.
Ce climat de tension au sein des forces armées redouble la méfiance de la population locale dans le processus en cours. Pour un chef coutumier de la place, il est difficile de savoir si Kasugho dépend toujours de Lubero ou de Goma car le commandant local semble être l’autorité suprême du lieu, avec tous les pouvoirs possibles : Judiciaire, législatif, exécutif, y compris le pouvoir de vie ou de mort sur les civils mais aussi sur les militaires.
Toujours d’après ce chef coutumier, les ex-militaires du CNDP de Kasugho et de Katoyo cherchent des terrains à acheter pour leurs familles. Les propriétaires terriens leur réserve une fin de non recevoir vu leur passé récent très triste dans toute la région. Comme l’aurait dit un autre chef coutumier, « il est difficile de vivre côte à côte avec celui qui a tué votre père ou votre sœur et qui peut vous tuer aussi. Les autorités feraient bon de déployer ces ex-militaires du CNDP dans une province qu’ils n’ont pas occupé ».
La situation sur terrain au Nord-Kivu est ainsi explosive. IL faut noter que c’est ce moment explosif au Nord-Kivu que la Monuc choisit pour quitter la RDC. Quand la Monuc est arrivée en RDC il y a 11 ans, la securité était bien meilleure en comparaison avec ce que nous vivons aujourd’hui. Pour plusieurs observateurs, la situation de Kasugho comme celle de KIKINGI, KAMANGO, et d’ailleurs n’est autre chose qu’une occupation militaire rwandophone qui constituait la mission de la Monuc en RDC. La preuve est que les militaires congolais rejoignent petit à petit les civils congolais dans le camp des victimes. Les tueries des civils se commettent au vu et au su des commandants d’Amani Leo. L’objectif de ces tueurs semble être le même qu’avait Nkunda, à savoir, occuper le Nord-Kivu, le Sud-Kivu et la Province Orientale. Depuis que cette occupation prend forme, la fameuse communauté internationale cerveau moteur de cette occupation promet de soutenir les élections locales, l’octroi des nouvelles cartes d’identité, et tutti quanti. Au sein de l’Assemblée Provinciale du Nord-Kivu , l’heure est au découpage de la Province du Nord-Kivu en petits territoires et villes situés dans les zones minières. Toutes ces actions semblent liées à l’arrivée progressive des clandestins armés dans la province. Le destin des congolais est ainsi géré par des mains occultes et sous les apparences de reconstruction, les élus de 2006 ayant préferant l’enrichissement personnel au travail qui est attendu d’eux.
.
Aux forces vives de reprendre sur des nouvelles bases le processus de la paix et de la securité de la Province en engageant un débat ouvert avec ceux qui se disent aujourd’hui cadres politico-administratifs de la province. Il y a urgence! Et si la rumeur du prochain séjour de trois mois du Président Joseph Kabila à l’Est du pays se confirmait, les forces vives devraient engager un dialogue ouvert avec lui pour savoir ce qui empêche son gouvernement de sécuriser ne fut-ce qu’un village à l’Est du pays contre les Fardc intégrés et les clandestins armés qui continuent d’arriver du Rwanda et de l’Ouganda.
Propos recueillis à Butembo et commentés par Kakule Mathe
.
©Beni-Lubero Online