





Certains analystes de la situation qui prévaut aujourd’hui en R.D. Congo n’hésitent plus à la comparer à celle qui a prévalu juste après l’indépendance du 30 juin 1960.
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En effet, à peine que Joseph Kabila était proclamé vainqueur du deuxième tour des élections présidentielles d’octobre 2006, le rebelle Nkunda avait occupé la Cité de Sake et a tenté à plusieurs reprises de conquérir Goma, la capitale provinciale du Nord-Kivu.
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En même temps, au Nord-est du pays, des éleveurs Mbururu, bien armés et supposés venir de la République Centre Africaine et du Tchad ont subitement refait surface dans la Province Orientale et celle de l’Equateur où ils se comportent en véritables vandales sans se faire inquiéter par personne. Le passage de ces éleveurs aux frontières du Nord-est du pays n’a jamais été l’objet d’une enquête, un fait qui confirme la perméabilité de nos frontières et l’incapacité de l’Etat à protéger ses frontières internationales.
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Au Sud-ouest, dans la Province de Bandundu, les militaires angolais peuvent occuper pendant trois semaines plusieurs localités congolaises sans que le Gouvernement congolais ne réagisse ou ne se défende, préférant cacher son incapacité militaire sous un verbiage diplomatique et politique.
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Au Bas-Congo, une secte militaro-religieuse a occupé la scène politique national pendant près d’un mois après le massacre de 134 civils et policiers pendant les combats de rue qui avaient opposé les militants de cette secte à la Police Nationale Congolaise.
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Sur le plan politique, le Premier Ministre dit rigoureux et nationaliste, s’est fait prendre au piège des magouilleurs politiques congolais dont l’ingéniosité est sans pareille dans l’orchestration des coups bas. En effet, Gizenga a pu nommer un ministre fictif au commerce extérieur… Le feuilleton de cette histoire de faux et usage de faux continue a défrayer la chronique dans la capitale congolaise sans qu’une action de justice ne soit entreprise pour punir les coupables.
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La question de la double nationalité est toujours brulante dans l’opinion et sur la table des constitutionalistes qui refusent le moratoire de six mois par lequel le parlement pensait avoir éteint le feu ou le tsunami de la double nationalité qui risque de couler et le bateau et son capitaine.
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Sur le terrain social, la crise aux multiples facettes continue de faire des victimes… Le pays est sous la coupe de plus braves et des plus forts. On assiste à un véritable darwinisme congolais, avec la survivance du plus fort ou de celui qui s’adapte mieux aux situations difficiles. Pour ne donner qu’un exemple, la Radio Okapi a rapporté dans son journal parlé de ce mercredi 28 Février, qu’un entrepreneur congolais vient d’acheter tout un village dans la localité de Kipushi pour y développer un parc d’attraction zoologique. Plus de 400 familles seront ainsi délocalisées du lieu où elles ont toujours vécu.
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Toujours dans cette même ligne du darwinisme congolais, la même radio Okapi a rapporté l’arrivée à Bukavu d’un repris de justice en la personne du Lieutenant Colonel BIYOYO, condamné à mort par un tribunal de garnison de Bukavu au mois de mars 2006 avant de s’évader en juin 2006. Sans peur ni froid aux yeux, ce criminel est revenu en mission d’Etat sur les lieux de ses crimes, au vu et au su de ses victimes et des juges qui l’ont condamné.
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Les faits catastrophiques relevés ci-haut traduisent éloquemment la situation de non-état qui sévit au Congo de Lumumba et de Laurent Désiré Kabila, exactement comme durant le tohu-bohu de 1960- 1965.
La leçon historique qui découle de cette situation est que toute tentative d’auto-détermination des congolais a toujours été étouffée dans l’œuf par les ennemis du Congo, évidemment avec le concours de certains congolais qui trouvent bien leur compte dans ce genre d’entreprise colonialiste.
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Prenant seulement le cas du Nord-Kivu, bien d’analystes qualifient le rapprochement en catimini entre le Gouvernement de Kinshasa et le rebelle Nkunda de preuve tangible de la sécession du Nord-Kivu avec l’aval du Gouvernement de Kinshasa dont les moyens matériels et les mécanismes politiques permettent à Nkunda de se tailler un Etat dans l’Etat congolais. L’impunité dont jouit Nkunda est la même dont jouit le Lieutenant Colonel BIYOYO, promus à ce grade d’officier supérieur par la même hiérarchie militaire qui est supposée l’avoir condamné à mort. Avons-nous toujours la même armée partout au pays ? La réponse est non. Le Nord-Kivu fait-il toujours partie de la R.D. Congo ? Aux élus de la région de nous le prouver.
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Comme dans le cas des sécessions de 1960, la sécession en cours au Nord-Kivu jouit du silence complice de la communauté internationale dont la logique n’a pas changé quarante après : laisser le feu s’allumer jusqu’à l’embrasement avant d’intervenir en sapeur pompiers en faveur du camp des « good guys ».
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D’après plusieurs sources diverses, un plan de sécession du Kivu-Ituri au profit des rwandophones existerait bel et bien et Nkunda serait son exécutant principal. Ce plan est en marche depuis la signature de l’accord hors micro signé à Kigali entre le Gouvernement de Kinshasa et NKunda. Son premier fruit sur terrain est le mixage des troupes loyalistes avec les rebelles de Nkunda dont le nombre et la composition ne sont connus que de Nkunda seul. Par la magie du mixage, tous les commandants militaires de troupes mixées sont des anciens insurgés de Nkunda. Les Commandants Fardc affectés au Nord-Kivu se plaignent déjà de porter le grade et la fonction mais sans aucun pouvoir réel. Des généraux dépêchés de Kinshasa avec à la tête Tango Fort, sont les vrais artisans de la cession progressive du Nord-Kivu aux rwandophones.
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Malgré cette progression de la sécession tacite du Nord-Kivu, quelques cailloux bloqueraient la machine et son rouleau compresseur. Comme dans toute entreprise humaine, tout ne fonctionne pas comme prévu. A part l’anéantissement de la résistance mai-mai par la voie du brassage, l’élément déclencheur (ou casus belli) qui aurait provoqué l’émoi de la communauté internationale tarde à se matérialiser. Ce « kisiki ni kwale » ou casus belli de toujours est bel et bien le tribalisme, la haine ethnique, l’exclusion sur base d’ethnie… Il fallait constater l’absence des rwandophones dans le Gouvernement de Gizenga, au parlement national, au Gouvernorat du Nord-KIvu, et à l’Assemblée Provinciale pour lancer le cri pathétique du tribalisme, appeler au secours, et mobiliser les foules des exclus dans cette aventure périlleuse. C’est contre ce sempiternel alibi du tribalisme que les députés provinciaux du Nord-Kivu viennent de réaliser leur première victoire.
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Le tribalisme vaincu par les députés provinciaux est l’alibi qui a servi de chèque à blanc à la coalition Rwando-Ougandaise pour occuper militairement la R.D. Congo afin de piller ses ressources du sol et du sous-sol. Cette recette du tribalisme se portait bien jusqu’au jour des élections des membres du bureau de l’Assemblée Provinciale du Nord-Kivu. En effet le 15 janvier 2007, la mayonnaise du tribalisme n’a pas pris au Nord-Kivu. Les députés provinciaux récemment installés lui ont asséné un coup dur au moment où ceux qui souffrent du syndrome de tribalisme s’apprêtaient à s’en servir pour justifier leur assaut militaire final sur le Nord-Kivu. Les députés provinciaux piqués par une abeille de bon augure, ont fait une surprise agréable aux frères Hutu et Tutsi, appelés communément rwandophones. En effet, le Président de l’Assemblée Provinciale est Hutu (Rwandophone) et le seul député Tutsi de la Province a été élu sénateur par ses compères de l’Assemblée Provinciale. Dans une assemblée provinciale où les beniluberois constituent une majorité absolue, Hutu et Tutsi ont été élu avec une majorité écrasante. Ce geste est donc un signal fort à tous ceux qui ont fait du tribalisme leur fonds de commerce.
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L’Assemblée Provinciale vient de donner le ton et l’exemple que Hutu et Tutsi ayant choisi de vivre selon les lois en vigueur en R.D. Congo n’ont pas à s’aliéner inutilement les populations autochtones. Ces derniers ont vécu sous le régime des rwandophones depuis 1996 jusqu’à 2006. Maintenant que le souverain primaire a décidé autrement, le geste de l’Assemblée Provinciale vient rassurer les rwandophones que leur sécurité ainsi que leurs intérêts seront assurés par le pouvoir provincial. C’est cela la démocratie. Le contraire serait l’occupation, la conquête du Nord-Kivu. Le potentiel démocratique est encore très élevé au Nord-Kivu en particulier et en R.D. Congo en général. En acceptant d’aller aux élections dans les conditions que tout le monde sait, les congolais voulaient en finir avec la violence, l’arbitraire, le tribalisme, etc. pour finalement installé un état de droit. Cette bonne volonté du peuple ne doit pas être foulée aux pieds car elle est le socle de la démocratie naissante. Si jusqu’à présent le processus de pacification a été toujours une réussite à la base, l’hiérarchie politique et militaire au niveau national est celle qui crée la confusion au Nord-Kivu et qui est entrain de menacer dangereusement la réconciliation des populations Nord-Kivutiennes.
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Le peuple demande que le scandale de l’accord signé avec le rebelle Nkunda à Kigali soit revu et discuté par les élus de la Province pour mettre fin à la politique de deux poids deux mesures du mixage qui privilégie les milices rwandophones aux résistants Mai-Mai à qui on voudrait imposer des commandants qui hier avaient refusé le brassage ou qui ont été condamné à mort par la justice militaire congolaise. Cette situation est le plus grand scandale à mettre au passif du gouvernement 1+4.
Si dans l’Assemblée Provinciale du Nord-Kivu, le tribalisme est devenu orphelin, ceci n’est pas le cas dans l’armée qui reste tribale dans sa chaine de commandement. La population du Nord-Kivu attend de l’Assemblée Provinciale un éclairage sur les sujets brulants tels, le cas de Nkunda, l’accord secret de Kigali entre le Gouvernement et Nkunda, la question du mixage de l’armée et le refus des soldats rwandophones de servir le pays dans d’autres provinces, la question des milices tribales mieux équipées que les Fardc eux-mêmes, etc.
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Les combats en cours à l’Est de la R.D. Congo sous le regard complaisant de la Monuc, rappellent le début de la guerre d’agression de 1996 avec le silence de la communauté internationale, la déconfiture de l’armée congolaise, la chasse aux résistants congolais, les assassinats ciblés, etc. L’Assemblée Provinciale du Nord-Kivu a du pain sur la planche ! Elle peut compter sur le soutien de la base. Mais qu’obtiendra-t-elle du Gouvernement de Kinshasa dont certains sont les parrains de la cession du Nord-Kivu aux rwandophones? Peut-elle compter sur le Premier Ministre Gizenga pour revoir les accords de la mort signés par le gouvernement 1+4 !
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Rigobert Kanduki
Rutshuru
Beni-Lubero Online





