





Le site de Benilubero vient de mettre à notre disposition une déclaration de guerre signée par la communauté dite Rwandophone de Rutshuru. (Lire l’article : Rutshuru: Les Rwandais déclarent la guerre aux Nande du 28 novembre 2009) Cette déclaration ne souffre d’aucune ambiguïté. Ses signataires demandent aux leurs mixés et brassés dans les FARDC de se retirer et exigent que ceux qui sont dans les pays voisins de les rejoindre car, pensent-ils, l’union fait la force. Ils disent qu’ils déclarent cette guerre contre « les tribalistes » Nande.
Bon sang ! Encore une fois, « ces Rwandophones » reconduisent l’argument tribal (et ethnique) pour justifier la poursuite d’une guerre dont le nerf s’est révélé être le pillage des richesses du sol et du sous-sol congolais par les transnationales et la balkanisation de notre pays au profit de « ces tueurs tutsi ».
En d’autres termes, « ces Rwandophones » disent clairement qu’ils veulent parachever leur œuvre : occuper l’est du Congo en le dépeuplant par une guerre qu’ils veulent mener sans aucune négociation. Leur usage de l’argument tribal et/ou ethnique fait partie de cette idéologie de la culpabilisation (et de la criminalisation) de ceux qui sont tués sur leur propre sol. Pourquoi refusent-ils toute négociation ? Ils se justifient : « Nous avons adressé un mémorandum au Président Kabila Kabange pour l’informer du mauvais comportement de ce peuple Nande à Rutshuru mais il fait sourd oreille (sic) jusqu’à présent. » Et comme pour « la communauté Rwandophone de Rutshuru » les Maï Maï Nande soutiennent le gouvernement de Kinshasa, elle veut lui faire la guerre.
En plus du « mauvais comportement » des Nande à travers une ONG dénommée RACID, cette « communauté Rwandophone » reproche au gouvernement de Kinshasa de n’avoir pas respecté l’acte d’engagement signé avec le CNDP.
A la lecture de ladite déclaration de guerre, plusieurs remarques peuvent être faites. Primo, elle ne dévoile pas les accords signés avec le CNDP. Si ce sont les mêmes que ceux que nous avons lu au mois de mars 2009, ils exigeaient entre autres, l’entrée du CNDP dans les institutions républicaines. Or, le CNDP n’avait pas participé aux élections de 2006. Donc, accepter par exemple qu’il entre au gouvernement où siègent certains de ses alliés revenait à disqualifier le processus électoral (que plusieurs d’entre nous ont sérieusement critiqué). Secundo, elle affirme que les militaires du CNDP ont quand même participé à la vie de la République, dans l’armée, par le processus du mixage et du brassage. Et pour ceux et celles d’entre nous qui suivons au quotidien l’actualité de notre pays, certains militaires du CNDP brassés ou mixés dans les FARDC ont commis des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre. Le cas de Bosco Ntaganda est le plus cité. Ils ont prouvé leur capacité de nuisance. Et quand on sait que le CNDP est une milice au service de Paul Kagame, c’est-à-dire au service du pillage et du dépeuplement de nos villages et de nos cités, conseiller son intégration dans les institutions du pays, c’est s’engager sur une voie suicidaire. D’ailleurs, la preuve est donnée que depuis le processus de mixage et de brassage a eu lieu dans la précipitation, la paix sans pain n’a pas été recouvrée à l’est de notre pays. Tous les rapports internes et externes rédigés sur la situation qui prévaut dans cette partie de notre pays sont unanimes là-dessus : ce processus est un échec.
Tertio, déclarer une guerre sans négociation en ignorant toute l’histoire de notre pays depuis la guerre « des libérateurs du 17 mai 1997 » jusqu’à ce jour peut se justifier dans un contexte où l’impunité est érigée en « règle de justice », après tous les crimes imprescriptibles commis. Bref, cette déclaration est fondée sur du sable.
Donc, ceux des gouvernants qui ont cru qu’ils pouvaient faire la paix sans justice se rendront (ou se rendent déjà compte s’ils ne sont pas complices) qu’ils ont emprunté une voie qui ne mènent nulle part.
Avouons qu’une telle déclaration de guerre ne peut être accueillie favorablement que par ceux et celles d’entre nous qui sont tombés dans une amnésie suicidaire. C’est-à-dire ceux et celles qui ont oublié, entre autres, que la suspension de l’aide bilatérale (que certains pays occidentaux comme la Norvège et la Suède accordée au Rwanda) a été liée au fait que plusieurs rapports rédigés sur la guerre d’agression à laquelle nous résistons avaient attesté que ce pays et ses alliés soutiennent des rébellions (dont le CNDP) sur le sol congolais pour le piller.
Dieu merci ! Les veilleurs protecteurs de la mémoire collective de nos populations ne dorment ni ne sommeillent. Même s’ils doivent faire face, constamment, à leur diabolisation et criminalisation.
Souvent, ils sont taxés de racistes, de révisionnistes, de négationnistes et de tous les autres noms d’oiseaux. Cette criminalisation et cette diabolisation participent de la guerre psychologique menée contre tous « les petits restes » à travers l’histoire. Elles participent de la manducation des cœurs et des esprits éveillés pour mieux asservir les masses populaires. Les esprits faibles y succombent et versent dans l’auto-flagellation. Ils tombent dans la mutilation de la conscience sociale, lit du capitalisme de la prédation et du désastre auquel participe Paul Kagame et ses escadrons de la mort.
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J.-P. Mbelu
Brussels-Belgie
Beni-Lubero Online





